On ne plaisante plus. Avec sa quarantaine de vignerons que l’on retrouve sur une vingtaine de communes, le vignoble du Frontonnais a décidé de se hisser aux meilleurs rangs dans le classement des vins de France. La réputation n’a pas toujours été au rendez-vous. Tout cela, c’est du passé. Dès 2016, le Comité départemental du tourisme de Haute-Garonne (CDT31) s’engage pour la promotion du vignoble avec le lancement de la nouvelle stratégie œnotourisme du vignoble. Si, géographiquement parlant, il est à cheval sur deux départements, la Haute-Garonne et le Tarn-et-Garonne, les structures administratives concernées vont travailler dorénavant ensemble, de concert avec la maison des Vins et du Tourisme du vignoble de Fronton. De plus, la nature du sol et du sous-sol se moque pas mal de la limite artificielle départementale.
Celui-ci est un très ancien vignoble dont l’ancêtre est un cépage venu de Chypre, autrefois propriété des chevaliers de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, disons les Chevaliers de Malte. On raconte que, anecdote ! lors du siège de Montauban en 1621, Louis XIII et Richelieu se livrèrent à force dégustations, mais on ne dit pas que l’issu du siège perdu par les forces royales a eu pour cause l’abus de vins par les soldats …Reconstitué grâce à la création des coopératives de Fronton et d’un autre village tout proche, Villaudric, le vignoble a conservé un encépagement original avec la fameuse négrette, variété caractéristique, à laquelle on peut associer principalement la syrah, et moins fréquemment, le cot, le cabernet franc et le cabernet-sauvignon, le fer servadou et même le gamay. Négrette et tous les synonymes ou presque, et ils sont nombreux, signifiant la couleur très sombre du vin obtenu.
Mais la production n’a pas toujours eu une réputation à toute épreuve. C’était plutôt du même niveau que les vins dit “de l’Hérault‘ avec une connotation négative bien affirmée. Soi-disant vin des toulousains, ces derniers n’en faisaient pas leur breuvage favori, d’où la difficulté toujours de pouvoir trouver sur les cartes de vins des restaurants de la métropole quelques bouteilles de vins de Fronton. Changement de cap salutaire donc et qui ne pourra que s’amplifier avec la structure d’encouragement mise au point.
Les viticulteurs sont tous à la tâche. Ils savent que la négrette, fragile, n’est pas la plus facile à travailler mais leur enthousiasme vaincra et les flacons sauront trouver et pour certains, retrouver le chemin des cavistes, des restaurateurs et des caves de particuliers. Coincés entre les vins du Bordelais et les vins du Languedoc-Roussillon de plus en plus prisés, les vins du Sud-Ouest se doivent de faire leur place. Et maintenant que le breuvage a su retrouver son aura, il faut se faire connaître davantage. C’est pourquoi, Fronton va constituer l’un des 5 axes majeurs du tourisme en Haute-Garonne avec l’Oenotourisme dans le Frontonnais s’ajoutant à l’axe Canal des Deux-Mers et à celui appelé tout simplement Garonne. « Nous avons la volonté d’inscrire ce vignoble dans un paysage nouveau et le rendre attractif. C’est un grand chantier. » dixit Didier Cujives, le Président de ce CDT 31.
Les aides sont multiformes et ne sont pas toujours financières, comme par exemple, l’accueil dans certaines propriétés qui relèvent plus de la disponibilité du viticulteur. Et, il faut savoir aussi parler de son vin, ce qui n’est pas toujours facile, j’en conviens. Il va falloir s’entraîner avant d’arriver à des formules du genre : « Paré d’une robe profonde aux nuances violines, mon vin se montre d’abord timide au nez pour livrer ensuite toute sa richesse et sa fraîcheur dans des notes de cassis, de myrtille , de violette et d’épices. La bouche, d’un beau volume, présente de la mâche et une trame solide de tanins mûrs. » Et pour conclure, « La vivacité et la complexité aromatique sont conservées sur toute la longueur. » Mais encore pour, par exemple, cette pure négrette « à la robe sombre et au bouquet complexe », il ne faudra pas hésiter dans les qualités et savoir se lancer dans « fruits noirs, épices et fraîches nuances florales annonçant une bouche ample et ronde, soutenu par des tanins enrobés. La matière est riche, ample, équilibrée et aromatique. » Tout l’art du discours sur ce produit si divers.
Pour terminer, sachez que le vignoble candidate au label Vignobles & Découvertes attribué par Atout France et ce, pour 3 ans. Cela vient après recommandation du Conseil Supérieur de l’Oenotourisme. Il est attribué à une destination à vocation touristique et viticole proposant une offre de produits touristiques – hébergement, restauration, visite de cave et dégustation, musée, événement, grands marchés et foires – permettant au client de faciliter l’organisation de son séjour en l’orientant sur des prestations qualifiées.
N’oublions pas le guide “ 1 chef, 1 vigneron“, guide édité par la Maison des Vins et du Tourisme en partenariat avec Tables & Auberges de France et le CDT 31. Une sélection de chefs y propose des recettes en accord avec des vins de Fronton.
Dernière nouvelle, on parle d’un cépage blanc centenaire unique au monde ressuscité dans le Frontonnais. Le bouysselet, planté sur une parcelle à Villaudric, pourrait être inscrit au catalogue des cépages, après présentation devant une commission du Comité technique permanent de la Sélection. Certains vignerons se prêtent à rêver qu’après les rouges et les rosés, pourquoi pas des frontonnais blancs, la production actuelle étant encore très confidentielle.
Michel Grialou
Comité Départemental du Tourisme de la Haute-Garonne
Interprofession des Vins du Sud-Ouest