C’est l’hiver et il faut se réconforter, se réchauffer, le corps d’abord, l’esprit ensuite. Rien de tel que fréquenter des salles de spectacle pour cela. Odyssud a décidé de frapper fort et de ne vous laisser aucun répit. Après Cendrillon de Maguy Marin ces jours-ci, un spectacle d’une telle actualité artistique qu’on a du mal à croire que la première date de plus de 25 ans, (création par le Ballet de Lyon en 1985 !!), un spectacle d’une réussite totale, c’est donc, je reprends, une production rare qui vous attend pour 2 représentations, 21 et 22 janvier et pas une de plus, intitulée La Belle et la Bête.
Le film projeté, classé “fantastique“, est de Jean Cocteau comme chacun le sait, sorti en 1946, mais, et c’est là ce qui en fait la rareté, il se déroule sur un gigantesque écran en toile de fond sur une musique de …Phil Glass, interprétée sur scène par le Phil Glass Ensemble avec ses six instrumentistes – claviers, instruments à vent amplifiés, percussion – sous la direction de Michael Riesman. Cet ensemble s’est produit pour la première fois en 1969. Depuis, ils sont connus sur les quatre continents comme les interprètes incontournables de celui qui a donné le nom à leur ensemble.
L’américain Phil Glass est un familier de l’œuvre de notre poète, suite à sa rencontre, adolescent, avec le monde parisien cher à Cocteau. Et, quand il entame dans les années 90, une « trilogie cinématographique » qui comprendra Orphée (1993), La Belle et la Bête (1994) puis Les Enfants Terribles (1996), c’est donc une fascination s’exerçant depuis plus de trente ans qui guide sa plume. Il considère La Belle et la Bête comme le film le plus incontestable du créateur à la fois, romancier, dramaturge, artiste et cinéaste. Une œuvre montrant plus que toute autre, la profondeur de ses pensées et l’éloquence de sa vision artistique.
Mais, il n’y a pas que la musique qui a subi un traitement, les dialogues aussi ! « Pour la Belle et la Bête, j’ai été plus radical. En plus de composer une nouvelle musique, je suis parti des dialogues du film, et j’ai écrit des parties chantées totalement synchrones aux interventions des personnages. Ce qui produit une expérience à plusieurs dimensions pour le spectateur, qui voit les images mais également les chanteurs sur scène. Il y a des moments où la Belle apparaît sur l’écran et notre Belle la regarde, j’en ai les larmes aux yeux. Le contrepoint entre les chanteurs et l’image est merveilleux. En plus, selon les chanteurs, l’œuvre ne cesse d’évoluer. Ce n’est ni du cinéma, ni de l’opéra, quelque chose entre les deux. »
Les dialogues ne sont pas parlés mais chantés, en français, par 4 interprètes, et nous aurons même les sous-titres en français. Soyez rassurés, la synchronisation est parfaite. Sachez encore que la piste sonore originale de Georges Auric a été entièrement éliminée. La musique composée par Phil Glass épouse parfaitement l’image. C’est donc un véritable opéra pour voix, film et orchestre. Après tout, il y a bien de plus en plus de mise en scène d’opéra faisant appel à des vidéos. Là, nous avons une vidéo assez sensationnelle puisque représentée par un vrai film culte, et la musique d’un compositeur contemporain, figure emblématique de la musique dite répétitive, et surtout pas minimaliste ! ou plutôt, comme il se dit, compositeur de musique à structures répétitives.
Agé de 76 ans, Phil Glass a écrit de nombreuses pièces et à ce jour plus de vingt opéras, des concertos, des symphonies….Le compositeur a toujours un impact considérable sur la vie musicale et intellectuelle de notre temps. (D’aucuns en se plongeant peut-être dans certaines compositions actuelles de musique électro seront surpris par certaines ressemblances !)
Dans le cadre du cycle Présences vocales, le Théâtre du Capitole s’est associé avec le collectif éOle et Odyssud pour présenter cette performance, cette sorte d’ovni, comme le dit si bien Emmanuel Gaillard !
Après ces quelques phrases d’un “fan“ total du film de Jean Cocteau, gageons que nos émotions seront toujours présentes avec les images du film, et décuplées par la magie sonore de Phil Glass. « La magie gracile de Cocteau, sa lecture hermétique du conte, changent les rugissements de la Bête fumante, le sourire apaisant de la Belle, en un véritable enchantement. Porté par les chœurs célestes et les symphonies fantastiques de Georges Auric, le film se déroule sous nos yeux, soixante-quinze ans plus tard, comme s’il n’avait subi aucun outrage du temps, aussi limpide et envoûtant qu’à la première heure, comme si chaque plan était un miracle. Emporté par sa beauté, on ne rêve que d’une chose : enfourcher le cheval blanc et lui susurrer à l’oreille « va où je vais le Magnifique, va, va, va » et se laisser conduire vers le jardin merveilleux de Cocteau, lui, ce grand « jardinier d’atmosphère ».
En ce moment, avec la mise en scène de Bob Wilson qui est là depuis sa création, l’opéra Einstein on the Beach de Phil Glass est produit au Théâtre du Châtelet, et affiche complet. C’est une reprise de la création de 1976, recrée à Montpellier en 2012, une véritable expérience sensorielle unique de plus de quatre heures, se caractérisant par des répétitions revendiquées, des images et des sons.
Michel Grialou
mardi 21 et mercredi 22 janvier 2014 à 20h30
Renseignements et réservations :
– Odyssud : 05 61 71 75 15
– Théâtre du Capitole : 05 61 63 13 13
– Théâtre Garonne : 05 62 48 54 77
– Collectif éOle : 05 61 71 81 72