Le reflet noir de James Bond
Si l’élégant James Bond sort tout droit de l’imaginaire d’un enfant de la riche bourgeoisie britannique (Ian Flemming), le transparent George Smiley, anti héros de ce film, est le fruit romanesque d’un enfant de la Guerre froide (John Le Carré) dont le père est un escroc. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les deux approches divergent sensiblement. D’autant que John Le Carré fut lui –même espion dans les années 50. Le dernier opus du réalisateur suédois est l’adaptation, assez fidèle d’ailleurs, du premier volet de la Trilogie de Karla, nom d’un espion soviétique, véritable bête noire de Smiley. Où il est question de contre-espionnage bien sûr et surtout de découvrir le communiste dans l’âme qui a infiltré le MI 6 britannique à son plus haut niveau. Avec les moyens d’alors, ce qui nous fait un peu sourire aujourd’hui. Mais l’essentiel du film est ailleurs, dans cette lutte sourde entre patrons des Services secrets, chacun soupçonnant l’autre d’être cette fameuse taupe qui passe les documents « confidentiel défense » à l’Est. Les regards sont violents, tout comme les règlements de compte. Bien que nous ne soyons pas ici vraiment dans un film d’action, l’angoisse suinte dans chaque situation car ce jeu du chat et de la souris est mortel. C’est un film sobre, comme sfumato, sans contours bien balisés, à l’image de la mission non officielle que reçoit Smiley (splendide Gary Oldman) de son gouvernement. Dans cette mission il n’aura que l’aide du jeune Peter, audacieux et courageux adjoint qui ne peut se permettre le moindre faux-pas. Il est ici interprété par un acteur britannique au charisme incroyable : Benedict Cumberbatch. Un nom à retenir car l’épisode qu’il anime est foudroyant de justesse. A leurs côtés, que du beau monde dans des rôles tout intériorisés : Mark Strong, John Hurt, Colin Firth. Entre autres. Excusez du peu !
Robert Pénavayre
Toutes les bandes annonces et Horaires de vos Cinémas sur Culture 31