Alors que la Halle de la Cartoucherie s’apprête à fermer ses portes le 26 octobre 2019 pour travaux, voilà près d’un an qu’une quarantaine d’artistes investissaient les murs de ce hangar de 15000m2 sur l’invitation de Cisart, Collectif incubateur de Street ARtistes.
Retour sur l’histoire d’une jeune association toulousaine qui vient d’obtenir la curation des prochaines expositions de la Halle en 2021, par Cosmopolis (Tiers lieu SAS), gérants de la Cartoucherie.
« Vous êtes une force d’attraction ! ». C’est en ces termes que certains artistes définissent aujourd’hui Cisart, Collectif Incubateur de Street ARtistes.
Faite de passion, d’expériences collectives en gestion de structures culturelles et d’une grosse charge de travail, Cisart est née en 2016 d’une histoire de copains partageant la même envie chevillée au corps de décloisonner le monde du street art, pour « permettre aux artistes de vivre de leur art et de ne pas rester dans la précarité », comme le soulignent les 4 co-fondateurs : Julien, Amandine, Hervé et Elsa.
L’histoire de Cisart est intimement liée à celle de La Halle de la Cartoucherie, où une quarantaine de street artistes avaient été invités bénévolement par le collectif en décembre 2018, pour s’exprimer sur la thématique de la Première guerre mondiale, dont la Halle avait été le témoin : En 1876, un atelier de chargement de cartouches est créé sur le Polygone, baptisé par les Toulousains “la Cartoucherie” jusqu’à la Première guerre mondiale où elle tourne à plein régime. Près de 15 000 femmes seront employées sur le site, la majorité des hommes étant mobilisés au Front. L’exposition Bullet Factory rend ainsi hommage aux femmes qui ont beaucoup donné à l’effort de guerre, comme aux victimes des Deux-guerres, en particulier Les Oubliés : les fameuses « gueules cassées », et les tirailleurs d’infanterie.
Affichant un taux record de 7000 visiteurs sur 21 jours d’ouverture, incluant des visites guidées auprès d’écoles primaires, d’associations de quartier, d’anciens combattants, Bullet factory est pour Cisart, « un acte fondateur ». Selon Hervé, issu de la culture Hip Hop des années 1990, « l’exposition résume tout le travail mis en place ces 20 dernières années ».
En déambulant le long des murs peints par BLAT, SIKE, SWED ONE ou KORAIL, c’est une redécouverte de l’art urbain qui se révèle, non seulement par le souci du moindre détail, la richesse des messages, parfois engagés, l’esthétisme des couleurs, mais aussi grâce à la collaboration talentueuse des artistes entre eux sur une même fresque comme SPAZM (+), GUTTER, KALI, TROM et TREMZE. Certains n’avaient jamais collaboré ensemble auparavant. Des hommes et quelques femmes aussi comme MIADANA, qui a gagné l’appel à Projet Saint-Gobain – Street Art AVenue Grand Paris grâce au travail d’accompagnement de Cisart.
En charge des partenariats et de l’accompagnement artistique, Hervé précise que le fondement d’une collaboration ne repose pas tant sur la notoriété d’un graffeur que sur des valeurs communes. « Ce ne sont pas « nos » artistes mais des personnalités, des talents avec qui on a envie de collaborer et que l’on accompagne dans la durée. Pour Julien, directeur de Cisart, « Bullet Factory prouve l’existence de nombreux street artistes locaux en recherche de murs à peindre et de lieux de création qui peuvent être source d’inspiration, comme les sites industriels, les gares ou d’autres lieux de convergences ».
Cisart prône un travail collectif de transmission des savoirs, en vue de créer du lien, des échanges collaboratifs, et de faciliter l’inclusion sociale et artistique dans les champs de la culture, de l’éducation, de l’emploi ou de la justice notamment.
Bullet Factory aura réuni un panel d’artistes éclectiques, capables de travailler ensemble sur une même thématique – ligne défendue par l’association – et de transmettre aux plus jeunes l’envie de se lancer et de s’exprimer avec une simple bombe aérosol et beaucoup de créativité.
Soutenue par les institutionnels mais aussi quelques belles entreprises mécènes, Cisart fourmille de projets pour « polliniser la culture », « produire et promouvoir des expériences esthétiques novatrices, cohérentes et porteuses de sens » au niveau international avec le développement de son Fonds de dotation et d’une résidence d’artistes en 2020.
L’intelligence collective a du bon.
CISART
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photo © Cisart