À travers le souvenir d’une passion amoureuse trop vite fauchée par la mort, Jean-Pierre Thorn remonte le fil de sa vie – et de son œuvre – pour retrouver les figures de rebelles qui ont peuplé ses films. Sous forme d’une lettre adressée à Joëlle, son amour disparu, le cinéaste revient sur les combats qui ont marqué sa vie : de l’espoir fou soulevé par Mai 68 à la contestation de la culture hip hop, en passant par les luttes ouvrières des années 70, jusqu’à la mobilisation des gilets jaunes…
Un film-documentaire-poème, un film-somme où l’émotion culmine lorsque s’épousent l’engagement amoureux et celui, plus politique, de Jean-Pierre Thorn. Au coeur du témoignage du réalisateur, le refus d’oublier, la nécessité de dire. Un film nostalgique où les récits enchâssés dévoilent tour à tour les moments forts des révoltes collectives et les fragiles réminiscences de Joëlle, nudité impudique, chevelure baudelairienne, rires cristallins.
On inspire et expire au rythme des mouvements de caméra de Jean-Pierre Thorn qui semble avoir mis son coeur en bandoulière et sa caméra à l’épaule. C’est intense. C’est troublant. Parfois gênant tant le combat peut nous toucher que l’on parle du récit collectif ou du récit privé racontés par le cinéaste.
On entend le vent dans la toile de tentes des gilets jaunes, on écoute en suspendant son souffle le halètement oppressant de la danseuse Nach dans la scène finale rendue plus sonore encore par le solo final de Serge Teyssot-Gay à la guitare.
Un film poétique et rassérénant. Un film marquant, témoignage d’une époque et d’un amour. Des histoires amères de rêves avortés …
« L’âcre parfum des immortelles » de Jean-Pierre Thorn
A l’American Cosmograph à partir du 23 octobre 2019