Dans le cadre de l’Européenne de Cirques, le théâtre Sorano a accueilli, deux soirs successifs, la Cie Oktobre. Leur deuxième spectacle, Midnight sun, est fascinant. Récit.
Le placement est libre. Les spectateurs forment des rangs, désordonnés, devant les deux entrées de la salle. Les discussions se chevauchent. De nombreuses jeunes personnes sont présentes, des circassiens amateurs, des travailleurs, des élèves accompagnés par leurs enseignants. La température s’élève dans le hall d’entrée.
Sur scène, de longs rideaux pendent et un lustre à silhouette de méduse est accroché au plafond. Deux hommes attendent, vêtus de costumes noirs. L’un des deux tourne le dos aux spectateurs qui s’installent, il joue du piano. L’autre est assis, de face, sur un canapé aux motifs végétaux. Le parterre se remplit complètement, les strapontins grincent et les élèves assaillent les places du balcon. La salle gargouille de discussions. Progressivement, la pénombre et le silence s’installent.
Un jeune homme, habillé d’un costume complet blanc, entre à toute allure et crie : « Pourquoi ? » La question est posée et forme le socle du spectacle. Pour y répondre : troubles obsessionels compulsifs, absurdité, excentricité, démence, mystère, méchanceté, élasticité des corps. Les huit artistes, circassiens, acrobates, danseurs, comédiens, musiciens se démènent, très énergiquement, à enfoncer des portes fermées à double-tour et à ne pas répondre à cette interrogation initiale.
Les scènes se succèdent, suivant un rythme soutenu, sans presque de temps morts. Certains sont époustouflantes. Une femme dompte un bicyclette, se tient debout sur la selle. Une autre soumet un homme, celui s’enfonçait dans le canapé, et lui marche des deux pieds sur la figure. Une autre, encore, jongle avec un vase du bout des orteils. Les corps sont désarticulés, à l’extrême.
Le spectacle est dense. Est-il une chasse à l’homme ? Un huis-clos avec des relents de Funny Games ? Un cabaret burlesque complètement grunge ? Une cérémonie d’exorcisme ? Du grand n’importe quoi ? Une réponse n’apparaît pas clairement. La surprise, la jouissance et l’abrutissement se bousculent dans la tête du spectateur qui sort de la salle. Une certitude demeure : les spectateurs éclatent de rire, sont traversés par de fortes tensions provoquées par des scènes haletantes. Ils se lèvent pour applaudir ces huit artistes. Le rideau tombe.
Midnight sun, Cie Oktobre, Théâtre Sorano.
Les photographies sont celles prises par la Cie Oktobre.
Valentin Chomienne
L’Européenne de Cirques
Balma • Toulouse • Tournefeuille