Tous les jeudis à 20h30 au café Saint-Sernin, une trentaine de participants se réunissent pour débattre autour d’une question philosophique. Les séances sont animées par des membres de l’Université populaire de philosophie de Toulouse. Créé en 1997 pour promouvoir la philosophie, le café philo “Victor Schoelcher”, un des plus anciens de France, rencontre chaque semaine un vif succès.
A l’heure où les clients commencent à déserter les terrasses des brasseries, au café Saint-Sernin, une salle se remplit de monde. Ils sont près d’une trentaine, toutes générations confondues, à se serrer sur la banquette rouge ou à déplacer une chaise pour faire de la place aux nouveaux arrivants. Assise au fond de la pièce, Marie a le sourire accroché aux lèvres. Comme d’autres habitués, elle est venue avec son carnet de notes, prête pour le débat. « Ce que j’aime au café philo c’est qu’il n’est pas élitiste, confie-t-elle. J’essaie de venir le plus souvent possible, car c’est en s’exprimant qu’on arrive à l’épanouissement. Et puis c’est toujours convivial ! ». Au menu ce jeudi, une réflexion inspirante, L’Homme restera-t-il toujours un loup pour l’Homme ?
« La question fait penser à un sujet du bac philo » reconnaît amusé Jean-François, l’animateur de la parole. Micro en main, c’est lui qui arbitre les interventions en précisant une règle d’or «Chacun peut intervenir dans le respect des principes de tolérance, d’écoute et de respect mutuel. Ceux qui n’ont pas encore pris la parole sont prioritaires. ».
Très vite les mains se lèvent. Le débat s’anime, passionné. Anne-Marie commence «Quand on ne le connaît pas, l’Homme est un loup pour l’Homme. Une fois que l’on a appris à connaître l’Autre, l’Homme cesse d’être un loup.», «L’Homme se nourrit de l’Homme, poursuit Youssouf. L’Histoire nous montre que l’Autre a toujours été un envahisseur. C’est seulement en allant vers autrui que l’on peut faire société ».
Attentive aux interventions, Marie ne tarde pas à prendre le micro et à relancer le débat, optimiste. «Je pense que seule la bienveillance envers l’autre peut répondre à la cruauté humaine. Lorsque j’étais patronne d’une entreprise d’hommes, au Maroc, j’étais dans mes petits souliers. C’est grâce à la culture de la bienveillance et à un esprit fédérateur que j’ai pu être acceptée parmi eux et gagner ma légitimité. Non par la force. »
Gaëlle se fait plus pessimiste «A mon travail, le moindre prétexte est bon pour dominer l’autre. Je pense que l’Homme sera toujours un loup pour l’Homme parce qu’il n’arrivera jamais à vaincre ses pulsions, sa jalousie, pour atteindre la sagesse ultime. Elle renchérit, suscitant les rires du public. Tous sont prêts à montrer leur ego en créant un conflit même à cause d’un fichier excel ! »
A 22h15, il est déjà temps de clore le débat. Le défi est alors pour « l’animateur philo » de synthétiser la séance et de tenter d’apporter une solution à défaut d’une réponse à la réflexion. «Faire des efforts, être fécond, créatif, tenter de comprendre l’autre pour combattre le Mal. » Une solution par la philosophie bien sûr. Moyen efficace pour aiguiser son esprit critique et cultiver sa libre pensée.
Claire Eckersley
Café philo « Victor Schoelcher »
Café Saint-Sernin, 2 rue Saint-Bernard