Un néant comme une injure
Pour son quatrième opus, Sofia Coppola nous engloutit dans le néant de la vie d’une demi-star hollywoodienne, Johnny Marco (Stephen Dorff, complètement transparent). Dans la séquence d’ouverture, l’héritière Coppola donne le ton en nous infligeant cinq bonnes minutes d’une voiture de sport (de luxe) qui tourne en rond dans une campagne improbable, comme son conducteur d’ailleurs pour ceux qui ne l’auraient pas compris. C’est le début d’une longue suite de vignettes vidéo d’un creux totalement abyssal au cours de laquelle nous suivons pas à pas la vie terriblement ennuyeuse de Johnny. Ce dernier s’est cassé le poignet un soir d’orgie arrosée et doit patienter avant de reprendre ses tournages. Pour essayer de donner un peu de corps à ce squelette branlant, voilà que Johnny, séparé de sa femme, se retrouve en garde de sa fille de 13 ans. Au lieu de rebondir, le film s’enlise dans une relation impossible entre une gamine pourrie jusqu’à la moelle et son paternel obligé de virer des nymphomanes envahissantes de la suite qu’il occupe avec sa fille, trouvant juste le prétexte d’aller manger un hamburger afin que le déménagement des icelles ne fasse pas trop désordre dans l’esprit de la petite. Pathétique ! Et tout cela bien sûr dans des palaces 5 étoiles et le mythique Château Marmont situé sur Sunset Boulevard, lieu de marivaudage privilégié du tout Hollywood. En gros, je m’ennuie, qu’est-ce que je pourrais bien faire ? Rien, mais cela me rend terriblement malheureux s’exclame le héros du film, conscient tout à coup qu’il a complètement raté sa vie.
Même si Sofia Coppola se défend d’avoir fait un film autobiographique, elle connaît parfaitement ce milieu, tout simplement pour en être un pur produit. Mais à une époque de fracture sociale dramatique, des deux côtés de l’Atlantique, se lamenter sur la gent hollywoodienne qui traîne son néant dans des lieux paradisiaques tient de l’injure.
Robert Pénavayre