Francette retrouve son grand-père. Après les sorcières c’est au tour des « sans envies ». Des « jamais contents ».
Francette ne baisse pas les bras
P- : Alors dis moi Francette comment tu vas. Pas trop dure tes dernières semaines ?
F- : Mais tu veux rire papy ? Maman m’a rouspété toute la semaine car on avait des évaluations. Mais elle n’a pas compris que moi c’était le vote pour la fête de fin d’année qui m’importait. Je te dis pas comme j’ai galéré en récré. Il sont complètement nases ces copains.
P- : Ah bon, dis moi ! ?
F- : Tu sais que moi je suis à fond pour la prof de chant…
P- : Enfin surtout que tu adores celle de cette année ce n’était pas toujours le cas…
F- : Tu vas pas dire que tu n’es pas d’accord avec moi. Tu te rappelles quand tu l’as entendue chanter à Noël? Tu veux que je te rappelle que je t’avais jamais vu pleurer comme ça, que tu m’as dit qu’elle chantait avec tout son cœur, comme un ange et que c’était rare ?
P- : Oui je charriait un peu nous l’adorons tous les deux la belle Wally.
F- : Mais je comprend pas ce qui s’est passé. On est tous ravis depuis qu’elle est là : La vielle Josette est enfin partie. Celle qui jamais n’était contente et nous criait dessus. Toujours avec le solfège et les dictées. Qui plus que tout adorait tenir sa baguette pensant nous avoir « sous sa main »
P- : Celle qui a pas voulu vous laisser chanter l’an dernier. Je t’avais bien dit que ce n’était pas de ta faute mais qu’elle était une plaintive née. Une femme qui veut commander et n’en a jamais assez.
F-: Enfin ils me l’ont ressorti cette histoire les copains alors que j’ai juste dit ce que tout le monde pensait…
P- : Oui mais tu sais qu’il ne fait pas dire tout ce que tu penses et surtout pas si tu as raison…
Elle vous faisait tellement peur que vous en arriviez à oublier les paroles. Mais regardes après un tel scandale Wally a proposé de vous faire chanter cette année et tu ne t’en plain pas. Belle comme elle est, gentille, toujours de bonne humeur et quand elle chante c’est tellement beau…
F- : Oui même si on nous répète qu’elle n’est pas prof de musique, qu’elle est juste chanteuse et qu’elle est trop belle, qu’elle n’est pas assez sévère avec nous, qu’elle s’aime trop. Mais nous aussi elle nous aime alors pourquoi les gens la critiquent comme ça tout le temps ? J’en ai vraiment marre de marre. Car même Paul, Justine, Ryan et Cassandra ne voteront pas pour elle jeudi. Et ils me l’ont dit. Tu te rends compte ! Et du coup on ne sait toujours pas si nous chanterons cette année la comédie musicale qu’elle a proposé.
P- : Écoutes mois lorsque quelqu’un n’est pas connu, que personne ne sait d’où il vient même si cette personne est très douée, très sympathique et en plus a une certaine beauté tu ne peux pas demander à chacun de l’aider.
F- : Alors ça va falloir me l’expliquer car je ne l’accepte pas!
P- : Regardes la situation. Depuis trois ans vous avez eu deux profs de chants abominables qui ont plus fait pour vous dégoûter du chant et de la musique qu’autre chose. La dernière c’était la pire je te l’accorde mais n’oublie pas que monsieur Dupont n’avait pas vraiment été mieux. Avec sa mine triste.
Alors disons : par chance Wally arrive. Personne ne la connaît, elle chante tellement bien qu’elle est votre prof cette année. Tu peux dire elle a sauvé l’école d’une belle catastrophe.
F- : Oui « l’Ecole des Tête Bien Faites » sans chorale …. alors que tous les après midi nous avons normalement sport ou art !
P- : Oui tu vois la directrice lui doit une fière chandelle. Mais voilà acceptes que tout le monde n’aime pas les bonnes surprises. Il y’a des gens qui aiment se plaindre et ne sont jamais contents quand quelque chose peut aller mieux. Et n’oublies pas qu’elle a en plus des idées nouvelles et de très bonnes idées nouvelles
F- : Ah oui la comédie musicale c’est vraiment bien. Et tu sais que le prof d’art plastique nous fait fabriquer des panneaux pour les décors. Alors si on ne fait pas ce spectacle quel gâchis ….
P- : Oui mais il n’y a jamais eu que des concerts dans cette école et les gens pensent que la comédie musicale c’est trop facile, pas assez chic.
– Donc je résume. La catastrophe est éloignée. Les enfants sont d’avantage contents. La chorale fait le plein. Une nouvelle forme de chant arrive et vous allez danser un peu. Wally chantera et fera venir du monde, le prof d’art plastique aussi. Les inscriptions pour l’an prochain vont augmenter.
F- : Mais oui alors pourquoi elle risque de pas avoir les voix pour qu’on fasse à son idée ? Tu me tortures là!
P- : Mais non, tu sais que ce que je veux c’est que tu comprennes. Pas que tu juges et condamnes. Écoutes moi, je vais t’expliquer pourquoi il y a deux camps et seulement deux. D’abord ceux qui aiment les projets et veulent essayer et n’ont pas peur de se lancer, qui à échouer. Ensuite tu as ceux qui ont peur et se plaignent que ça ne va pas et freinent toujours.
Tu te rappelles ce qui t’es arrivé en maternelle quand il y eu tous ces jeux que tu ne comprenais pas. Ces jeux de copine-pas copine? Je t’avais dit que ce n’était pas de ta faute que c’était pour essayer de te faire mal, par jalousie.
En fait je ne t’avais pas bien expliqué. Ces jeux de « copines-pas copines » . Et « Interdit de jouer avec » et « obligée de jouer avec ». Ça ne vient pas de la jalousie mais de l’envie. La jalousie c’est attendre un plaisir de quelque chose ou de quelqu’un que l’on n’a pas de suite. On espère l’avoir plus tard donc ça aide à tout faire pour l’avoir. Bien sûr certains bébés peuvent avoir envie de le prendre à certains enfants et de le voler. En grandissant ça leur passe, ou pas….
Mais l’envie c’est autre chose, ça serait un peu comme les sorcières mais en moins grave. Des petites cousines des sorcières. Le point de départ est plutôt : « Ce que l’autre a, a l’air bien et je ne l’ai pas. Il a l’air de se sentir bien avec ce quelque chose que je n’ai pas bien. Et je veux être bien comme lui, donc je veux ce qu’il a. Je vais lui prendre et si il veut pas je vais le lui casser c’est pas grave au mois il ne l’aura plus ». Donc tu vois ça commence tôt. Si tu sais que tu as des choses qui te font plaisir, que tu as des amis, des gens qui t’aiment, tes parents, ta famille, des amis, tu n’a pas peur, et ce que les autres ont ne t’enlève rien. Mais si tu n’es pas souvent contente que tu ne sent pas très fort l’amour et l’amitié tu regardes autours de toi et l’envie se développe. Normalement ça passe parce que tes parents te l’expliquent et te donnent ce qu’ils peuvent pour que tu te sentes bien. Et si parfois tu n’as pas ce que tu veux de suite tu sais que tu auras plus tard autre de chose de bien pour toi. Tu fais des projets pour que des choses bien t’arrivent.
F- : J’en revins pas que tu remontes à la maternelle pour m’expliquer cela… et même la crèche … !!!
P- : Si tu regardes toujours ce que les autres ont et que tu trouves que ce n’est pas juste parce que tu veux absolument ça et maintenant, tu ne peux que te plaindre ou tout casser. Tu vois c’est deux directions opposées. Dans une tu sais comment t’aider et tu t’aimes car tu te débrouille pour t’en sortir. Tu essayes de te faire plaisir. Dans l’autre c’est sans fin tu trouves toujours quelqu’un qui a plus que toi et tu en est triste par ce que tu ne l’as pas sans savoir si c’est vraiment cela qui te fais envie. Tu ne t’aimes pas car tu crois que les autres ont plus que toi. Et comme tu ne l’as pas, tu trouves que tu vaut moins, tu te trouves trop nulle, alors en compensation tu trouves injuste de ne pas avoir ce que l’autre a et que tu le mérites aussi. Tu ne cherches pas ce qui te feras plaisir et regardes juste ce que tu n’as pas. Tu perds l’habitude de chercher par toi même et avec les autres ce qui te feras du bien. Tu pers complètement confiance en toi. Tu ne t’aimes plus. Tu détestes les autres autant que tu te détestes sans t’en rendre compte.
À force tu prends l’habitude de te plaindre tout le temps et tu n’aides plus ceux qui veulent faire des projets et surtout pas ceux qui ont l’air d’être heureux. Car se plaindre tout le temps ne rend pas heureux. Alors que faire des projets rend heureux parfois mais pas toujours, et parfois tu peux aussi être déçue que ça ne marche pas mais tu sais qu’il est possible de faire d’autres projets.
Rechercher sans cesse ce que tu n’as pas c’est par contre fermé et sans fins. C’est une plainte constante et il n’y a jamais de bonheur. Et si faire mal aux autres devient ton bonheur tu vois ce que tu deviens?
F- : Une sorcière… Tu ne crois pas que tu exagères Papy ?
P- Hum, hum….
F- : Donc si mes camarades ne veulent pas du projet de Wally c’est parce qu’ils ne s’aiment pas ? Ne veulent pas essayer de se faire plaisir ? Ne veulent pas donner sa chance à ce projet ?
Le critique avant d’essayer ?
…. ça se pourrait bien en fait… je vais appeler Cassandra elle n’est pas vraiment comme ça : elle voulait je crois faire comme Paul. Car tu m’y a refait penser c’était Paul en grande section le champion du « ne pas jouer avec un tel », « ne pas parler avec une telle ». Il n’arrêtait jamais et changeait souvent. C’est bien que tu m’ai parlé de ces méchantes histoires de « copain/pas copains », j’ai jamais compris comment il y en a qui aimaient jouer à ça . Alors si ça continue encore… Ou que ça recommence … Oui je vais l’appeler Cassandra et Ryan aussi, on pourra encore faire changer le vote et obtenir des voix pour Wally.
P- : Mais oui va les appeler. Essaye quelque chose plutôt que te plaindre, même un peu…
F- : Je t’adore mon Papy des projets !
Hubert Stoecklin
Un immense MERCI à Jean-Benoit Meybeck pour ces merveilleux dessins et son temps précieux.