Compte rendu concert. 37 iéme édition de Piano aux Jacobins ; Toulouse ; Cloître des Jacobins. Le 14 septembre 2016 ; Johann Sebastian Bach; Johannes Brahms ; Robert Schumann ; David Fray, pian
David Fray est enfant du pays toulousain puisqu’il est originaire de Tarbes. Il est chez lui au festival car dès ses premiers concerts il a été invité par la clairvoyante Catherine d’Argoubet. Il revient régulièrement à Toulouse tout auréolé de ses succès internationaux et de l’excellent accueil fait à ses enregistrements, tous plébiscités par public et critique. Ce musicien est certes doué, mais surtout il a une personnalité attachante et une véritable originalité d’artiste dans un paysage musical mondial parfois trop policé.
Pour son récital il a joué de très larges extraits du livre 1 du clavier bien tempéré de Bach. Dans une position parfois très en arrière et en apparence détendue, voir relachée il a joué son Bach. En effet, sa manière est unique. D’abord un toucher d’une extraordinaire beauté, ferme mais souple. Beaucoup de nuances dans les reprises, un phrasé extraordinairement conduit jusqu’au fond des mélodies. Un détail de chaque note prise dans une coulée de beauté. Un attachement à une précision de chaque voix, une mise en valeur des harmonies subtiles le tout avec un naturel et un chic rares. Une sorte de piano olympien, dégagé des humains soucis. Tout du long de la promenade proposée nous sommes dans les cieux et non sur terre. Marche dans les nuages, vol au dessus des paysages montagneux, nuit étoilée ou soleil dans tout le nycthémère, et voyage dans les étoiles aussi. Une vraie et originale manière de rendre hommage au père Bach tout en s’appropriant la variété de ses partitions. Et n’oublions pas de signaler la belle énergie et même la joie dans les moments de superpositions de plusieurs voix en canon ou fugues.
Après ce voyage apaisant et vivifiant David Fray a osé nous proposer un dialogue de grande qualité entre Schumann et Brahms. Des œuvres assez rares et très belles ont ainsi pu se répondre. Le Schumann passionné et engagé de la Novellete n° 8 est allé jusqu’ à la colère. Le Brahms des variations sur un thème de Schumann a été kaléidoscopique. Variété de couleurs et de nuances poussées jusqu’au plus loin. Puis dans la Fantaisies op.116 une audace de sentiments exposés jusqu’au bord de la fusion entre le pianiste et son instrument. David Fray a une belle personnalité musicale depuis ses premiers concerts mais l’évolution qui est la sienne le conduit à oser une charge émotionnelle puissamment partagée. « L’émotion particulière » qu’il vit dans cette salle capitulaire, ainsi qu’il l’a dit avant ses bis, a bien gagné son jeu. Ce soir tout particulièrement, David Fray a été flamboyant. Le romantisme assumé, la puissance maitrisée, et la perfection pianistique ont enchanté le public. Quatre bis ont été offerts entre plusieurs Chopin, le Bach (dédié à Catherine d’Argoubet), a été le moment le plus magique.
Un grand artiste qui tient admirablement les promesses de ses premières années.
Hubert Stoecklin
Article publié sur Classiquenews.com
Compte rendu concert. 37 iéme édition de Piano aux Jacobins ; Toulouse ; Cloître des Jacobins. Le 14 septembre 2016 ; Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Le clavier bien tempéré livre 1, extraits ; Johannes Brahms (1833-1897) : Variations en fa dièse mineur, sur un thème de Schumann, op.9 ; Fantaisies, op.116 ; Robert Schumann (1810-1856) : Novelette n° 8 en fa dièse mineur, op.21 ; David Fray, piano.