Voici les coups de cœur d’Annie et Jérémy, les nouveaux co-gérants de l’American Cosmograph (ex-Utopia Toulouse) pour leur fanzine n°2, même s’ils aiment évidemment tous les films qu’ils programment. Le fanzine est disponible au cinéma et partout en ville. Bonnes séances !
Jérémy : Notre premier coup de cœur, qui fait la couverture de notre deuxième fanzine est un film brésilien qui s’appelle D’une famille à l’autre. C’est le second film d’Anna Muylaert qui arrive en France après Une Seconde Mère, que nous avions programmé sous l’enseigne Utopia et qui est disponible en Vidéo en poche pour 5 euros à l’American Cosmograph. On n’a pas envie d’en dire beaucoup même si le pot aux roses est dévoilé un peu partout… C’est l’histoire d’un ado, qui est en recherche de plein de choses comme son identité sexuelle. Il va petit à petit se rendre compte qu’on le prend en photo dans la rue, qu’il se trame quelque chose avec sa mère, qui va finir par être arrêtée. C’est un film qui parle de la famille – mais pas que ! -, qui a un vrai argument dramatique qui est bien mené qu’on ne vous dévoile pas – mais pas que ! – : il y a un sens aux détails, à la vie autour, avec un côté tranche de vie – tu arrives à un moment, tu repars à un moment – tu as l’impression d’avoir vécu avec ces gens-là, d’avoir compris qui ils étaient, ce qu’ils ressentaient. C’est assez fort d’avoir réussi à faire ça, avec une apparente simplicité. C’est vraiment un film très délicat, très maîtrisé et vraiment très beau.
A lire : l’avis de moi, Carine donc, sur D’une famille à l’autre.
D’une famille à l’autre (Mãe só há uma) d’Anna Muylaert, à partir du 20 juillet 2016 à l’American Cosmograph. Avec Naomi Nero, Daniel Botelho, Daniela Nefussi.
Annie : S’il y a un genre de la comédie québécoise, Guibord s’en va-t-en guerre est en plein dedans ! C’est drôle, réjouissant, assez léger sur un sujet qui lui ne l’est pas : l’exercice du pouvoir politique. En tant qu’indépendant au Parlement, la voix du député Guibord va faire basculer le vote pour l’envoi ou non de troupes canadiennes au Moyen Orient. Il y a les ressorts de la comédie classique avec quelqu’un qui est embarqué dans une affaire pour laquelle il n’était pas préparé, avec aussi les à-côtés. Le conflit local avec le blocage des routes est aussi très drôle. Guibord a un jeune stagiaire haïtien Souverain, qui prend très à cœur de l’aider. La manière dont Souverain fait des comptes-rendus réguliers à ses proches à Haïti et le regard des Haïtiens sur la politique québécoise participent au comique de ce film assez malin. Le film sera sous-titré en français, ce qui est nécessaire selon nous pour filer un petit coup de main par écrit pour certains dialogues, sans perdre le charme de la langue.
Guibord s’en va-t-en guerre de Philippe Falardeau, à partir du 27 juillet 2016 à l’American Cosmograph. Avec Patrick Huard, Irdens Exantus, Clémence Dufresne-Deslières.
Annie : On a envie de défendre Sparrows, un petit film islandais. C’est un ado qui se trouve abandonné par sa mère et qui se retrouve obligé d’aller vivre chez son père, tout au Nord de l’Islande, dans un petit village. Au milieu d’immensités magnifiques, on ne sort jamais dans ce village où tout le monde se connaît. Ça crée une ambiance très particulière. Cet ado plutôt réservé va devoir se construire dans cet univers-là, plutôt bourru, qui n’est clairement pas le sien, avec un père qu’il ne connaît pas, qui ne l’a jamais élevé. L’acclimatation est rude, mais le film est plastiquement hyper beau – l’affiche ne rend pas compte du tout de l’esthétisme du film – et d’une grande délicatesse, comme le jeu de l’acteur, dans cette façon d’encaisser beaucoup de choses. Le final est étonnant. Il n’y a pas que le foot en Islande : après L’histoire du géant timide, Sparrows est un film qu’on aime beaucoup !
A lire : l’avis de moi, Carine donc, sur Sparrows.
Sparrows de Rúnar Rúnarsson, à partir du 13 juillet 2016 à l’American Cosmograph. Avec Atli Oskar Fjalarsson, Ingvar Eggert Sigurðsson, Nanna Kristín Magnúsdóttir.
Jérémy : Et si on reste dans le Nord, avec des gens pas très âgés, on aime beaucoup Une nouvelle année, un film russe. C’est très difficile d’en parler, mais on ne peut qu’encourager les gens à aller le voir. On a beau connaître le cinéma russe, on n’a jamais vu un film comme ça, dans le quotidien d’un couple de jeunes qui vivent ensemble à Moscou, plutôt de classe moyenne qui ont du mal à boucler les fins de mois. Ils commencent dans la vie active. Lui est taxi clandestin. J’ai eu l’impression de n’avoir jamais vu Moscou de cette façon-là, au jour le jour, la nuit. Elle vient de trouver un boulot comme graphiste, dans un journal. Elle découvre ce nouveau monde, qui lui plaît beaucoup, et commence à sortir régulièrement avec ses nouveaux collègues. Elle est pétillante alors que lui est plus réservé. Il sent que le nouveau monde de sa compagne n’est pas le sien. Le film s’appelle Une nouvelle année : on prend le temps de voir comment avec cette situation nouvelle, ce couple qui a tout pour être heureux, à part l’argent qui manque, va être confronté à cette situation très banale qui est un chamboulement pour eux. C’est d’une grande justesse dans l’intimité de ce couple, les deux jeunes sont supers, c’est vraiment très beau.
Une nouvelle année d’Oksana Bychkova à partir du 20 juillet 2016 à l’American Cosmograph. Avec Nadya Lumpova, Aleksey Filimonov, Natalya Tereshkova.
Annie : Carmina ! est un film espagnol, avec un personnage particulier : elle a une espèce d’étrangeté dans son physique qui occupe tout l’écran, avec son maquillage, sa voix roque. Son mari meurt un vendredi soir. Il devait toucher une prime le lundi. Elle cache sa mort tout le week-end pour pouvoir toucher cette prime. C’est l’histoire de ce week-end-là, avec le mort dans le salon, où on a du mal à cerner Carmina. Il y a beaucoup de moments qui sont drôles tellement c’est absurde, et elle gère aussi les problèmes de ses gamins, les intrusions des voisins…
Jérémy : Dans les reprises, on reprend donc Dans les forêts de Sibérie à partir du 20 juillet, qui n’est pas sorti chez nous, et qu’on nous demande beaucoup. On reste dans la neige avec Fargo des frères Coen. On reprend aussi The Serpent and the Rainbow de Wes Craven et The Witch. Pour ce dernier, cela nous semble réducteur de dire que c’est un film fantastique, c’est plus que ça. Le film n’est pas sorti à Toulouse, uniquement en banlieue en version française, ce qui est absolument honteux vu le travail sur la langue. C’est une famille de puritains qui se trouve déstabilisée par des événements surnaturels. C’est un vrai film d’ambiance mais qui ne bascule pas forcément dans l’horreur. La tension est tenue tout le long du film, sans que ça tombe dans le démonstratif, ni dans les effets pour faire sursauter, pas écœurant comme peuvent l’être certains films d’horreur.
A lire : l’avis de Robert, sur Dans les forêts de Sibérie.
A lire : l’avis de moi, Carine donc, sur The Witch.
The Witch de Robert Eggers à partir du 20 juillet 2016 en VOSTF à l’American Cosmograph. Avec Anya Taylor Joy, Ralph Ineson, Kate Dickie.