Saison 2015/2016 du Théâtre du Pavé
Comme il est de coutume au moment de la rentrée, l’équipe du Théâtre du Pavé avait donné rendez-vous au public ce vendredi 11 septembre pour présenter sa nouvelle saison. Avec une programmation 2015/2016 fidèle à ce qui fait l’identité du lieu et à la conviction que les grands textes et les grands auteurs sont plus que jamais nécessaires pour éclairer les consciences dans les temps incertains qui sont les nôtres. Selon une formule bien établie depuis quelques années, les comédiens et metteurs en scène se sont succédé au micro pour sacrifier au périlleux exercice consistant à présenter soi-même son spectacle.
Théâtre bien sûr, mais aussi poésie, chanson et musique… suivez le guide.
On commémorera le 400ème anniversaire de sa mort en 2016, Shakespeare ouvrira la saison du 29 septembre au 3 octobre avec un Roméo et Juliette créé par la jeune et audacieuse compagnie C’était Demain. Dix comédiens sur scène pour cette histoire d’amour et de haines, tragique et intemporelle, que l’on n’avait pas vue à Toulouse depuis longtemps.
De la tragédie shakespearienne à l’absurde beckettien… L’intéressé se faisant toujours désirer, on attendra de nouveau Godot au Pavé. Créée il y a deux saisons et reprise la saison dernière, la version de la mythique pièce de Samuel Beckett mise en scène par Francis Azéma et joliment interprétée par Juan Alvarez, Robin Azéma, Alain Dumas, Denis Rey et Francis Azéma lui-même sera reprise du 13 au 17 octobre dans le décor imaginé par Otto Ziegler. Un classique à revoir avec plaisir.
Elle s’appelait Louise de Coligny-Châtillon et fut une des premières aviatrices françaises mais elle est passée à la postérité comme l’inspiratrice des Poèmes à Lou de Guillaume Apollinaire dont elle fut l’amante et la muse. La compagnie A pied d’œuvre s’est emparé des textes du poète amoureux fou pour en faire un spectacle musical intitulé Jolie bizarre enfant chérie qui sera donné du 3 au 7 novembre dans le cadre « Des théâtres près de chez vous ».
Les Temps difficiles, ça pourrait être un bon titre pour une pièce contemporaine… sauf que c’est déjà celui d’une comédie écrite par Edouard Bourdet en 1934. Ami de Paul Claudel et Jean Giraudoux, « concurrent » d’Henri Bernstein (avec qui il se battra en duel), Bourdet est un auteur en vogue lorsqu’il publie cette pièce dont l’action commence au lendemain de la crise de 1929. L’argent et son pouvoir dévastateur sur la vie des riches et des pauvres, sa capacité inégalée à corrompre les uns et les autres… Les Temps difficiles sera donnée du 10 au 14 novembre dans une mise en scène d’Eric Vanelle, également dans le cadre « Des théâtres près de chez vous ».
Hasard des dates, c’est aussi en 1934 que Federico Garcia Lorca écrit et crée sa pièce Yerma. L’histoire d’une paysanne qui désespère de tomber enceinte pour donner un sens à sa vie ennuyeuse (« yerma » signifie « stérile » pour une terre en espagnol). La compagnie Les Anachroniques a adapté l’œuvre du grand écrivain espagnol pour en faire une « tragédie bas-rock » où cinq comédiennes tracent un portrait éclaté de cette femme qui s’effondre. Jouée en espagnol, surtitrée en français, et doublée en langue des signes, Yerma(s) sera donnée du 17 au 21 novembre dans une mise en scène de Matthieu Pouget et Hegoa Garay.
Marguerite Duras et la comédienne Sylvie Maury seront bien au programme de cette saison. Elles le seront cependant séparément cette fois-ci. C’est dans un spectacle mis en scène par Laurent Pérez et consacré à la chanteuse Barbara que l’on reverra avec plaisir l’inoubliable interprète de La Douleur aux côtés d’Agnès Claverie et du pianiste Philippe Gelda, du 26 novembre au 5 décembre. Pas un biopic mais un projet longuement mûri, une « expérience de Barbara » pour retrouver l’émotion si particulière que ses chansons produisent sur nous.
Du 12 au 16 janvier sera donnée la création annuelle de la compagnie Les Vagabonds. Si la mise en scène sera de Francis Azéma (selon son concept « Noir-Lumière »), le texte de Joueurs de farces a aussi été écrit par ses soins. Une première expérience d’écriture dans le registre inattendu du théâtre de la farce qu’il voit comme celui de la « rupture », de la liberté totale, en marge et en opposition à l’art officiel de son époque. Pour porter sur scène son texte et celui de « Frère Guillebert », farce d’un auteur anonyme du XVIème siècle, Francis Azéma s’est entouré de ses excellents et habituels complices Corinne Mariotto et Denis Rey.
On le sait peu mais Vincent Roca, bien avant d’accéder à la gloire radiophonique et médiatique, a fait ses débuts à Toulouse. Il est resté fidèle à la ville rose et on le revoit presque chaque année dans l’une ou l’autre des salles toulousaines. Entre autres le Pavé où il présentera avec son camarade Jacques Dau, du 26 au 30 janvier, Qu’est-ce qu’on fait pour Noël ?. On peut s’attendre à un festival de jeu de mots, de calambours et de traits d’esprit sur les thèmes très propices de la nuit de la Nativité et du réveillon de Noël en famille.
Dans un autre genre, plus grave même si la drôlerie n’en est pas absente, le Pavé a eu la bonne idée de programmer du 2 au 6 février Zoom, un texte de l’auteur contemporain Gilles Granouillet mise en scène par Alain Daffos et interprété avec beaucoup de justesse par Muriel Benazeraf. Une réunion de parents d’élèves, une salle de classe, et le monologue d’une fille-mère en détresse qui raconte ses échecs et ses rêves de réussite pour un fils à qui elle imagine une carrière dans le show-biz et le cinéma…
Le spectacle conçu et mis en scène par Jean-Pierre Armand avait été créé en 2010 à la Cave Poésie. Camille Claudel l’interdite ! sera donné de nouveau à Toulouse du 9 au 13 février. Un bel hommage à l’artiste et à la femme Camille Claudel, dont la folie et le destin tragique occultent non seulement l’œuvre mais aussi certains aspects de la personnalité. A travers sa correspondance et sa relation complexe avec son frère Paul, un portrait subtil et nuancé qu’il ne faut surtout pas « s’interdire » de revoir.
Marguerite Duras, dont le nom et l’œuvre sont très liés au Théâtre du Pavé depuis que Francis Azéma le dirige, est morte le 3 mars 1996. A l’occasion du 20ème anniversaire de sa mort, Corinne Mariotto et Francis Azéma redonneront sa pièce La Musica deuxième, du 4 au 17 mars, dix ans après l’avoir créée au même endroit. L’histoire d’un couple depuis longtemps séparé que le hasard fait se retrouver dans la même chambre d’hôtel la veille du jour où ils doivent divorcer. Une nuit blanche à discuter, à se souvenir, pour le meilleur et pour le pire.
Il y aura aussi du Tchekhov au Pavé ! Le grand dramaturge russe est partout cette saison à Toulouse et on ne s’en plaindra pas tellement son théâtre reste un sommet du genre. Le Collectif FAR a choisi de monter une version épurée d’Oncle Vania sous le titre Vania. Cinq comédiens excellents (Cécile Carles, Sylvie Maury, Laurent Pérez, Denis Rey et Olivier Jeannelle) pour resserrer l’action sur cinq personnages de la pièce dans un huis-clos lourd et tendu. Des êtres en perte de repères, un monde qui pourrait bien ressembler au nôtre et une création à découvrir du 7 au 16 avril.
On retrouvera Cécile Carles et Olivier Jeannelle du 10 au 14 mai dans Haute-Autriche de Franz Xaver Kroetz. Créée la saison dernière au Grand Rond, cette comédie sombre met en scène un jeune couple à la vie tranquille et bien réglée jusqu’à ce que l’arrivée prochaine d’un enfant vienne troubler leur relation. Pièce sur la difficulté à dire et à communiquer dans une société qui fait tout pour maintenir les êtres dans l’incapacité à énoncer et donc à concevoir clairement leurs pensées. Une violence insidieuse source de frustration, de colère et d’affrontements… toujours très actuelle.
Un mot pour finir sur la troupe amateur du Pavé qui donnera comme elle en a l’habitude deux comédies dans son théâtre. Tout d’abord Hay Fever (Rhume des foins) du Britannique Noël Coward au moment des fêtes de fin d’année, du 18 au 31 décembre. Ils reviendront ensuite pour clore la saison en reprenant leur version de Knock de Jules Romains du 19 au 28 mai. De bons moments à partager avec une équipe de bénévoles qui, outre sa passion pour le théâtre, fait aussi du Pavé un lieu où l’on a toujours plaisir à s’attarder après les spectacles.
Fidèles, oui…
34, rue Maran – 31400 Toulouse
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