« L’Île de Giovanni », film d’animation de Mizuho Nishikubo
Si vous ne connaissez pas ce réalisateur, pas de complexe, car son troisième long aujourd’hui sur les écrans est en fait le premier qui soit distribué en France. Cela ne veut pas du tout dire que l’on ait affaire à un débutant. Loin s’en faut ! En effet, Mizuho Nishikubo est même une icône de l’animation au Pays du Soleil Levant. Il nous propose ici un sujet aussi historique que douloureux, celui de l’occupation d’une île de l’archipel japonais par les troupes russes à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’île de Shikotan, à l’extrême nord du Japon. A vrai dire, ce film n’est pas du tout à destination des enfants, certaines scènes sont violentes et, globalement, le thème de la déportation de tout un peuple vers des contrées lointaines et hostiles relève plus du répertoire pour grands ados et plus. Ce calvaire nous est montré au travers du regard de deux petits habitants de l’île.
Si les adultes ont les réactions habituelles face à une occupation militaire, il en est tout autrement des enfants. Bientôt, entre Tanya, fille d’un commandant russe et Jumpei, l’un des deux gamins, une complicité étroite va se nouer. Elle se transformera en un sentiment plus profond. Hélas, les lois impitoyables de la guerre vont les séparer.
Si le dessin n’a pas la souplesse de celui d’un Miyazaki, le jeu des lumières et des couleurs est stupéfiant de créativité et d’acuité. Mais ce qui le classe dans les œuvres majeures du genre est certainement l’incroyable, pour ne pas dire l’indicible émotion qui se dégage non seulement du scénario, mais aussi du montage et du dessin et qui vous amènera à coup sûr les larmes au bord des paupières. Inutile de résister… A noter, à titre historique, que cette île appartient toujours à la Russie, malgré les efforts permanents du Japon pour faire modifier les accords de Yalta de…1945 !
Robert Pénavayre