« Libre et assoupi », un film de Benjamin Guedj
Un premier long, c’est toujours un évènement et une porte ouverte sur les ambitions d’un réalisateur. Celui-ci n’échappe pas à la règle. La proposition est celle d’une comédie dans l’air du temps. Une histoire de colocation entre trois personnages à peu près du même jeune âge mais nourris de projets différents. Anna (Charlotte le Bon) veut se transformer en femme d’affaire et s’en donne donc les moyens. Bruno (Félix, le fils de Serge Moati) n’a pas beaucoup étudié mais veut son indépendance et accepte n’importe quoi comme job, les foirant systématiquement, pour faire bouillir la marmite. Sébastien (Baptiste Lecaplain), fils de bonne et fortunée famille, bardé de diplômes, n’a qu’une envie : ne rien faire, rester allongé et contempler le plafond.
Inutile de préciser combien ce genre de situation est à même d’entraîner des réflexions qui, pour être dites sur le ton de la comédie, n’en comportent pas moins un certain nombre de vérités dont la moindre n’est pas qu’à un moment il faut grandir. Squatter son canapé ne pouvant être une fin en soi, Sébastien se décide au moins à demander le RSA, quitte à bidouiller des réponses négatives à ses demandes d’emploi. Cette démarche va lui donner l’occasion de croiser Richard (formidable Denis Podalydès) et nous offrir l’une des scènes majeures d’un film qui n’en regorge pas vraiment… Confondant la scène et l’écran, Baptiste Lecaplain, humoriste ayant quelques succès, n’arrive pas à donner corps à son personnage lunaire de doux rêveur. Il est totalement phagocyté par Félix Moati chez lequel on sent immédiatement un vrai talent de comédien dans le geste, le regard, le ton. C’est flagrant et indiscutable. C’est lui qu’il sera intéressant de suivre, ainsi bien sûr que Benjamin Guedj pour voir comment il transforme un essai qui ne convainc pas tout à fait.
Robert Pénavayre