« Tom à la ferme », un film de Xavier Dolan
25 ans ! C’est l’âge du wonder boy québécois, réalisateur ici de son quatrième long. Il signe ainsi son entrée définitive dans la cour des grands du cinéma d’auteur, tout en s’essayant à un genre particulier, celui du thriller. Tom (Xavier Dolan himself et étonnant) est un publicitaire branché de Montréal. Il rejoint le fin fond d’une campagne paumée afin de rendre hommage à son ami Guillaume qui vient de mourir. Il est accueilli, si l’on peut dire, par la mère du défunt, Agathe (Lise Roy), une veuve anéantie, et le fils aîné de celle-ci, Francis (superbe Pierre-Yves Cardinal). Démarre alors un jeu du chat et de la souris aussi pervers que dangereux et fascinant. A l’évidence, Agathe ignore que Tom était l’amant de Guillaume. Ce qui n’est pas le cas de Francis. Dans une scène qui installe le suspense, Francis menace carrément Tom s’il dévoile ses véritables relations avec Guillaume.
Un quatrième personnage fait son apparition, c’est Sara (Evelyne Brochu), la « blonde » comme disent nos amis québécois, c’est-à-dire la petite amie de Guillaume. En fait un leurre qu’entretenait Guillaume auprès de sa famille. Très vite, Sara comprend qu’elle a mis les pieds dans une famille de détraqués. Mais elle joue le jeu sous l’œil inquisiteur de Francis. Sara ne comprend pas pourquoi Tom reste dans cet endroit malsain. Tout l’intérêt du film est là. Dans la relation qui petit à petit se noue entre Francis et Tom. Avec sa gueule d’ange, Tom ne trompe-t-il pas son monde ? Et nous avec. Avec sa barbe bien virile, Francis ne cache-t-il pas des sentiments profondément enfouis ? Eros et Thanatos commencent alors leur danse funèbre. Et l’on ne peut qu’être happé, ébloui, sidéré par la maîtrise de ce jeune réalisateur à nous faire entrer dans cette atmosphère hitchcockienne aussi périlleuse que vénéneuse. Ajoutons que la BO signée Gabriel Yared est superlative. Evidemment !
Robert Pénavayre