Proclamant que «l’opéra est bel et bien, aussi, du théâtre», la nouvelle saison lyrique du Théâtre du Capitole affiche trois nouvelles productions toulousaines ainsi que trois reprises, et accueille trois productions venues d’ailleurs.
Frédéric Chambert vient de dévoiler sa programmation pour le Théâtre du Capitole dont il assure la direction artistique pour la sixième saison. Après une saison en cours exclusivement constituée de nouvelles productions (« Manon », « La Favorite », « Cavalleria rusticana », « Paillasse », « les Deux Foscari », « Orlando », « Hänsel et Gretel », « Daphné », « Les Pigeons d’argile »), l’opéra toulousain puisera de nouveau dans son répertoire puisque trois reprises sont annoncées. Trois nouvelles productions ou coproductions toulousaines, et trois productions venues de l’extérieur sont également attendues.
Pour Frédéric Chambert, «élaborer une saison d’opéra, c’est tenter un impossible panorama entre les différentes époques, les différents styles, les pays et les cultures. Ce n’est pas que les chefs-d’oeuvre manquent, mais nous sommes au service du public, c’est-à-dire de tous les publics. Cette nécessaire diversité des genres musicaux ne se conçoit pas selon moi sans cette autre diversité, tout aussi nécessaire : celle des propositions esthétiques des metteurs en scène. Une saison, donc, conçue comme une traversée des âges et des styles musicaux, mais aussi comme des regards croisés sur les œuvres, regards aussi divers que peuvent l’être les approches de la question du théâtre et de la dramaturgie. Loin de l’idée de transformer notre scène en vitrine ou d’établir un inventaire, il s’agit ici d’affirmer chaque saison plus fort la part théâtrale de l’opéra, art multiple et hybride. Car l’opéra est bel et bien, aussi, du théâtre».
Le romantisme d’ »Un bal masqué » de Giuseppe Verdi ouvrira les festivités dès le mois de septembre. La mise en scène de cette nouvelle production a été confiée à Vincent Boussard, «sa récente mise en scène de « la Favorite » laisse présager une lecture noble et racée de ce drame de la passion», assure Frédéric Chambert. Comme pour « la Favorite », Christian Lacroix réalisera les costumes. Grand chef verdien, Daniel Oren est à cette occasion de nouveau invité à diriger l’Orchestre du Capitole après un somptueux « Trouvère » en 2012. Autre nouvelle production du Capitole, « le Tour d’écrou » sera associé à « Owen Wingrave », autre opéra de Benjamin Britten à découvrir dans une production de l’Opéra de Francfort. C’est le chef anglais David Syrus qui dirigera ces deux ouvrages tirés de nouvelles d’Henry James et mis en scène par Walter Sutcliffe, avec une distribution anglophone.
L’orientalisme de Giacomo Puccini clôturera la saison avec une nouvelle production déjà très attendue : «C’est une figure habituée des relectures décapantes, parfois dérangeantes, osons le dire, qui nous donnera à voir sa vision de « Turandot ». Calixto Bieito est en effet connu pour ses prises de positions assez radicales par rapport à certaines idées préconçues de la tradition scénographique», prévient Frédéric Chambert. Le jeune chef suédois Stefan Solyom fera pour l’occasion ses débuts au Capitole. La soprano portugaise Elisabete Matos interprétera le rôle-titre juste après l’avoir chanté au Deutsche Oper de Berlin, et le ténor coréen Alfred Kim chantera le rôle de Calaf – après sa belle performance à Toulouse dans « le Trouvère ».
Après avoir dirigé « les Indes galantes » au Capitole, Christophe Rousset sera de nouveau à la tête de son ensemble Les Talens Lyriques pour « Castor et Pollux » (photo), autre opéra de Jean-Philippe Rameau. Assurant ces jours-ci la mise en scène de la création mondiale des « Pigeons d’argile » de Philippe Hurel, Mariame Clément signe cette production créée cette année à Vienne. «Pas d’antiquité de pacotille, pas de toges ni d’allusions au siècle de Rameau, mais comme souvent avec elle, une vision où l’histoire particulière narrée par le librettiste et le compositeur trouvent des échos universels et intemporels. Au sens strict, une lecture abstraite, mais avec toute l’humanité que Mariame Clément met dans sa direction d’acteurs, cette abstraction n’aura rien de froid ni de distancié, bien au contraire», promet le directeur de l’opéra toulousain. L’interprétation de la destinée tragique des deux frères sera assurée par le ténor Antonio Figueroa – déjà entendu ici dans « la Belle Hélène » – et le baryton Aimery Lefèvre souvent distribué au Capitole (« les Indes galantes », « les Pigeons d’argile », « la Belle Hélène », « Un Bal masqué »). Ce sera également l’occasion de retrouver les sopranos Hélène Guilmette (« les Indes galantes ») et Gaëlle Arquez (« la Belle Hélène »).
Autre production accueillie à Toulouse, « Massacre » est un opéra de l’Autrichien Wolfgang Mitterer composé en 2003, d’après la pièce « Massacre à Paris » de Christopher Marlowe. «C’est Ludovic Lagarde qui en assure la lecture scénique, avec ce nécessaire pont entre le massacre de la Saint-Barthélemy sous le règne de Charles IX et les implications actuelles de ces exactions que les sociétés humaines commettent au nom de la religion – mais bien au-delà de la religion, c’est l’absolu de toute certitude qui est ici mise en question», explique Frédéric Chambert. Le chef allemand Peter Rundel dirigera cette œuvre où les citations de Bach se mêlent à la musique électronique. Elizabeth Calleo interprètera le rôle de la Duchesse de Guise et Lionel Peintre celui du Duc de Guise.
Production du Théâtre du Capitole créée en 2007, « Tristan et Isolde » de Richard Wagner sera de nouveau à l’affiche dans «la mise en scène si poétique réalisée par Nicolas Joel. Ceux qui ont eu la chance de voir cette production ici même se souviennent sans doute de la force de cette épure, où chaque personnage se meut dans un univers à l’image de sa psyché. Un grand moment de rêve», annonce celui qui a succédé à Nicolas Joel à la direction du Capitole. La distribution réunira le grand ténor américain Robert Dean Smith et Elisabete Matos, sous la direction de Claus Peter Flor – chef allemand fréquemment invité dans la fosse du Capitole (« Hänsel et Gretel », « Madame Butterfly », « La flûte enchantée »).
Tugan Sokhiev dirigera de nouveau « les Fiançailles au couvent » de Sergueï Prokoviev, dans la production de Martin Duncan créée en 2011 au Capitole et présentée dans la foulée à l’Opéra Comique, à Paris. Pour les fêtes de fin d’année, on attend le retour de « Doña Francisquita » d’Amadaeo Vives, chef-d’oeuvre de la zarzuela que le metteur en scène «Emilio Sagi n’a pas craint de replacer dans un cadre typiquement espagnol, plein de joie, de verve et d’effervescence», confie Frédéric Chambert à propos de ce spectacle créé en 2007. Le chef espagnol Josep Caballé Domenech dirigera la soprano Elisandra Melián dans le rôle-titre, entourée d’une troupe de jeunes chanteurs hispaniques.
Dans la programmation des concerts, les Midis du Capitole affichent quatre récitals. Le Chœur du Capitole se produira à deux reprises sous la direction de son chef Alfonso Caiani : le concert de Noël offrira des extraits du « Messie » de Haendel et des chants traditionnels d’Europe et d’ailleurs, avec la Maîtrise du Capitole créée en 2013 ; un programme italien permettra d’entendre les grands chœurs d’opéras de Donizetti, Bellini, Verdi et la « Messa di Gloria » du jeune Puccini.
Jérôme Gac
Abonnements :
– par correspondance, jusqu’au 15 juin, à
Théâtre du Capitole, Service location, BP 41408, 31014 Toulouse Cedex 6;
– en ligne, jusqu’à la date du premier spectacle de chaque abonnement.
« Castor et Pollux » © Monika Rittershaus