Le Roi Soleil, un film de Vincent Maël Cardona
Le Roi Soleil en question n’est pas Louis XIV, ce monarque prestigieux qui régna sur la France de 1643 à 1715, mais plus simplement le nom d’un bar-pmu sis à… Versailles. Il va être le témoin d’un chassé-croisé meurtrier autour d’un ticket de loto valant la bagatelle de 240 millions d’euros. Un endroit qui va voir la vérité se travestir, au gré des coups de feu, en un exercice de style jubilatoire.

Pio Marmaï (Livio), Nemo Schiffman (l’individu au comptoir) et Sofiane Zermani (Reda) – Crédit : Emmanuelle Jacobson-Roques
Deux séquences liminaires vont vous clouer sur votre fauteuil. Tout d’abord vous allez vous demander si vous ne vous êtes pas trompé de salle car les premières images nous transportent, en carrosse, jusqu’à Versailles. En descend rien moins que Casanova. Il va proposer au Roi, en manque d’argent, de mettre en place une Loterie royale. Le fait est historique, sous le règne de Louis XV. Sans ménagement aucun, le réalisateur nous fait faire un saut temporel de 250 ans. Nous sommes toujours dans le château où se déroule alors une soirée huppée. Parmi les invités, Erwan, un bad boy de la finance, et son jeune stagiaire. Tous les deux franchissent quelques limites et se retrouvent dans la chambre du Roi, un lieu sacré qu’Erwan va « marquer de son empreinte ». Découvert, il ne lui reste plus qu’à s’enfuir… en caleçon !
Il est tard. Le soleil s’est couché depuis longtemps déjà et seuls quelques habitués hantent le bar Le Roi Soleil. Il y a deux officiers de police, Livio et Reda. Ils boivent un verre, Reda tentant de consoler son collègue qui a tiré un coup de feu en l’air malheureux lors d’une altercation. On y retrouve, à bout de souffle, Erwan. Abel, un comédien en répétition via son e phone fait partie de cette poignée de noctambules. Il y a aussi Nico, le tenancier, Esmé, la serveuse. Arrive un familier, Monsieur Kants. Il joue régulièrement au loto ici même. Demandant à Esmé les résultats du tirage, il s’aperçoit, éberlué, qu’il a gagné plus de 240 millions d’euros. Juste avant s’était accoudé au comptoir un individu qui, entendant la nouvelle, sort son arme…
C’est le début d’un incroyable thriller qui va voir, au gré des coups de feu échangés, et souvent mortels, la vérité sur cette histoire se tordre dans tous les sens. Pourquoi ? Parce qu’en fait, le premier cadavre c’est celui de ce pauvre Monsieur Kants. Donc, que fait-on de son ticket gagnant ? Vous devinez la suite. Encore faut-il inventer une ou plusieurs histoires plausibles, au cas où.
Structuré avec virtuosité au travers du regard de chacun des protagonistes, ce film creuse en fait différents sillons captivants : les jeux d’argent et le mystère de la frénésie qu’ils provoquent, ensuite et peut-être surtout, le scénario déroule une subtile variation sur le thème de la vérité.
Cette véritable pièce de théâtre cochant les trois unités : lieu, temps, action, est servie par une distribution de haut vol. Pio Marmaï (Livio), Lucie Zhang (Esmé), Sofiane Zermani (Reda) Xianzeng Pan (Nico), Claude Aufaure (Monsieur Kants) et même, surprise, Maria de Medeiros dans le rôle de la propriétaire des lieux. Mais je garde pour la fin Joseph Olivennes et Panayotis Pascot. Le premier cité incarne un Erwan explosif totalement déjanté. En une brève tirade il explique la chaine alimentaire financière qui régit le monde. Stupéfiant… de justesse. Et puis il y a Panayotis Pascot, Abel incroyablement juste, pathétique et vibrant d’émotions.
Avec son second opus, Vincent Maël Cardona nous offre une belle rentrée cinéma.