Marco, l’énigme d’une vie, un film de Aitor Arregi et Jon Garano
Alors qu’il est Président de l’Association des victimes espagnoles de l’Holocauste, Enric Marco est accusé d’affabulation. Il n’aurait jamais été déporté ! Une commémoration internationale se prépare à laquelle les plus hautes autorités participeront…

Enric Marco (Eduard Fernández) en plein cours. – Crédit : Epicentre Films
Aitor Arregi et Jon Garano, auxquels nous devons déjà Une Vie secrète (2020), ont mis vingt ans à construire ce film. Grâce à la lecture de L’Imposteur de Javier Cercas, ils se décident à réaliser l’impossible « biopic » de ce mystificateur cherchant la lumière. Au début ce fut un documentaire, puis un docu-fiction et finalement une fiction pure qui nous trace le portrait d’un personnage hybride, tout à la fois le Marco réel et celui qu’il s’est inventé.
Un petit monsieur rondouillard nanti d’une moustache qu’il se teint en noir régulièrement tel un acteur refusant des ans…, tel nous apparaît Enric Marco. Nous le croisons dans un premier temps alors qu’il supplie un archiviste du camp de concentration de Flossenbürg de lui délivrer un certificat officiel de sa déportation dans ce lieu. Il ne se souvient de rien, y compris de son numéro matricule. L’archiviste a beau consulter ses documents, aucun Marco n’apparaît. J’ai donné un autre nom, prétend Marco. Rien à faire. Marco revient en Espagne et continue ses émissions, ses interventions dans les écoles afin de porter le témoignage de l’horreur nazie… qu’il n’a jamais connue. Figure de proue de cet activisme au demeurant plus que louable, Marco finit par interpeller un historien, Benito Bermejo. C’est ce dernier qui va mettre au jour la supercherie en 2005.
Ce film sur la manipulation est totalement fascinant. Il nous parle déjà de fake news et de ce phénomène que l’on nomme « post vérité », cette manière de vendre une histoire en mêlant le vrai au mensonge. Les réseaux sociaux actuels en font leur miel.
Porté intensément par un acteur exceptionnel : Eduard Fernández, ce film, au montage aussi serré que virtuose, est un miroir hallucinant dirigé sur certains acteurs de l’Histoire qui furent avant tout et parfois seulement de véritables mais faux acteurs… de cinéma.