Pierre Chaissac, alias « Choum », est un vieux vétéran du rock d’ici. Pétri de talent, on lui doit D.I.T. dans les années 1990, suivi d’une flopée de projets, dont notamment Cantharide, excellent groupe gorgé de mélodies catchy (un peu dans une veine Teenage Fanclub). Il nous revient avec un album solo, Impossible Songs Vol.1, sobrement sorti sous son vrai blaze. L’occasion de prendre des nouvelles…
Peux-tu résumer ton parcours musical pour ceux qui ne te connaissent pas ?
On part d’un heavy metal maladroit dans l’adolescence suivi par du punk, du rock’roll basique, un peu de hardcore pour arriver à D.I.T. au début des années 1990 qui, malgré ses débuts qui étaient pour nous tous une grosse boutade, était devenu un projet quand même sérieux. A suivi Pudgy d’obédience pop-folk, ensuite Choum et les Pervers Magnifiques où je chantais en français. Ce groupe a été mal compris mais reste une aventure humaine géniale avec des gens qui restent parmi mes meilleurs amis. Ensuite Cantharide pendant 11 ans et 3 albums, avec un nombre incalculable de formations différentes (ce qui n’a pas aidé pour pouvoir tourner). Depuis Sandbox un duo acoustique indie folk qui a été l’occasion d’enregistrer et de produire mon premier album entièrement fait à la maison. J’ai aussi accompagné Sacha Ivy, une fantastique jeune fille poitevine avec qui j’ai produit et enregistré deux EP 6 titres. Sans compter un bon paquet de participations diverses et variées mais ça risquerait d’être long à détailler… et évidemment pas mal de concerts où j’ai croisé Franck Black, Les Thugs, Daria, Peter Case, Marc Minelli, Mudhoney, Ron Peno, Jude, Perry Blake, les Saints et même Chris Bailey en solo, Frandol, City Kids, Thompson Rollets, Julie Doiron, Celtic Social Club, etc.
Ce disque est atypique dans ta discographie puisque on te connaissait plus dans une veine power pop. Là, on est dans quelque chose de plus froid, avec des claviers assez minimalistes et une boite à rythmes…
Atypique, oui dans le sens où c’est un disque fait en solitaire de A à Z. Du coup, libéré de l’idée de jouer ces chansons en groupe, je me suis laissé aller vers des arrangements différents voir inattendus venant de moi, mais uniquement pour ceux qui me connaissent mal. C’est plus la réalisation d’envies que j’avais depuis longtemps.
Autre facteur froid, les textes : sur « Land Of Pricks », on sent que la montée des populismes en Europe et dans le monde t’inquiète…
Ça n’est plus de l’inquiétude, c’est un constat. Je vis dans un patelin perdu bien loin de la fureur du monde mais où plus de la moitié de ces abrutis choisissent le pire en allant voter. On tombe de Charybde en Scylla actuellement. « Land Of Pricks » parle d’une certaine résignation face à la bêtise, ce qui n’empêche pas la colère et l’effarement. C’est pour ça que je suis passé à un alcoolisme domestique car ce que j’entends dans les bars me consterne. Avec Cantharide, j’avais déjà écrit « Times Of Destruction », avec Sandbox « Hey Buddy », sur cet album « Land Of Pricks » est une suite logique et plus franche.
On sent aussi dans ces textes un côté beautiful loser et broken heart…
Beautiful loser, t’as pas vu ma tête maintenant ! Broken heart, ben oui, ma vie sentimentale est une longue litanie de déceptions, ce n’est pas nouveau et ça a toujours nourri mon écriture. Il faut juste essayer de prendre ça avec une certaine légèreté voire un certain humour, et c’est aussi une manière d’accepter une solitude qui me va bien maintenant.
C’est toi qui joue tous les instruments ? Y compris la batterie quand il y en a (sur « Little White Lies » par exemple) ?
Désolé de te décevoir mais toutes les batteries sont virtuelles sur cet album. De même que les claviers, tous joués à la souris. Et ça m’a demandé un sacré boulot vu que je n’utilise aucun pattern préprogrammé… Ensuite, à l’exception de « Bad Ended Guy » où Sacha Ivy fait des choeurs et David Fakenahm, une superbe partie de steel guitar, je me suis chargé du reste, de l’instrumentation jusqu’au mixage. Sauf le mastering qui a été fait par Olivier Cotinaud de Studio In A Box avec qui je travaille depuis plusieurs décennies.
Tu n’as pas complètement changé puisque, sur « The Spermwhale Lament », on retrouve un beau morceau qui aurait eu totalement sa place sur les albums de Cantharide…
La grille d’accords et la mélodie sont effectivement proches des choses que je faisais avec Cantharide. Après, avec deux lignes de clavier dans l’arrangement… C’est la dernière chanson que j’ai écrite pour cet album l’été dernier, assez vite. C’est une chanson assez viscérale pour moi. Mes proches savent de quoi et de qui je parle. Les autres en feront ce qu’ils veulent. C’est d’ailleurs ça, faire des chansons. Tu fais quelque chose de personnel et chacun y trouve et entend ensuite ce qu’il ou elle veut… Je me marre bien d’ailleurs depuis longtemps avec les références que trouvent les gens à propos de mon artisanat… Toi même dans Abus Dangereux, tu avais cité Grateful Dead à propos de Cantharide, je cherche encore, ah ah !
Honnêtement je me rappelle plus ! (rires) Très belle pochette aussi (presque un disque Verve), qui l’a faite ?
Frank Lotte, un ami de longue date qui se trouve être aussi le frère de l’ancien batteur de D.I.T. Ca s’est fait très vite mais il a tout de suite compris ce que je désirais et c’est une sorte de visuel que je voulais depuis longtemps mais ça n’avait pas inspiré mes anciens collègues. Là, c’est vrai, c’est très réussi et comme c’est un Volume 1, on va remettre ça pour le Volume 2 qui est en pleine gestation. La plupart des chansons sont déjà en chantier et j’espère le finir rapidement pour une sortie, j’espère avant la fin de l’année. Je sors aussi deux titres en digital avec Sacha Ivy normalement à la fin du printemps, avec encore d’autres ambiances, d’autres couleurs. Vivre une vie de quasi-reclus ne signifie pas que c’est une vie de glandu…
> IMPOSSIBLE SONGS, Vol. 1 by PIERRE CHAISSAC – DistroKid