Leurs enfants après eux, un film de Ludovic et Zoran Boukherma
Librement inspiré du Goncourt 2018 signé Nicolas Mathieu, le scénario du dernier opus des jumeaux Boukherma, marmandais de naissance (Lot et Garonne) est un véritable hymne à l’adolescence d’une bouleversante générosité et pétri de sensibilité.
Début des années 90 du siècle dernier. Une vallée perdue dans l’Est de la France. Ses habitants n’existent que par l’activité des hauts fourneaux. Ces derniers sont en train de fermer… Pendant ce temps tragique pour les adultes, les enfants continuent leur vie insouciante. C’est le cas d’Anthony, 14 ans. Comment tuer ce temps qui s’étire sans rien offrir de réjouissant. Par un après-midi de canicule, Anthony et son copain se rapprochent du lac voisin. Ils volent un canoé afin d’aller voir de l’autre côté la plage des culs-nus. Cette virée insouciante va marquer au fer rouge la vie d’Anthony. En effet, sur un promontoire ils rencontrent un groupe de jeunes filles de leur âge. Parmi elles, Stéphanie. Le coup de foudre entre « Steph » et Anthony est immédiat. Comment poursuivre cette belle rencontre. Une fête au village paraît être l’idéal. Pour y aller, Anthony « emprunte » la moto littéralement sacralisée de son père, alcoolique notoire. Au moment de revenir à la maison, plus de moto. Volée ! Le drame peut se nouer. Il se déroule sur une dizaine d’années se concluant en 1998 avec la victoire des Bleus au mondial de football. C’est bien sûr une simple anecdote. L’essentiel est ailleurs. Dans le malström physique et mental de cet âge si compliqué, un âge beau et cruel à la fois. Dans le conflit social et culturel qui agite cette vallée, le papa du voleur est marocain et la révélation de l’acte du fiston est pour lui un autre drame. L’essentiel est aussi dans cette recherche éperdue d’un avenir, d’un ailleurs où l’herbe sera de toute manière plus verte.
L’essentiel est aussi dans le casting de ce film finalement bouleversant de sincérité et de justesse de ton. Paul Kircher confirme bien ici son statut d’artiste au potentiel hallucinant et au charisme que ne l’est pas moins. Hacine, le voleur de moto, est aussi l’une des grandes valeurs montantes : Sayyid El Alami. A suivre impérativement ! Angelina Woreth (Stéphanie) ne leur cède en rien. Raphaël Quenard fait une courte mais explosive apparition. Quant à Gilles Lellouche et Ludivine Sagnier, ils sont simplement magnifiques d’engagement dans ce film qui parle d’adolescence sur un mode brutal, loin de toute hagiographie générationnelle. C’est tellement plus vrai !