Dangereux marivaudage
Pour son premier long, la réalisatrice américano-iranienne Massy Tadjedin se penche sur le thème de la jalousie, puis le décline sur celui de la tentation et enfin, en toute logique, sur ceux de la culpabilité et du remord. Un véritable exercice de style pour lequel elle va choisir comme cobaye un couple de trentenaires new yorkais, plutôt bien sur eux et vivant confortablement. En gros la cible idéale. Michael doit quitter New York quelque temps pour travailler sur un dossier. Joanna apprend au cours d’une soirée qu’il ira avec Laura, une collègue. Erreur fatale, Michael ne le lui avait pas dit ! La machine infernale de la jalousie se met alors en marche dans le cerveau de la jeune Joanna. Avec les dégâts que l’on imagine quand on s’aventure sur le terrain de l’irrationnel. Dégâts d’autant plus importants et collatéraux que cette dernière, sitôt seule, se retrouve nez à nez avec Alex, un « ancien ». A des milliers de kilomètres de distance, les 36 heures qui vont suivre amènent le couple à faire des choix. Keira Knightley (Joanna), Sam Worthington, le héros d’Avatar (Michael), Guillaume Canet (Alex) et Eva Mendes (Laura) forment ce quatuor jouant en mineur la partition de la tentation et de l’infidélité physique et émotionnelle. De manière très subtile, Massy Tadjedin instille au fur et à mesure un authentique suspense sentimental. Cèdera ? Cèdera pas ? Cèdera mais, jusqu’où ? Le débat devient un véritable cas de conscience pour les deux jeunes gens. A l’évidence, ils s’aiment mais la tentation est gigantesque, décuplée par la jalousie et l’éloignement. La caméra de la réalisatrice ne se veut pas juge du conflit ni même partie prenante, elle observe simplement des réactions, parfois infinitésimales, à des stimuli aussi bien psychologiques que sensoriels, un peu comme une entomologiste. C’est troublant et fascinant à la fois. Une vraie réussite dans tous les cas !
Robert Pénavayre