Culture 31, en partenariat avec Toner d’Encre, propose une nouvelle série de portraits sur les affichistes. Très heureuse d’inaugurer cette série avec Sébastien Gravouil.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Sébastien Gravouil, je suis directeur artistique (DA) senior freelance et illustrateur. J’ai 41 ans. Je collabore avec des agences de communication, ou je travaille en direct avec le client au gré des opportunités. Je suis ainsi à l’origine de nombreuses campagnes publicitaires à Toulouse et ailleurs mais je suis aussi le créateur des affiches du Festival Jazz in Marciac depuis 2006, ou encore du Google Doodle hommage à Henri Salvador en novembre dernier.
J’affectionne tout particulièrement la diversité des sujets sur lesquels je suis amené à travailler comme, récemment, la commande d’une fresque pour Acapella, un torréfacteur de Cornebarrieu.
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L’intérêt de notre travail, que ce soit en tant que DA ou illustrateur, réside dans cette variété, cette remise en question permanente qui nous pousse à nous améliorer. C’est très stimulant ! En résumé, j’aime le travail de l’image, quel que soit le support ou le sujet. Un photomontage, une illustration ou un motion design : tous nécessitent un travail de chromie, de rythme, de structure… Je suis fasciné par le pouvoir des couleurs ; j’aime les faire vibrer.
Le terme d’affichiste me plaît bien car les visuels que je crée, notamment pour Jazz in Marciac, vont au delà, je l’espère, de leur vocation publicitaire ; ils s’inscrivent dans une démarche plus artistique, plus poétique même.
Quel est votre parcours ?
J’ai toujours dessiné et au final, après un BTS en communication des entreprises au lycée Ozenne de Toulouse qui me destinait à être chef de pub, la direction artistique s’est imposée à moi. Après une année de mise à niveau en Arts appliqués, j’ai enchaîné les stages et c’est vraiment là que j’ai appris mon métier, au sein des agences toulousaines comme Légendes et DDB The Way…
Je suis en quelque sorte la somme de toutes ces expériences, de ce que chacune des personnes croisées notamment lors de ces stages a eu la bienveillance de partager avec moi. J’ai toujours eu soif d’apprendre, je ne me lasse jamais. Mon fonctionnement est typiquement celui d’un autodidacte. D’un passionné aussi. D’ailleurs mes loisirs ont toujours tourné autour de l’image. J’ai fait de la photographie argentique, du dessin de nu, et suivi des cours de dessin d’observation.
Chez Légendes, Jean Denis Carrier, publicitaire passionné d’art, m’a encouragé à dessiner tout le long de mon stage et à intégrer l’illustration dans les créations publicitaires. Son agence favorisait vraiment la créativité, c’était génial. Sa simplicité et sa bienveillance ont beaucoup contribué à me faire aimer ce métier.
Chez DDB, j’ai littéralement plongé dans la pub et je me suis senti à ma place. Il fallait créer tous les jours, trouver des concepts, monter des maquettes papier à la hâte… Ça grouillait de monde. Il y avait une énergie folle !
Lors de mon passage chez Cartoon en packaging, quand les banques d’images n’étaient pas encore disponibles, ou que l’idée était trop complexe, j’ai appris l’art du rough, du croquis amélioré : l’impact, la rigueur, l’efficacité…
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À la suite de cette expérience de designer packaging en 2004, sur recommandation d’un client, j’ai été contacté par l’agence de communication du Festival Jazz in Marciac et invité à un entretien… un dimanche après-midi ! Ce devait être pour tester ma motivation… Pierre Pérouchet, directeur de l’agence Arkade, un amoureux des belles et des bonnes choses, m’a fait immédiatement confiance. Au fil de notre collaboration, un dialogue créatif s’est dessiné entre nous. Il a le mot juste et un vrai sens artistique qui sont extrêmement précieux. C’est un terreau propice à la création. Je suis très heureux de la confiance que lui et le festival me témoignent et me renouvellent chaque année.
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Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Je puise mon inspiration dans la peinture et la photographie : j’aime Matisse, Gauguin, Van Dongen et, parmi les contemporains Peter Doig, David Hockney, Claire Tabouret. La photographie contemporaine me passionne aussi car les artistes y ont cette même recherche de la couleur et de la structure de l’image.
J’apprécie spécialement le charme et l’efficacité des affiches de Bernard Villemot et, dans un tout autre style, je suis toujours bluffé par le travail de Jean-Paul Goude. Je suis admiratif de cette capacité qu’il avait avant Photoshop à déformer la réalité pour la rendre plus esthétique, plus accrocheuse.
Au cinéma, il m’arrive souvent de ne plus suivre l’histoire que l’on me raconte car je regarde tous les détails dans la composition de l’image, l’éclairage, le choix des couleurs, du décor, des costumes, la palette chromatique… Un film comme The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson en est un parfait exemple.
Comment trouvez-vous un équilibre entre la commande qu’on vous propose et votre univers ?
À vrai dire, et sans prétention aucune, on fait appel à moi pour ce que je peux apporter et non l’inverse. J’ai la chance que l’on me fasse confiance, ce qui me laisse une grande liberté.
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Une anecdote sur une de vos créations ?
Les affiches que je réalise sont souvent directement inspirées de ma vie. Il y a souvent un petit clin d’œil à ce que je vis. Par exemple, l’affiche de Jazz in Marciac pour l’édition de 2009 – représentant un couple – célèbre la rencontre avec la femme de ma vie, Isabelle, qui est aussi directrice artistique et m’accompagne dans chacune de mes créations. Nous aimons échanger, voire nous triturer l’esprit !
En 2019, j’avais bien avancé mes recherches et disposais de croquis déjà bien aboutis lorsque j’ai appris le décès de Roy Hargrove. Il n’avait pas 50 ans… Cela m’a beaucoup attristé. Il avait un lien fort avec le festival de Marciac dont il incarnait parfaitement les valeurs : un classicisme emprunt de modernité et une élégance simple. Sa tenue était décontractée mais tellement stylée. Changement de cap : l’affiche devait absolument lui rendre hommage, mais comme un private joke ; seuls les initiés – assez nombreux finalement – l’ont reconnu !
Pouvez-vous me parler de l’affiche de Jazz in Marciac pour cette édition 2021 ?
L’attente était grande après l’annulation de 2020. Marciac était resté en jachère en quelque sorte et il fallait que la musique y fleurisse à nouveau ! La thématique de ce renouveau s’est imposée naturellement. Je voulais beaucoup de couleurs, de la vie, et mettre en avant la femme aussi. Une chanteuse habillée de fleurs me semble bien symboliser le renouveau et la confiance dans l’avenir.
Un grand merci à Sébastien Gravouil et à sa famille !
Pour en savoir plus sur son travail :
Son site : https://sebastien-gravouil.fr/
Le suivre sur Instagram : https://www.instagram.com/sebastiengravouil/
Article en partenariat avec :