Amanda Sthers publie Lettre d’amour sans le dire aux éditions Grasset. La vibrante déclaration d’une femme qui redécouvre son désir.
Alice a 48 ans et une vie simple – trop simple ? Alice n’est pas heureuse. Elle se sent inutile. Sa fille vient de se marier avec un homme très riche et semble prendre ses distances. Alice serait-elle devenue encombrante ? Sa fille aurait-elle honte d’elle ? Une mère qui a toujours vécu seule, qui l’a élevée seule et qui parcourt la vie toute seule. Ce que la fille ignore, c’est le passé souvent trop sombre de cette femme qui a tout fait pour lui donner – à elle – une vie meilleure. Car le passé d’Alice n’est que la somme d’humiliations et de violences. Rejetée et mise à la porte par le père lorsqu’il découvre qu’elle est enceinte, Alice devra se débrouiller. La vie devient brutalités et abus. Mais Alice forcera le destin pour s’en sortir. Elle travaillera fort et deviendra professeur de français. Pourtant, il manque quelque chose, tout semble peser dans la vie d’Alice. Jusqu’au jour où elle décide d’entrer dans un salon de massage et là tout bascule.
Lettre à un inconnu
Alice entre dans ce lieu sans trop savoir pourquoi. Elle a honte de son corps, elle ne veut pas le montrer, encore moins être touchée. Mais elle entre, boit un thé, gravit quelques marches. C’est la première fois. Puis un masseur japonais surgit, sans un mot, avec grâce. Et la révélation apparaît d’un coup : Alice a un corps et à l’intérieur de celui-ci des sentiments profonds, secrets, douloureux.
Alice revient de nombreuses fois chez le masseur. Des sentiments grandissent et la submergent, cet homme est en train de la révéler à elle-même. De lui redonner un corps, une existence. Pour la première fois, l’amour l’envahit. Alors elle prend des cours de japonais, s’intéresse à cette culture, regarde des films nippons. Elle voudrait parler, échanger avec le masseur si silencieux. Et c’est dans une longue lettre, sans pudeur, qu’elle lui raconte tout, sa vie blessée et son amour pour lui.
Une confidence qui, comme une lettre à la mer, dévoile le portrait d’une femme bouleversante, d’une femme qui voulait simplement être un peu visible. Ce texte profond et émouvant nous fait penser à la Lettre à un inconnu de Stephen Zweig. On y retrouve la même émotion tissée avec force et déterminisme. Amanda Sthers nous propose également la lecture moderne des sentiments intimes et charnels d’une femme qui n’a pas renoncé à l’amour, malgré tout. Sublime !
Amanda Sthers, Lettre d’amour sans le dire, Grasset, 140 p.
Amanda STHERS © Sandrine Gomez Photography
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