Une façon originale de fêter la Saint-Valentin au Théâtre du Capitole, ce 14 février. En effet, accompagné par un seul piano, celui d’Antoine Palloc, la soprano Annick Massis se livre seule à une scène déchirante de rupture au téléphone, mais appareil des années cinquante, avec fil et prise, et lignes encombrées !. C’est ce monument de l’art lyrique appelé La Voix humaine. Il est mis en musique par Francis Poulenc, le livret étant de Jean Cocteau.
Tragédie lyrique en un acte, le texte est extrait de la pièce de Jean Cocteau représentée pour la première fois au Théâtre de la Comédie-Française le 17 février 1930. Elle sera créée le 6 février 1959 au Théâtre national de l’Opéra-Comique à Paris. Le rôle est unique et il peut être interprété par une femme dont la tessiture n’est pas une condition première. Tout est dans l’interprétation et dans la gestion des nombreux silences, interruptions et points d’orgue qui nécessite une entente parfaite avec, ici le pianiste, et dans la version avec orchestre, avec le chef. Moments d’angoisse, moments d’accalmie, tout cela peut être plus ou moins subi en fonction des interprètes. En fonction de l’interprétation, la prouesse dure environ quarante minutes.
La mise en scène est très limitée. Peut-être le sera t-elle encore davantage, vu que l’accompagnement est seulement au piano. Mais, quand on connaît le tempérament de la chanteuse, elle va se charger de nous jouer une scène de rupture sûrement peu banale car elle est libre …d’exécution. Sans avoir besoin d’aller chercher à imiter la créatrice du rôle en 1959, la soprano Denise Duval. Dès l’instant où elle aura décroché, elle parlera debout, assise, de dos ou face à la salle, de profil, qui sait, à genoux, ou pourquoi pas allongée sur le sol. Marchera-t-elle sans arrêt ? Tordra-t-elle le fil, s’il y a fil ?? On ne peut épiloguer davantage puisqu’on ne sait pas, à cet instant, quels sont les éléments de décor qui permettent tant de variantes possibles. On ne peut que s’appuyer sur la version originale et penser qu’il vaut mieux une scène avec un téléphone des années 50 qu’un i-phone !! Pour savoir ce qui tombe à la fin par terre, nous devrons attendre le 14 février. Une Saint-Valentin originale que l’on ne va souhaiter à personne dans la réalité, au moins ce jour-là !
Certains, présents ce soir là, se souviennent sûrement de la prestation d’Annick Massis dans le Lucrecia Borgia de Donizetti, saison passée. Quelques scènes de cet opéra restent de grands moments de chant et de théâtre. D’autres font remonter leur souvenir jusqu’aux mémorables scènes de la folie dans Lucia di Lammermoor, et d’autres jusqu’aux incarnations dans le rôle de Leïla dans Les Pêcheurs de perles, si je ne me trompe en 1998. Mais il y eut encore Comtesse Adèle dans le Comte Ory. Sur les plus grandes scènes lyriques, l’artiste a chanté les plus grands rôles belcantistes qui soient, avec les plus grands ténors comme partenaires. On n’en citera que deux, Rockwell Blake et Juan Diego Florez. Sa boulimie de rôles est impressionnante. Et certains, chantés lors d’une seule production, “par gourmandise“ dit-elle.
Ainsi, nous voilà conviés à une prestation peu commune de l’artiste, une sorte de défi auquel nous sommes très heureux d’assister. Le récital devrait se compléter par quelques pages de bel canto plus connues dans son répertoire immense.
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Théâtre du Capitole