5e édition du festival Passions Baroques à Montauban du 5 au 13 octobre
Passions Baroques fait sa révolution et passe de l’équinoxe de printemps à celle d’automne en organisant sa 5e édition dès le mois d’octobre. Un nouveau départ pour le festival montalbanais qui étoffe sa programmation en l’élargissant à d’autres propositions que la seule forme concert. Jean-Marc Andrieu, directeur artistique de l’Orchestre baroque de Montauban Les Passions, également fondateur et directeur artistique de Passions Baroques, est notre guide dans ce voyage « À la rencontre des baroques du monde ».
C’est la 5ème édition du festival Passions Baroques, on pourrait donc en déduire qu’il a été lancé en 2015. Sa création est pourtant antérieure. Quelle est la raison de ce décalage ?
Il est dû au fait que le festival avait lieu jusqu’alors tous les deux ans. Sa création remonte donc à l’automne 2011, les éditions suivantes ayant été décalées au début du printemps. Désormais, Passions Baroques devrait être annuel et se tenir lors de la première quinzaine d’octobre. Nous avons choisi de positionner de nouveau ce rendez-vous au début de l’automne parce qu’il fait encore bon à cette période dans les églises et les temples, lieux de plusieurs de nos concerts. Il y a également un aspect stratégique puisque d’autres manifestations ont lieu en mars dans l’agglomération montalbanaise.
Quelle est la ligne directrice de ce festival sous-titré cette année « À la rencontre des baroques du monde » ? Il semble que l’édition 2019 inaugure une nouvelle formule et une programmation qui dépasse le simple cadre du concert.
Effectivement, nous avons voulu diversifier les propositions pour évoquer le baroque sous d’autres formes que celle du seul concert. Nous espérons renouveler notre public en attirant les cinéphiles, les passionnés de science, les jeunes et même les amateurs de ce qu’on appelle les « cultures urbaines ». Il y a donc des conférences, une rencontre avec une romancière, une conversation avec des scolaires, la projection d’un film, des danseurs de krump… et bien sûr, des concerts en tous genres.
Le festival commence le 5 octobre mais les concerts « stricto sensu » sont concentrés entre le 10 et le 13. Qu’avez-vous programmé avant ?
Nous collaborons depuis quelques années avec la Maison de Fermat à Beaumont-de-Lomagne, demeure natale du grand mathématicien devenue un lieu culturel dédié aux mathématiques. Nous y avons déjà fait des concerts et nous y organisons le 5 octobre une conférence avec Xavier Buff, mathématicien et universitaire, qui va parler des fractales, un concept plutôt spatial et visuel, éloigné de la musique a priori. Nous allons pourtant essayer de l’illustrer avec le principe du canon et la répétition d’un motif à l’infini en musique baroque.
Le lendemain, dimanche 6 octobre, soirée consacrée au thème « Parlons baroque ! ». Elle aura lieu à Bressols à la salle de cinéma La Muse. Nous y projetterons d’abord à 17h45 un court documentaire sur Les Indes galantes dont des danseurs de krump ont monté une version très originale. Je n’en dis pas plus et je laisse les gens imaginer ce que peuvent donner les danses urbaines sur la musique de Rameau, c’est vraiment extraordinaire à voir. Il y aura ensuite une conférence autour de ce terme, « baroque », et sur le ou les sens qu’on peut lui donner. Je m’exprimerai sur la bande originale du film Barry Lyndon de Stanley Kubrick qui sera projeté lors de cette soirée. C’est un film emblématique du baroque au cinéma et la musique y joue un rôle essentiel, comme souvent chez cet immense réalisateur.
Il s’agit de créer ou de montrer les ponts existant entre la musique baroque et d’autres disciplines, qu’elles soient artistiques ou scientifiques ?
Tout à fait, l’idée est de mettre en évidence toutes les interactions qui existent entre la notion de baroque et toutes les formes d’art, la littérature, le cinéma, et même les mathématiques ! Il s’agit aussi de permettre au public de rencontrer des écrivains, des scientifiques, de réfléchir avec eux et de leur poser des questions.
Il y a aussi des masterclasses, dont une en milieu scolaire.
Nous avons souhaité permettre à de jeunes élèves d’écoles primaires et de collèges de Montauban, entre autres ceux des classes à horaires aménagés « voix » que nous avons créées l’an passé, de rencontrer la jeune soprano Tosca Rousseau (au prénom prédestiné). Une chanteuse de grand talent que j’ai invitée pour que le public de Montauban, surtout sa frange la plus jeune, puisse découvrir sa voix mais aussi son métier en discutant avec elle.
Nous avons également prévu une masterclasse avec l’organiste et claveciniste Yvan Garcia pour les élèves de la classe de clavecin du Conservatoire à Rayonnement Départemental de Montauban. Il va donner une leçon et des conseils sur la technique dite de « la basse continue », un aspect important du travail du claveciniste.
Enfin, nous proposons une rencontre avec la romancière et violoniste Léonor de Récondo au lycée Michelet de Montauban. Elle va s’entretenir avec les lycéens autour de son œuvre littéraire et de son rapport à la musique dans l’écriture.
Puisqu’on parle de Léonor de Récondo, les concerts commencent jeudi 10 octobre au CRD de Montauban avec un concert-lecture de cette artiste qui a autant de cordes à son arc qu’à son violon. Vous la connaissez bien puisque Les Passions ont joué avec elle à plusieurs reprises.
Oui, c’est une remarquable musicienne, issue d’une famille d’artistes, que j’ai connue jeune violoniste et toujours appréciée. Plus tard, j’ai découvert ses livres et son don pour l’écriture. Je ne sais pas comment elle fait pour mener de front ses carrières dans la musique et la littérature mais elle a vraiment un talent extraordinaire. Nous sommes heureux et honorés de l’accueillir à cette 5e édition de Passions Baroques.
Son concert-lecture, donné avec le claveciniste Yvan Garcia, est intitulé Manifesto Remix. De quoi s’agit-il ?
Manifesto est le titre d’un des livres de Léonor de Récondo. Ce concert-lecture est une espèce de mélange, de « remix » entre des lectures d’extraits de son livre et des pièces pour violon qu’elle va jouer avec Yvan Garcia.
Le lendemain, vendredi 11 octobre au Théâtre Olympe de Gouges de Montauban, vous proposez un programme joliment titré Concertos pour rêves brisés. Les Passions vont y accompagner la violoniste Stéphanie Paulet. À quoi ce titre un peu mystérieux fait-il allusion ?
La petite histoire du choix de ce titre renvoie à la grande Histoire. Le duc d’Aiguillon, ministre des finances de Louis XV, rêvait d’entretenir un petit cénacle d’artistes à Paris, d’y installer une vie culturelle intense, et ce rêve a été brisé par la disgrâce dont il a été victime auprès du roi. Il est parti en exil sur ses terres, à Aiguillon dans le Lot-et-Garonne, où il est revenu avec ses comédiens, ses musiciens, ses danseurs… et avec des centaines de partitions, huit cents exactement. Celles-ci ont été miraculeusement conservées après la Révolution et elles se trouvent aujourd’hui aux archives départementales à Agen. Je suis allé les éplucher, les étudier, et j’en ai extrait deux concertos que nous allons jouer le 11 octobre avec Stéphanie Paulet. Stéphanie est une des grandes violonistes baroques françaises de notre temps. C’est là encore un grand honneur de l’avoir à nos côtés pour ce concert.
Samedi 12 octobre à 17h, vous présentez « Au cœur de l’Allemagne baroque », un programme qui va être interprété par un chœur venu d’outre-Rhin.
Les musiciens allemands sont a priori les mieux placés pour servir leur musique. C’est le Harvestehuder Kammerchor de Hambourg, un choeur semi-professionnel, qui va venir chanter ce programme de musique allemande baroque au Temple des Carmes de Montauban, accompagné par l’organiste Xaver Schult. Je précise que ce concert est gratuit.
Et le soir à 20h30 au Théâtre Olympe de Gouges, un moment très dépaysant avec le programme Lanzamiento.
Nous poursuivrons notre promenade parmi les baroques du monde avec des artistes qui viennent du Chili. Lors des tournées des Passions en Amérique du Sud, j’ai fait la connaissance de Rodrigo Diaz, un guitariste et théorbiste très talentueux. Il a fondé Les Carillons, l’Ensemble de musique ancienne de la Faculté des Arts de l’Université de Santiago du Chili, et je suis ravi d’avoir pu l’inviter à Passions Baroques. Lui et ses musiciens vont montrer l’influence de la musique ancienne italienne sur la création musicale sud-américaine. Leur programme est constitué de pièces de compositeurs italiens et d’autres de compositeurs anonymes qui ont été retrouvées dans les missions jésuites au Pérou, au Chili, en Équateur, et au Costa Rica.
Dimanche 13 octobre à 12h15, Point d’orgue à la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption.
Un petit récital donné par Matthieu Béramis, un jeune élève du 3e cycle de la classe d’orgue du CRD de Montauban. Nous avions à cœur de faire découvrir un jeune talent montalbanais lors de cette édition. Il va jouer des extraits de messes de Couperin.
Le même jour à 15h30 à l’auditorium du CRD, on continue notre voyage en abordant cette fois-ci le continent asiatique grâce à un programme intitulé Le dit de Heungbo…
Il m’a été proposé d’intégrer du pansori, le chant traditionnel de Corée du Sud, à notre programmation. Je n’avais jamais entendu parler de ce genre musical qui date du XVII/XVIIIe siècle, donc contemporain de l’époque baroque en Europe. J’ai tout de suite été séduit par cette idée qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit de cette 5e édition. Nous allons recevoir deux artistes sud-coréens, la chanteuse Min Hye-Sung et le percussionniste Choi Hyodong (tambour coréen buk). Le spectacle va être sous-titré et je crois que nous allons passer un moment délicieusement exotique en compagnie de ce duo. Je vois un grand intérêt à faire entendre les musiques qu’on jouait en pleine période baroque, loin de l’Europe.
Concert de clôture dimanche 13 octobre à 20h30 au Théâtre Olympe de Gouges avec le programme La Donna barocca. Qui est cette Dame baroque ?
Ce concert est placé sous le signe du Baroque au féminin avec un programme de compositrices du XVIIe siècle italien, la plus connue étant sans doute Barbara Strozzi. Il va prouver, s’il est nécessaire encore, que les femmes ont autant de talent que les hommes dans le domaine de la composition même si, malheureusement, elles n’ont pas toujours eu l’occasion de l’exprimer. Barbara Strozzi est née en 1619 et nous célébrons cette année les 400 ans de sa naissance. Très beau programme donc, pour lequel nous avons le plaisir de recevoir Le Concert de l’Hostel Dieu, formation lyonnaise dirigée par Franck-Emmanuel Comte. C’est un des grands ensembles baroques français, spécialisé dans ce répertoire, ce qui nous promet un concert exceptionnel d’autant plus qu’il va accompagner l’excellente soprano canadienne Heather Newhouse.
Une 5e édition qui donne une place importante aux femmes, avec une forte ouverture internationale conforme au thème que vous avez choisi : « À la rencontre des baroques du monde ». Est-ce que les prochains festivals seront conçus selon ce principe ?
Non, c’est un thème bien spécifique à ce festival 2019 mais nous avons déjà réfléchi à celui de la prochaine édition pour laquelle nous envisageons, sans vouloir trop en dire, de faire découvrir au public les différentes étapes du baroque, de ce qui l’a précédé à ce qui l’a suivi en passant bien sûr par le commencement et la fin de cette période. Un vaste chantier lorsqu’on songe que le baroque s’étale sur un bon siècle et demi et qu’il a connu de nombreuses évolutions…
Entretien réalisé par Éric Duprix
Billetterie en Ligne de Passions Baroques
Passions Baroques
du 05 au 13 octobre 2019 • Montauban
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