Intéressante projection presse ce matin au Gaumont Wilson, le dernier Klapisch, « DEUX MOI » – sans S – tourné dans les rues de Paris. Au casting, François Civil et Ana Girardot, acteurs fétiches de Cédric Klapisch et du moment, deux trentenaires dépressifs, deux identités juxtaposées en quête de LA rencontre au milieu de la jungle urbaine.
Rémy et Mélanie ont trente ans et vivent dans le même quartier à Paris. Elle multiplie les rendez-vous ratés sur les réseaux sociaux pendant qu’il peine à faire une rencontre. Tous les deux victimes de cette solitude des grandes villes, à l’époque hyper connectée où l’on pense pourtant que se rencontrer devrait être plus simple… Deux individus, deux parcours. Sans le savoir, ils empruntent deux routes qui les mèneront dans une même direction… celle d’une histoire amour ?
Alors voilà, on connaît la fin dès le début, c’est vrai, ça pourrait ne pas être intéressant d’avoir le déroulé dès les premiers instants filmés mais justement, c’est la tension du film tout entier vers le dénouement, la gradation des émotions et des couleurs, qui font le sel du film. Pas ou peu d’intrigue donc puisque l’on sait qu’ils vont s’aimer, mais c’est cette absence même d’intrigue qui permet de se focaliser sur la progression psychologique et émotionnelle de ces personnages au bord de la faillite amoureuse. Une ode à l’infraordinaire, au banal, à l’attendu. Klapisch aime interroger l’habituel.
Un mot sur les acteurs. Un seul mot, oui, comme dans un entretien de la DRH. Vous comprendrez en voyant le film. François civil, désarmant. Ana Girardot, titubante. Simon Abkarian, magnanime. François Berland, désabusé. Camille Cottin, barrée. Pierre Niney, fantoche.
On aime effeuiller les personnages et fouiner dans leur passé plus ou moins dissimulé, presqu’en même temps qu’ils se découvrent eux-même via leurs analyses respectives. On les découvre avec lenteur, comme dans un roman, sous forme d’analepses narratives parfois. On prend le temps de les arrimer à nous.
Les propos sont parfois clichés. Oui mais. C’est la vraie vie. Klapisch sait filmer les gens comme ils vivent. La vie normale.
La désespérance de la jeunesse. La solitude urbaine. Les rêves dingues contrariés par une réalité sans saveur. Rémy et Mélanie semblent marcher côte à côte sans se voir, deux solitudes juxtaposées nous l’avons dit, deux errances chaotiques entre réseaux sociaux et rencontres faciles. Film sociétal. Film social. Film existentiel.
Klapisch nous a habitués à plus de « joyeux bordel » mais ce sont les tous petits moments de félicité qui rendent l’existence supportable non ? Il en est de même pour ce film qui par sa longue introduction sur la solitude pourrait être accablant mais se révèle optimiste par les éclats de rire minuscules, les infinités de silences, les croisements de regard, les larmes retenues. Une ode au tout petit, une ode au possible, dans la solitude immense d’un Paris où les trains passent, repassent et oublient parfois des passagers sur la voie bruyante.