Retour de Yannick Nézet-Séguin à la Halle aux Grains avec l’Orchestre de chambre d’Europe, en clôture de la saison toulousaine des Grands Interprètes.
Yannick Nézet-Séguin (photo) est le successeur à New York de James Levine, lequel a occupé durant près de quarante ans le poste de directeur musical du Metropolitan Opera de New York. Le Québécois est assurément l’un des chefs les plus actifs de la planète, dirigeant jusqu’à 135 concerts certaines saisons. Né en 1975, sa personnalité aussi attachante que charismatique est liée pour de longues années encore au modeste Orchestre métropolitain de Montréal, dont il assure la direction artistique depuis l’an 2000. «Le fait que j’accorde de l’attention au dernier musicien au fond de l’orchestre, ça dit bien d’où je viens. Je viens d’une société égalitaire, beaucoup plus qu’en Europe, où les rapports sont très hiérarchisés, et aux États-Unis aussi, dans le fond. Mon côté montréalais ou québécois s’exprime dans ma volonté d’unir les gens et de tous les mettre sur un pied d’égalité», confessait-il au quotidien canadien La Presse.
Directeur musical de l’Orchestre de Philadelphie depuis quatre ans, il a sauvé de la faillite cette prestigieuse phalange qui joue désormais à guichets fermés. Avec ces trois formations américaines, Yannick Nézet-Séguin devrait donc se faire plus rare ces prochaines années en Europe. Il fréquente la Halle aux Grains depuis plus de dix ans, puisqu’il y a dirigé l’Orchestre national du Capitole avant l’arrivée de Tugan Sokhiev. Il s’y est également illustré avec le Philharmonique de Rotterdam, dont il quittera la direction musicale au terme de cette saison.
«Je crois de plus en plus à la chimie qui s’opère entre un chef et un orchestre. Disons qu’un orchestre, c’est 100 ingrédients mêlés ensemble. Le chef, lui, apporte un nouvel ingrédient qui modifie la chimie. Je me rends compte que lorsque je dirige la même oeuvre avec chacune de mes trois familles musicales, l’œuvre prend une couleur différente. À Philadelphie, la couleur n’est jamais légère: elle est dense et riche; c’est du velours rouge foncé. À Rotterdam, l’orchestre a une beauté plus brute; sa couleur serait vert minéral ou vert-de-gris. Avec cet orchestre, je travaille plus comme un sculpteur ou un tailleur de cristal pour que la musique soit plus polie et qu’elle respire davantage. Quant au Métropolitain, au risque de paraître “quétaine”, je dirais que sa couleur, c’est un beau bleu: c’est mon orchestre le plus doux et le plus tendre», assurait-il en 2014.
Nézet-Séguin a surtout brillé plusieurs fois à la Halle aux Grains, à la tête du fabuleux Orchestre de chambre d’Europe (COE), avec lequel il a notamment enregistré des opéras de Mozart, l’intégrale des symphonies de Schumann et de Mendelssohn, et dont il est devenu Membre honoraire la saison dernière. «Une de mes croyances fondamentales, c’est que je suis au service de mes musiciens. Mais attention: pour être à leur service, il faut accepter de prendre des décisions. Les musiciens veulent de la clarté et de l’autorité. Comme chef, j’ai bien servi mes musiciens si je leur ai fourni les conditions idéales leur permettant de servir l’œuvre et son compositeur», assurait-il dans La Presse, en 2014, avant de déclarer dernièrement dans Libération : «Je ne veux pas d’un son “Yannick Nézet-Séguin”.»
À l’invitation des Grands Interprètes, Yannick Nézet-Séguin revient à la Halle aux Grains avec l’Orchestre de chambre d’Europe, dont ce sera cette saison la seconde performance toulousaine, et en compagnie de la violoniste géorgienne Lisa Batiashvili qui interprètera le Concerto de Johannes Brahms. On entendra également la Troisième symphonie du compositeur allemand et l’ouverture de « la Fiancée vendue », opéra du Tchèque Bedřich Smetana.
Jérôme Gac
Orchestre de chambre d’Europe,
place Dupuy, Toulouse.
Tél. : 05 61 21 09 00.