Compte-rendu, opéra. Toulouse, Théâtre du Capitole, le 25 novembre 2016 . Rossini : Le Turc en Italie. Emilio Sagi : mise en scène ; Attilio Cremonesi, direction musicale.
Cette production est fraiche et bien élevée. Sans aucun excès de mise en scène, sans partis pris hasardeux ; nous voilà devant un honnête travail qui permet à la partition de s’envoler et aux voix de briller dans un bel écrin. Dès l’ouverture, nous savons que l’Orchestre du Capitole est en pleine santé avec des solistes au cor et à la trompette parfaits d’élégance. Attilio Cremonesi, dont nous avions apprécié la direction dans la trilogie Da Ponte-Mozart, dirige avec énergie et fougue, une partition plus subtile qu’il n’y paraît. L’équilibre avec les voix est idéal, et les grands ensembles, surtout le premier final glorieux, sont équilibrés. La mise en scène d’Emilio Sagi est habile, idéalisant une transposition discrète dans les années soixante, aux belles robes et costumes souples. Les couleurs sont fraiches et le décor de Daniel Bianco suggère une Naples intemporelle.
La direction d’acteur est pleine de vivacité y compris pour le chœur très mobile et toujours bien chantant. Chaque chanteur a un physique agréable et possède la jeunesse du rôle. Pietro Spagnoli est un Selim de grande classe vocale et scénique. Il a tout pour être un Selim parfait. La Fiorilla de Sabina Puértolas est une pin-up de charme à la voix agile mais peu agréable de timbre. Son époux est habile comédien autant qu’elle. Leur duo sur le scooter est impayable.
La voix d’Alessandro Corbelli accuse habilement le poids des ans et l’art du chanteur est suprême. Le « vieux mari » est vif , il est loin d’être un barbon.
Le reste de la distribution est plus exotique. Zheng Zhong Zhou est un Prosdocimo vocalement appliqué et scéniquement volontaire, mais ce rôle d’entremetteur si « Italien » ne lui est pas très naturel. En amoureux jaloux le ténor chinois Yijie Shi, a certes un physique de jeune premier, mais la technique vocale semble un peu forcée. Il est d’ailleurs bien plus à l’aise dans son deuxième air de colère que dans la douceur de l’amoureux à l’acte I. La dureté du timbre s’amenuise au cours de la soirée. L’autre ténor, Anton Rositskiy en Albazar, est bien plus suave et sucré de timbre et dans son air pyrotechnique, il assure crânement une tessiture brillante. Et pourquoi ne pas inverser ces deux ténors pour l’”italianité” plus grande du Latin Lover de Fiorilla…
La Zaïda de Franziska Gottwald sait en imposer face à Fiorilla justement, pour reconquérir son Turc mais là aussi le timbre est peu agréable, trop peu italien.
Si les voix ont toutes su rendre hommage à la si délicate technique rossinienne ce sont surtout les qualités scéniques des chanteurs qui créent une belle unité. Au final, la modestie de la mise en scène, – qui célèbre le portrait de Rossini sur scène, la main de fer dans un gant de velours d’Attilio Cremonesi et la perfection chorale et orchestrale des forces capitolines qui entrainent le succès public de ce très agréable spectacle.
Compte-rendu, opéra. Toulouse, Théâtre du Capitole, le 25 novembre 2016 ; Gioacchino Rossini (1792-1868) : Le Turc en Italie, opéra en deux actes sur un livret de Felice Romani créé le 14 août 1814 au Teatro alla Scala de Milan ; Nouvelle production avec le Théâtre municipal de Santiago du Chili et l’Opéra d’Oviedo. Emilio Sagi : mise en scène ; Daniel Bianco : décors ; Pepa Ojanguren : costumes ; Eduardo Bravo : lumières ; Avec : Pietro Spagnoli, Selim ; Sabina Puértolas, Fiorilla ; Alessandro Corbelli, Don Geronio ; Yijie Shi, Narciso ; Franziska Gottwald, Zaida ; Anton Rositskiy, Albazar ; Zheng Zhong Zhou, Prosdocimo ; Orchestre National du Capitole ; Choeur du Capitole, Alfonso Caiani direction. Direction musicale : Attilio Cremonesi, direction musicale.
Illustrations : © P. Nin