On retrouve Annie et Jérémy, les nouveaux co-gérants de l’American Cosmograph (ex-Utopia Toulouse) pour leurs coups de cœur pour le fanzine n°3
Annie : La première page du fanzine n°3 sera Divines, l’histoire de deux jeunes femmes en banlieue parisienne, en BEP accueil. Elles refusent cet avenir-là et décident de faire du fric en travaillant pour la caïd de la cité. C’est un premier film, avec ses défauts, mais tu sens l’urgence de la réalisatrice à en parler, avec une vraie énergie. Elle mêle très bien l’onirisme avec la réalité, la difficulté de la situation avec l’espoir, et des vrais moments de grâce. Il y a quelque chose d’intéressant dans la démarche, même si le film n’est jamais démonstratif là-dessus : elle montre une nana qui est caïd, avec plus ou moins son larbin qui est un mec ; les deux héroïnes sont des nanas aussi, avec le côté un peu classique : pour sortir de la cité, faut vendre du shit. En général, dans les films, ce sont des mecs. D’ailleurs, la réplique du film qui n’est dite qu’une fois mais qu’on entend déjà partout depuis la projection cannoise, c’est « Toi t’as du clito ». Ces héroïnes ne sont pas très féminines, en jogging-capuches, et sont obligées de s’imposer à la manière d’un mec : elles sont violentes dans les mots, physiquement aussi. Les deux comédiennes sont incroyables. Houda Benyamina nous emmène dans cette situation très complexe, traite tous ces sujets sans jamais alourdir son histoire qui nous embarque complètement.
A lire : l’avis de moi, Carine donc, sur Divines.
Divines de Houda Benyamina, à partir du 31 août à l’American Cosmograph. Avec Oulaya Amamra, Déborah Lukumuena, Kevin Mischel.
Victoria de Justine Triet, à partir du 14 septembre 2016 à l’American Cosmograph. Avec Virginie Efira, Vincent Lacoste, Melvil Poupaud.
Annie : Relève, histoire d’une création est un documentaire sur Benjamin Millepied quand il a été directeur de la danse à l’Opéra de Paris. Le film le suit pendant la création du ballet d’ouverture de saison. Ça raconte une révolution tranquille finalement : l’Opéra de Paris est une grosse institution, et la danse classique est un monde hyper tyrannique – comme on l’a vu dans Black Swan : souffrance du corps, compétition... – alors que Millepied a beaucoup dansé à l’étranger et notamment il a été danseur étoile au New York City Ballet. Il arrive à l’Opéra de Paris avec une conception de la danse très différente qu’il instaure petit à petit. Le film suit la création de son spectacle, et l’on voit sa conception de la danse et ses rapport avec les danseurs qu’il essaie d’amener vers quelque chose de différent. Cette liberté qu’il essaie d’amener est hyper positive pour eux, avec des moments très beaux. On découvre aussi un lieu – l’Opéra de Paris – gigantesque, labyrinthique, gardien d’un savoir et d’une tradition qu’il ne sera pas facile de remettre en question.