Tugan Sokhiev dirige « les Fiançailles au couvent », de Prokofiev, à l’occasion de la reprise d’une production du Théâtre du Capitole signée Martin Duncan.
Créée en 2011 à Toulouse, la mise en scène de Martin Duncan des « Fiançailles au couvent », de Serge Prokofiev, est reprise au Théâtre du Capitole. Le Chœur et l’Orchestre du Capitole seront à nouveau dirigés par Tugan Sokhiev. Servie avec vigueur et subtilité par le chef, la partition est riche de rebondissements virtuoses et s’impose comme le principal intérêt de cet opéra créé en 1946. Le livret ne fait en effet guère preuve d’originalité : cette comédie de mœurs extravagante multiplie quiproquos, travestissement et substitution de personnages, rappelant ainsi « les Noces de Figaro » et « Così fan tutte » de Mozart, et bien d’autres œuvres théâtrales (Molière, Marivaux, etc.). Pourtant très réussie, la mise en scène ne prend guère le dessus sur le livret pour en expurger les lourdeurs. À la création de cette production à Toulouse, la direction d’acteur était l’un des points forts de la mise en scène du britannique Martin Duncan. La plupart des interprètes de l’époque retrouvera le plateau de l’opéra toulousain.
Selon Tugan Sokhiev, « »les Fiançailles au couvent » est l’un des meilleurs exemples du sens de l’humour de Prokofiev, le livret est inspiré de la pièce de Sheridan, « The Duenna ». J’aime cette musique pleine d’énergie, proche de celle de « l’Amour des trois oranges ». L’interaction entre l’orchestre et la scène y est très importante. Outre son rôle d’ornementation de la ligne vocale, l’orchestre participe de l’humour, de la définition des caractères et des lignes vocales. Dans « les Fiançailles au couvent », Prokofiev est avant tout intéressé par une situation théâtrale : au sein d’une famille noble, un père veut marier sa fille à un très riche marchand de poissons. Des intrigues se nouent et se dénouent entre des personnages ayant des conditions sociales différentes. Prokofiev joue avec les situations, les sentiments des personnages et cette œuvre est de ce point de vue comparable aux comédies de Molière. Les deux jeunes couples que sont Ferdinand, amoureux de Clara, et Antonio, amoureux de Louisa, ont bien sûr quelques scènes romantiques, très lyriques, à chanter.»
Le chef poursuit : «Pour ce qui est de l’importance que revêt le lyrisme dans cet opéra, je dirais que « les Fiançailles au couvent » se situe entre « l’Amour des trois oranges », qui n’en contient que très peu, et « Guerre et Paix », qui a un réel souffle épique. Prokofiev est un des compositeurs russes les plus fascinants du XXe siècle car il développe un langage tout à fait particulier, une grammaire rythmique et harmonique qui lui est très personnelle.»
«C’est un compositeur prolifique qui développe une très large palette musicale, ce qui rend son œuvre tout à fait passionnante à diriger. On reconnaît très facilement l’orchestre de Prokofiev, qui est très riche, fait usage de coloris variés permettant à son orchestre de caractériser chacun des personnages. Son langage musical est celui de l’avant-garde, il écrit une musique moderne. Ce qui fait le génie de Prokofiev, c’est qu’il écrit une musique qui touche tous les publics», assure Tugan Sokhiev.
Jérôme Gac
« Les Fiançailles au couvent », du 15 au 24 mai, au Théâtre du Capitole,
place du Capitole, Toulouse. Tél. 05 61 63 13 13.
Rencontre avant la représentation, 19h00.
Conférence : «Prokofiev et l’apolitique», lundi 11 mai, 18h00.
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photo © Patrice Nin