Reprise au Théâtre du Capitole d’une production toulousaine de « Tristan et Isolde » signée Nicolas Joel, avec le ténor Robert Dean Smith et la soprano Elisabete Matos.
Production du Théâtre du Capitole créée en 2007, « Tristan et Isolde » de Richard Wagner est de nouveau à l’affiche à Toulouse. Mythe issu d’une légende celtique, l’histoire de Tristan et Isolde est celle d’un homme amoureux d’une jeune femme pourtant promise à un roi. Concepteur des décors et des costumes, Andreas Reinhardt évoque «l’extrême simplicité de l’histoire imaginée par Wagner. Il a réduit le mythe à sa plus simple expression, jusqu’à l’abstraction, qui a justement été au départ de ma réflexion». Portée à la scène au Théâtre royal de la cour de Bavière à Munich, en 1865, cette partition audacieuse et incandescente a imprimé sa marque dans l’histoire de l’opéra. Pour le metteur en scène Nicolas Joel, «la fascination qu’exerce « Tristan et Isolde » est très compréhensible, ne serait-ce que le fameux “accord de Tristan” sur lequel débute le prélude et ensuite l’exaltation de la nuit d’amour du deuxième acte. Ce sont pour tout mélomane non seulement des points de repères mais aussi une véritable expérience dans une vie d’amoureux d’art lyrique».
À propos de sa mise en scène poétique et épurée, Nicolas Joel avoue: «J’ai le souvenir d’un spectacle dans lequel j’ai réussi à mettre sur scène des éléments qui m’ont toujours fasciné à l’audition de « Tristan » et que j’ai rarement vus sur scène, je parle des éléments de nature cosmique que j’entends autant dans la musique que dans le texte. Je veux parler plus particulièrement de la mer et de la nuit. Je trouve que ce spectacle donne à voir tout cela de façon moderne et convaincante à la fois. D’ailleurs je tiens à souligner ici la prouesse technique des techniciens du Capitole pour ce premier acte, qui se passe sur une scène articulée entièrement mouvante à l’image des vagues.» Le chef allemand Claus Peter Flor dirige l’Orchestre du Capitole, retrouvant la fosse de l’opéra toulousain après y avoir conduit « Hänsel et Gretel » de Humperdinck, « Madame Butterfly » de Puccini, « la Flûte enchantée » et « les Noces de Figaro » de Mozart.
Robert Dean Smith interprète le rôle de Tristan, après ses performances toulousaines en Empereur dans « la Femme sans ombre » de Richard Strauss, en 2006, puis dans le rôle-titre d’ »Andrea Chénier » d’Umberto Giordano, en 2009. Pour le ténor américain, «l’une des grandes difficultés réside essentiellement dans la longueur du rôle. Même si le chanteur possède une bonne et solide technique, le temps qu’il passe à chanter est terrible. La tessiture n’est pas aussi tendue que celle de « Tannhäuser », ni même celle de Walther dans « les Maîtres chanteurs de Nuremberg ». Mais entre la longueur du rôle et la palette immense des émotions exigées par la musique, ne serait-ce que dans l’acte III, où toutes les émotions humaines semblent passer par le prisme de la voix, on a ici l’Everest des rôles de ténor ! Wagner lui-même savait que ce rôle avait de quoi rendre fou, l’interprète, mais aussi le public !».
Isolde aura les traits de la soprano portugaise Elisabete Matos. Celle-ci est également attendue à Toulouse, à la fin de la saison, dans le rôle-titre de « Turandot », de Puccini. Fameux interprète des rôles du répertoire wagnérien, la basse Hans-Peter Koenig portera la couronne du Roi Marc. Déjà appréciés sur la même scène en 2012 dans le rare « Rienzi » de Richard Wagner, le baryton Stefan Heidemann et la mezzo-soprano Daniela Sindram complètent la distribution. Cette dernière constate : «La musique, dans « Tristan et Isolde », n’est plus seulement un arrière-plan, comme c’est encore très souvent le cas dans l’opéra à l’italienne de l’époque, où le chant est très nettement mis en valeur. Wagner arrive à créer un sentiment de fondu infini entres toutes les lignes musicales, instruments et voix confondus, avec une manière totalement nouvelle d’utiliser les leitmotive. La musique dans cette œuvre “montre” l’action, décrit le drame, l’éclaire, l’analyse, le rend palpable bien au-delà des simples mots car elle donne à sentir le nondit, l’impossible, l’inconscient… Comme si la musique en savait plus sur les personnages que les personnages eux-mêmes, d’une certaine manière. C’est prodigieux, extrêmement captivant – et c’est la promesse d’une soirée pleine d’émotion et de passion !»
Jérôme Gac
Du 28 janvier au 11 février, au Théâtre du Capitole, place du Capitole, Toulouse.
Tél. 05 61 63 13 13.
Introduction au spectacle, avant la représentation, 17h00.
Conférence : «L’ivresse dans « Tristan et Isolde »», par André Tubeuf,
mardi 27 janvier, 18h00, au Théâtre du Capitole (entrée libre).
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photo © Patrice Nin