Pour son spectacle des 21 et 22 janvier, la série Présences Vocales mêle le cinéma de légende à la musique d’aujourd’hui. Odyssud accueille l’œuvre hors norme du compositeur américain Philip Glass, La Belle et la Bête. Il s’agit là d’une sorte d’opéra pour ensemble et film, conçu en 1994 sur un livret (en français) du compositeur d’après le scénario du film éponyme et légendaire de Jean Cocteau sorti en 1946. C’est le deuxième volet d’une trilogie en hommage au poète français après Orphée (1993) et avant Les Enfants terribles (1996).
Philip Glass, l’un des fondateur de l’école américaine de musique répétitive, et/ou minimaliste, a eu l’idée de supprimer la bande sonore originale du film de Cocteau, y compris les voix des acteurs, pour y insérer sa propre musique et les voix des chanteurs. Dans le but de faire correspondre à la perfection le chant avec les mouvements des lèvres des acteurs sur l’écran, il a ainsi transcrit l’intégralité des répliques et procédé à un repérage méticuleux afin que la musique épouse parfaitement l’image. Après avoir chronométré chacun des mots des dialogues du film, par repérage électronique de la pellicule, et les avoir replacés dans la partition, Glass a synchronisé musique et film à l’aide d’un ordinateur qui, chargé de trier les retards et les avancées des paroles dites et chantées, a recalculé les signaux numériques de la bande audio sur le circuit numérisé du film. La Belle et la Bête apparaît donc comme un véritable opéra pour film, voix et orchestre. Sa musique se pare d’un romantisme inhabituel pour célébrer ce chef-d’œuvre de l’onirisme. Grâce à la parfaite synchronisation réalisée, les quatre chanteurs présents sur scène offrent leurs voix aux acteurs. Philip Glass n’ayant conservé que les images, il transforme les dialogues originaux du film en parties chantées, elles aussi en français, conservant ainsi l’intelligibilité des dialogues. Cette œuvre étrange devient ainsi un opéra à part entière dont la couleur musicale est proche de celles de Ravel, Debussy ou Fauré. Cocteau avait orné ce conte de fées d’images à la Vermeer : Glass ajoute sa propre touche d’illusion aux trouvailles visuelles du film, démultipliant la féérie de ces luminescences d’outre-tombe en tissant des soieries électroniques venant comme autant d’ombres portées de l’aura qui entoure chaque scène.
La réalisation scénique (sur trois plans différents : le film projeté sur un grand écran, les chanteurs sur une scène devant l’écran et les musiciens au premier plan) nécessite à la fois précision et synchronisation de la part de l’orchestre et des chanteurs.
L’œuvre a été jouée plus de 90 fois dans le monde, notamment à l’Académie de Musique de Brooklyn de New York le 7 décembre 1994 pour la première américaine et à la Cité de la musique de Paris le 17 janvier 2003 pour la première française.
La distribution réunie à Odyssud par Présences Vocales rassemble le Philip Glass Ensemble (6 instrumentistes), sous la direction de Lisa Bielawa, et les quatre chanteurs : Hai-Ting Chinn, Marie Mascari, Gregory Purnhagen et Peter Stewart. Signalons que le spectacle, chanté en français, est néanmoins sous-titré en français.
Serge Chauzy
Une Chronique de Classic Toulouse
Odyssud – mardi 21 janvier et mercredi 22 janvier 2014
Renseignements et réservations :
– Odyssud : 05 61 71 75 15
– Théâtre du Capitole : 05 61 63 13 13
– Théâtre Garonne : 05 62 48 54 77
– Collectif éOle : 05 61 71 81 72