22 octobre 2012. Evénementiel bien sûr, dès l’entrée en salle de cette foule de musiciens qui, en grappe, vient prendre possession du plateau sous déjà, des salves d’appaudissements nourris. Un public médusé se demandant bien comment chacun pourra ensuite jouer de son instrument. Quatorze contrebasses, il faut les caser ! Seize premiers violons aussi, et tout à l’avenant. Pas une seule note encore de jouée, et déjà une forme de joie communicative semble s’installer. Rare !
Richard Strauss, “fan“ des grands orchestres, n’aurait jamais imaginé son Don Juan interprété par plus de cent trente musiciens. Et quel Don Juan ! Un chef, Christian Vasquez, à peine plus âgé que les membres de sa phalange, digne du célèbre Fritz Reiner, conduisant le héros au faîte de sa quête dans ce fameux tourbillon sonore pour le retrouver anéanti dans les derniers faibles accords de mi. Une débauche d’énergie sur l’estrade, un orchestre galvanisé, des “élèves“ attentifs au visage comme illuminé. Il est vrai qu’ils jouent sous le regard de “Dieu le Père“, José Antonio Abreu, le vénézuélien, pianiste, éducateur et économiste, fondateur charismatique du “Système national d’orchestres de jeunes et d’enfants au Venezuela “ dont fait partie leur propre formation.
« Un orchestre est synonyme de joie, motivation, travail en équipe, ambition. » J. A. Abreu. Exactement ce que chacun d’entre nous semble éprouver à la vue d’un tel “spectacle“.Avouons-le, nous avions quelques craintes dans les interventions des solistes. Eh bien, ils nous ont bien eu. Pas un seul instant de panique, pas un seul léger trouble, d’où des ovations à répétitions.
Et qu’aurait donc penser Leonard Bersntein de ses Danses symphoniques tirées de West Side Story ? Des allegros comme des adagios ? De cette fougue comme de cette concentration permanente ? De Somewhere au Mambo en passant par Cool, cool et Rumble, toutes ces pièces semblent écrites pour le Simon Bolivar ou le Teresa Carreño.
Quant à Tchaïkovski, toujours prisonniers de ces états d’âme divers et variés, sûr qu’il aurait adhéré à 100% à la prestation d’une telle formation. Il n’aurait pu qu’être admiratif devant la qualité des cuivres si sollicités dans les dernières mesures. L’œuvre se prêtait d’ailleurs fort bien à une exécution par une phalange aussi nourrie.
Quant aux bis, Quatre ! pour faire monter la température ! Si les musiciens s’en donnent à cœur joie, les spectateurs, itou. Ils se battront presque pour récupérer au moins une veste aux couleurs vénézuéliennes, veste enfilée par chaque musicien, en quelques secondes dans une salle plongée un bref instant dans le noir, veste ensuite offerte au public, de préférence aux enfants présents, mais disputée aussi par quelques adultes !!
Un régal pour les oreilles, et de la joie pour les yeux. Après tout, la chose n’est pas si fréquente au cours d’un concert dit de musique classique pour qu’on oublie de la citer. Preuve en est encore que les concerts se suivent à la Halle, mais ne se ressemblent pas !
Michel Grialou
Video : Grands Interprètes présente le Teresa Carreño Youth Orchestra of Venezuela à la Halle aux Grains de Toulouse le 22/10/2012