« Les passions, qu’elles soient ou non violentes, ne doivent jamais être exprimées de façon à susciter de l’aversion, et, tout comme la musique, dans les situations les plus terribles, ne doivent jamais offenser l’oreille mais au contraire plaire à l’auditeur, ou, en d’autres termes, ne doivent jamais cesser d’être de la musique… » G. Puccini
En réponse, d’abord à un participant sur le blog de La Dépêche du 16 avril au niveau de l’article, « Autour de Madame Butterfly à la Halle aux grains », participant qui se signale par un commentaire plutôt lapidaire mais surtout, présentant inexactitudes et, il faut bien le dire méconnaissances.
Tout d’abord, on pourra reprendre lecture de mon annonce concernant la production.
Vous dites Pinkerton faible ! Nous n’avons sûrement pas entendu la même distribution. Le roumain Teodor Ilancai a exactement le timbre exigé par le rôle, un ténor “puccinien“ tout à fait convaincant, aussi bien à la générale mercredi que le soir de la première qu’enfin dimanche, encore mieux. Bien plus convaincant pour moi qu’en Rodolfo en octobre 2010 au Capitole. Un aigu sans difficulté, bien assis, capable de monter jusqu’au si bemol sans brailler, un contre ut dans le duo d’amour assuré, et tout le médium nécessaire, car il n’y a pas que des aigus. Il est aussi très satisfaisant dans la présence scénique.
L’orchestre ? Non pas trop fort mais tout simplement un dosage difficile entre la fosse et le plateau au vu de la configuration de la salle, une difficulté qui n’aurait pas dû vous échapper. Plus, une réverbération contre les panneaux du fond de scène. Alors, tout dépend de la situation de votre fauteuil, si vous étiez en 1ère GAL A dans les premiers rangs d’accord, mais ensuite, sur les côtés et aux étages, l’orchestre n’a pas pu vous gêner. Vous n’ignorez pas, j’espère, Monsieur le pseudo “boulanger“, que la musique de Madame Butterfly est souvent opulente, et que les moyens musicaux occidentaux doivent se compléter de références musicales japonaises, même si on peut repérer quelques facilités dans l’écriture. Mais, ni vous, ni moi, n’allons nous permettre de “juger“ un tel résultat. Pour ma part, je reconnaîtrais sans réflexion trop longue, que Puccini savait tout de même “trousser“ une partition sur un livret donné dans ses opéras ! Avez-vous remarqué les excellentes interventions des solistes de l’orchestre, tout comme la prestation de la fosse sous la direction de Claus-Peter Flor ?!
Si vous n’avez que le terme “assurait“ pour qualifier la performance vocale et scénique de Cio-Cio-San, c’est maigre, et donc, guère intéressant, car ce fut une prestation éblouissante de la soprano dramatique chinoise Hui Hé, tant sur le plan vocal que sur la ligne musicale d’un bout à l’autre, sans parler de la maîtrise parfaite du jeu de scène, sans faute de goût, sans ostentation, en un mot pas une poupée qui geint pour faire pleurer la salle. Il ne vous a tout de même pas échappé que cette jeune femme, dix-huit ans à la fin, meurt en se faisant hara-kiri. L’héroïne, c’est elle, et les hommes ne sont guère glorieux, ici.
Enfin, les chœurs dont vous vous plaignez. Dans leur intervention au passage à la nuit puis au jour, ces chœurs doivent intervenir en coulisses, et le niveau sonore rendu correspond rigoureusement à ce que Puccini exigeait. (derrière, dans le lointain, bouche fermée). Nous sommes donc, très loin de ce qui constitue votre pointe d’ironie sur de prétendus économies de costumes !!
Enfin, les seuls points de comparaison que vous pensez avoir pour apprécier de votre succint commentaire, ce serait grâce au fait que cet opéra est souvent donné à Toulouse. Sur Toulouse, le seul point de comparaison que vous pouvez vous permettre, c’est sur les distributions car, Butterfly a été donné auparavant en 2004, mais encore en 1999, et aussi en 1996, et toujours dans la même mise en scène ! Celle de Nicolas Joël, suffisamment intéressante pour avoir été reprise trois fois. Pas mal quand même. J’espère que pour comparer, vous ne remontez pas jusqu’en 1985, une “produc“ calamiteuse, ou plus loin encore, 1981, en tout point affligeante.
A vouloir faire court, vous en avez oublié une fort méritoire Susuki, la mezzo albanaise Enkeledja Shkosa, qui chante le rôle très souvent sur d’autres grandes scènes tout comme Hui Hé. Et, pour ma part, je n’oublierai pas un excellent Sharpless, le baryton Trevor Scheunemann.
J’aurai donc fait un peu plus long que vous, Monsieur le bloggeur anonyme, non pas pour un challenge, simplement pour tenter d’effacer vos erreurs, vous apprendre, peut-être, si vous me lisez sur ce site, et très modestement, quelque chose, mais aussi et surtout pour encourager fortement les spectateurs à se rendre à la Halle, ceux qui ne connaissent pas, mais aussi ceux qui l’ont déjà vu et ne voudraient pas faire l’effort d’y revenir, se privant alors d’un magnifique plateau .
Michel Grialou
Théâtre du Capitole
photos © David Herrero