Dans le lot de photographies que j’ai pu prendre de Jean-Louis Trintignant ce jour-là, celle-ci fut la seule qui retint mon attention.
Les yeux clos, l’air tranquille, voir absent.
J’ai dramatisé l’image par le traitement.
Et au final, c’est comme un portrait de lui mort de son vivant, que j’apporte, seule la transpiration aux tempes atteste de la vie.
Ma récente série sur les Gisants à Burgos et Salamanca vient me le rappeler.
j’ai abordé cela dans un autoportrait, où j’avais superposé trois fois mon visage photocopié et joue des couleurs pour marquer chacun comme une étape de la vie.
En haut à droite et bout du nez, vie foetale, à gauche en jaune-brun, déjà un peu âgée, la peau marquée de taches. Au centre en bleu, l’oeil clos et couleur de lividité.
Mais véritablement j’avais eu originellement ce parti pris en photographiant trois photographes célèbres ( Jean DIEUZAIDE, Wayne MILLER, Don Mac CULLIN) lors d’ une conférence.
Comprenant que je n’allais pas faire de portrait correct, je choisis de photographier leurs mains parce qu’elles sont révélatrices d’une vie, et les préférai yeux fermés pour faire un oxymore.
Mais le portrait c’est un moment d’échange pour capter l’essence de quelqu’un, un instant de vie; révéler ce qu’il laisse transparaitre ou apparaitre, l’impression qu’il dégage ou l’émotion qu’il diffuse.
Surprendre le sujet, le diriger sur ses pensées personnelles pour les révéler afin que les émotions qu’elles produisent se fixent sur l’image.
…un sourire pour le plaisir de pratiquer un sport, …un moment d’intermède et le visage se relâche avec l’esprit qui se perd dans une pensée, ou une apparence forte et maitrisée qui ne laisse place à rien d’autre que cette identité affirmée et harmonieuse, ou bien un masque, un costume.
certains visages sont un feu d’artifice d’expressions autant que d’autres ont bien peu de traits qui bougent.
je laisse se positionner le sujet, naturellement il se positionne face à moi, sur la croix au sol où je l’ai dirigé pour lui donner un repère en lui expliquant pourquoi et l’incidence des flashes.
il est debout, il garde ainsi une aisance, une mobilité, une liberté sans risque d’avachissement qu’une posture assise lui offrirait.
3 images, on regarde ensemble, je recale si nécessaire la mesure de lumière, et prend conscience de sa façon de rendre dans le cadre pour m’adapter.
Quelques vues supplémentaires, cette fois-ci je mets le boitier dans les mains du sujet, je lui signifie une confiance, il peut se sentir plus maître de son image. un contact physique de fait est établi.
je lui demande son avis.
Je propose quelques vues avec une autre posture, de trois quart, expliquant le dynamisme que cela amène.
En parallèle depuis le début, nous faisons connaissance, je cherche la pensée agréable, la source de bonheur de la personne.
je lui montre encore les clichés pris et lui demande si elle se reconnait, si l’image qu’elle voit lui correspond.
Voici ma méthode pour des portrait d’entreprise, réalisés sur place, un quart d’heure par personne étant nécessaire.
Bien sûr, il y a toutes sortes de portraits.
Cette méthode peut valoir pour des portraits autres qu’en studio ou d’entreprise, mais on peut également faire un portrait de quelqu’un rencontré dans la rue, chez lui, et avoir l’image très brute de l’expression de son visage résultant de l’agression du facteur étranger que l’on représente dans son espace vital si la démarche recherche l’étrange, le désaccord, la surprise le rejet…
on dit PRENDRE un portrait mais cela se vole, est offert, se maquille, s’interprête, se renforce par l’intéraction avec le contexte.
J’ai aimé faire des photos dans la rue comme un portrait d’un endroit, un instantané des gens croisés. C’est un bon exercice, à la focale de son choix (la proximité, l’implication, sa propre exposition et le résultat en dépendent), cela à pu m’offrir de belles surprises.
L’analyse et la maitrise de ces cas de figures peuvent permettre d’aborder la mise en scène de manière pertinente. Comprendre l’articulation des phénomènes naturels donne le moyen d’être plus juste dans la reproduction, l’artificiel.
A voir enfin : FACES , visages de peintures, sculptures etc…