Neuvième édition d’Universcènes, festival de théâtre universitaire multilingue à la Fabrique de l’Université Toulouse Jean-Jaurès.
La Fabrique ouvre ses portes pendant trois semaines au théâtre universitaire multilingue: tout un monde d’écritures nouvelles et de propositions théâtrales en version originale surtitrée ! Le festival Universcènes trouve sa source en 1995, lorsque naquirent les Rencontres de théâtre hispanique contemporain, emmenées par le département d’espagnol et la compagnie Les Anachroniques. En 2001, c’est au tour de la compagnie germaniste la Vieille Dame de se joindre au projet avec la création des Rencontres de théâtre allemand contemporain. Enfin, en 2007, les Rencontres européennes de théâtre universitaire réunissent les théâtres en allemand, anglais, espagnol, italien et polonais, devenant ainsi au Théâtre Sorano le festival Universcènes.
Pour sa neuvième édition, Universcènes accueille aujourd’hui les orientalistes et les lusistes à La Fabrique – site dédié aux arts contemporains créé en 2009, à l’Université Toulouse Jean-Jaurès. Soubassement du festival : la collection Nouvelles Scènes. Elle publie chaque année aux Presses Universitaires du Midi, en bilingue français, des œuvres théâtrales novatrices (allemande, anglaise, polonaise, espagnole, italienne, arabe et portugaise) qui feront l’objet d’une mise en scène en version originale surtitrée. À l’université, le festival a entraîné la fondation du CeTIM (Centre de Traduction, d’Interprétation et de Médiation linguistique) qui forme aux surtitrages et à la langue des signes française (LSF).
«Universcènes dont les enjeux sont scientifique, éditorial et artistique est un cas unique en Europe», s’enthousiasme Hilda Inderwildi, enseignant-chercheur à l’université Toulouse Jean-Jaurès et directrice des Nouvelles Scènes allemand. «Le challenge est de faire en sorte que le public apprécie la matière “langue”. La langue est ici un personnage à part entière», assure Céline Nogueira, metteuse en scène de la compagnie anglophone Les Sœurs Fatales. Depuis deux ans, les théâtres anglais et espagnol ont également intégré la LSF. Pour sa part, la metteuse en scène a choisi de jouer avec la présence de ces interprètes sur le plateau. Ils sont des protagonistes à part entière de « Dunsinane » (photo), la pièce de David Greig : «Je leur ai imposé un training physique pour qu’ils aient autant de présence scénique que les comédiens !», s’amuse Céline Nogueira dont le spectacle fait aussi entendre le turc et l’indien !
Les comédiens sont des étudiants de sections diverses, dont la motivation principale est de travailler en langue étrangère. Beaucoup sont issus du programme d’échange Erasmus. Certains ont embrassé par la suite une carrière professionnelle. Comme l’affirme Hilda Inderwildi, «le festival Universcènes est une pépinière de talents, il vise à faire émerger des comédiens». Céline Nogueira poursuit : «Ils sont prêts à tout essayer, ils sont généreux. Ils n’ont pas d’ego, comme certains comédiens professionnels. Ils ont l’innocence des enfants. C’est stimulant pour le metteur en scène.» Si ce dernier saura exploiter et révéler les talents individuels de chacun, il lui faudra aussi souvent s’adapter au casting. Ainsi, cette année, la prédominance féminine des germanistes, dans la pièce « Privatleben », pousse Thomas Niklos à faire des choix de mise en scène audacieux.
«Nous sommes obligés à l’inventivité ! Les moyens économiques, le casting, la gestion du temps et les problèmes de disponibilité des étudiants deviennent une force de proposition et d’enthousiasme qui nous amène à nous dépasser», déclare la passionnée Céline Nogueira. Aussi éphémères que leurs acteurs, les spectacles font du festival un évènement rare, riche en formes et en univers dramatiques. Reste la collection Les Nouvelles Scènes augmentée récemment de textes plurilingues (1) pour prolonger le voyage dans ce grand théâtre du monde.
Sarah Authesserre
une chronique du mensuel Intramuros
(1) collection Nouvelles Scènes Linguae
Du 7 au 22 mars, à La Fabrique de l’Université Toulouse Jean-Jaurès,
5, allée Antonio Machado, Toulouse. (entrée libre)
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photo : « Dunsinane » © Lena Mauveaux
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