À la Halle aux Grains, Kazuki Yamada dirige l’Orchestre national du Capitole de Toulouse dans « Jeanne au bûcher » d’Arthur Honegger et Paul Claudel, avec Marion Cotillard dans le rôle de Jeanne d’Arc.
Il est l’un des représentants de cette nouvelle vague de jeunes chefs d’orchestre qui n’en finit par de déferler depuis quelques années. Né au Japon en 1979, Kazuki Yamada (photo) est déjà un artiste très demandé: Chef principal invité de l’Orchestre de la Suisse Romande et de l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, il est aussi le Chef principal de l’Orchestre philharmonique du Japon. Habitué de la Halle aux Grains, la redoutable précision de ses interprétations fascine et éblouit depuis ses débuts à la tête de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse en 2012, dans la « Symphonie fantastique » d’Hector Berlioz. Il est un grand amoureux de la musique française des XIXe et XXe siècles, c’est donc tout naturellement que la phalange toulousaine l’accueille chaque saison pour défendre ce répertoire dont elle s’est fait une spécialité durant les longues années Plasson(1). On attend cette saison Kazuki Yamada dans deux programmes à la Halle aux Grains, dont « Jeanne d’Arc au bûcher » qu’il dirigera par ailleurs à la Philharmonie de Paris avec l’Orchestre de Paris.
Œuvre poignante créée en 1938, « Jeanne d’Arc au bûcher » est un grand oratorio mystique composé par Arthur Honegger sur un texte de Paul Claudel. Le compositeur racontait à propos de cette collaboration : «Ce que je voudrais indiquer, c’est le soutien musical qu’un poète peut donner à son collaborateur. C’est le cas de Claudel, et je puis dire que pour chacune des œuvres où j’ai eu le bonheur de travailler avec lui, c’est lui qui m’a indiqué scène par scène, presque ligne par ligne, la construction musicale de la partition. Il sait faire comprendre l’atmosphère, la densité, le contour mélodique qu’il a pensés et que le compositeur n’a plus qu’à exprimer dans sa langue… Tout au long de l’ouvrage, j’ai reçu les suggestions du poète, et chacun peut se rendre compte de l’aide et de l’inspiration que cela peut fournir au musicien… Il suffit d’écouter Claudel lire et relire son texte ! Il le fait avec une telle force plastique, si je puis dire, que tout le texte musical s’en dégage, clair et précis pour quiconque possède un peu d’imagination musicale. Si à l’exécution il se dégage pour l’auditoire une émotion, il n’est que juste d’en rapporter la plus grande part à Paul Claudel, dont je n’ai ai fait que suivre les indications en mettant à son service mes connaissances techniques pour tenter de réaliser de mon mieux la musique qu’il avait lui-même créée».(2)
Compositeur de plusieurs musiques de film, notamment pour le « Napoléon » d’Abel Gance, Arthur Honegger reconstitue dans « Jeanne d’Arc au bûcher » les derniers instants de la vie de la pucelle d’Orléans. Attendant la mort sur le bûcher, l’héroïne s’adresse à frère Dominique et revient sur les principaux épisodes de sa vie. L’œuvre est découpée en onze scènes : Les voix du Ciel ; Le Livre (lecture des actes du procès par frère Dominique) ; Les voix de la Terre (la foule crie «qu’on la tue, qu’on la brûle !» ; Jeanne livrée aux bêtes (description du tribunal sur une musique jazz parodique) ; Jeanne au poteau ; Les Rois ou l’invention du jeu de cartes (complots et machinations dont Jeanne sera la victime) ; Catherine et Marguerite (le sort de Jeanne est jeté) ; Le Roi qui va-t-à Reims (chansons populaires) ; L’épée de Jeanne (Jeanne est porteuse d’espérance, de foi, de cette joie qui la fortifie) ; Trimazo (Jeanne revoit ses amis d’enfance en quête d’œufs de Pâques) ; Jeanne en flammes (le ciel s’entrouvre pour accueillir Jeanne délivrée de ses chaînes, chant du rossignol).
Cette impressionnante fresque musicale sera portée par Marion Cotillard (photo) dans le rôle de Jeanne d’Arc. L’actrice connaît bien cette œuvre pour l’avoir interprétée plusieurs fois sur les scènes internationales. La voici pour la première fois en France à l’occasion d’une série de performances avec Kazuki Yamada, à Monaco et à Toulouse en version symphonique, puis à Paris en version scénique. Elle sera entourée, pour les rôles parlés, de deux comédiens de la Comédie-française : Éric Génovèse (frère Dominique) et Christian Gonon (récitant). Les rôles chantés seront notamment assurés par les sopranos Anne-Catherine Gillet (la Vierge) et Simone Osborne (Marguerite), la contralto Faith Sherman (Catherine), le Chœur et la maîtrise du Capitole.
Jérôme Gac
Samedi 14 février, 20h00, à la Halle aux Grains, place Dupuy, Toulouse.
Tél. 05 61 63 13 13.
Et aussi :
Concerto n° 1 de Brahms, par A. Laloum, sous la direction de K. Yamada
samedi 14 mars, 20h00, à la Halle aux Grains, place Dupuy, Toulouse.
Tél. 05 61 63 13 13.
dimanche 15 mars, 20h30, au Grand-Théâtre d’Albi,
place de l’Amitié entre les Peuples, Albi. Tél. 05 63 38 55 56.
(1) Michel Plasson a dirigé l’Orchestre du Capitole de 1968 à 2003
(2) propos rapportés par le compositeur Jean Giroud en 1976
–
photo: K. Yamada © Marco Borggreve