« La French », un film de Cédric Jiménez
Le trafic de la drogue est une vieille histoire française (voir Indochine…). Aussi n’y a –t-il rien de moins étonnant que, dans les années 70/80 du siècle passé, le dit trafic ait pris pied dans le Sud de la France, sous l’emprise de la mafia corse qui avait largement infiltré la police marseillaise. Voire plus si l’on en croit une scène étonnante qui met Gaston Deferre, alors maire de la cité phocéenne, sous un éclairage peu flatteur. Le second opus de Cédric Jimenez fait un focus sur les relations, si l’on peut dire, qui s’installèrent assez rapidement après sa nomination entre le juge Michel et le parrain local, Gaëtan Zampa. Ce dernier étant devenu le pivot du trafic entre Europe et USA, l’objectif du juge était donc de l’arrêter. Trois balles tirées à bout portant stopperont cette ambition le 21 octobre 1981. En fait pas tout à fait car le démantèlement du réseau, pour de multiples raisons, interviendra peu de temps après. Zampa arrêté se suicidera dans sa prison en 1984. Quand la réalité devient la meilleure des scénaristes. C’est l’affrontement entre ces deux hommes qui est au centre de ce film de 2h15. Dans un casting de luxe concernant les seconds rôles, deux stars filmées plein cadre en permanence tentent de monopoliser l’attention. Sans y parvenir vraiment. Ce sont bien sûr Jean Dujardin (Michel) et Gilles Lellouche (Zampa). Face à deux rôles écrasants, ils ont du mal. Beaucoup de mal. Le premier cité se contente de ses rictus habituels, qui peuvent faire sourire dans une parodie de OSS 117, c’est vrai. Ici ils sont déplacés. La question est de savoir s’il ne se lâche pas, s’il est trop contraint par le metteur en scène (j’ai des doutes…), ou bien plus simplement si, comme tout le monde, il tangente ici l’étendue supposée de son talent. Le résultat est là cependant. Clairement il plombe à lui seul ce film dont les qualités, ou plutôt les « hommages » au film policier des grands de ce genre, sont légions. Gilles Lellouche n’est pas mieux et semble même un rien crispé. Un film taillé à la mesure d’acteurs hyper bankables. Soit. Les nouvelles mesures que souhaite mettre en place le CNC devraient nous débarrasser de ce genre de production dont l’intérêt, au sens propre du terme, n’est que trop évident. Demeure l’histoire tragique de ce juge. Rien que pour cela et la forme d’hommage qu’il constitue, ce film devait être fait.
Robert Pénavayre