Plongée dans l’univers mystérieux du culturisme
Une précision s’impose d’emblée, le dernier opus de Roschdy Zem n’est pas un film SUR le culturisme. Non, il se passe DANS le monde des bodybuilders. Nuance. En fait nous voilà en présence de deux films. L’un traite d’un drame social, l’autre est une plongée dans la sphère confidentielle des passionnés du muscle et du corps parfait. Pour le drame social, voici Antoine, une petite frappe vivant chez sa mère d’expédients pas très nets. Il a réussi à mettre en place une pyramide de Ponzi, procédure financière frauduleuse rendue tristement célèbre par le dénommé Madoff. Il le fait à la petite semaine certes et sans le « génie » du susnommé. Résultat, il doit de l’argent à tous les voyous de son quartier. Ceux-ci commencent à grincer des dents. Une solution s’impose pour sa mère (Dominique Reymond, toujours aussi juste) et le frère aîné d’Antoine (Nicolas Duvauchelle, épatant comme à son habitude, même dans un second plan). Cette solution, c’est un genre d’exfiltration de la zone dangereuse. Direction Saint Etienne et la maison paternelle dans laquelle Antoine va rencontrer Vincent, son père qu’il n’a quasiment pas connu. Surprise, Vincent tient un club de culturisme et a atteint dans la discipline une reconnaissance mondiale, montant ainsi sur les plus hautes marches des podiums. Problème, Vincent est en préparation d’une compétition. Il veut bien accueillir son fils et même lui donner un petit boulot dans son club, mais il est impératif qu’il se fasse discret. D’ailleurs sa compagne du moment (Marina Foïs, stupéfiante de naturel dans un milieu qu’elle ne connaissait pas du tout) lui explique bien les règles du jeu.
Le second film entre alors en scène de manière très habile car, dans le même temps qu’Antoine et Vincent vont se rapprocher, Roschdy Zem (qui joue également le coach de Vincent) pénètre, mine de rien, les arcanes de ce milieu : entraînements, régimes, sacrifices, douleurs, addiction, passion. Tout est authentique et pour cause, Vincent n’est autre que Yolin François Gauvin, l’un des plus médaillés bodybuilders du monde. S’il a été hésitant à accepter ce rôle, il eût été dommage qu’il n’écoute point les conseils de son épouse l’incitant fortement à saisir une pareille chance. Ce grand taiseux au regard perçant fait ici une prestation (et non pas une composition) hallucinante de naturel. A ses côtés, Vincent Rottiers est un Antoine en permanence au bord du gouffre. Il transpire le danger. A la fin du film, après une péripétie que l’on attend avec impatience (je n’en dis pas plus…), Antoine échange avec son père des regards chargés de significations. Eh oui, au milieu des haltères, des corps huilés et du désordre, l’amour a fait son chemin. Roschdy Zem est décidément un réalisateur très subtil.
Robert Pénavayre
Vincent Rottiers – L’écorché vif du cinéma français
A 28 ans, ce jeune comédien français a déjà épinglé sur son tableau de chasse pas moins de 28 longs métrages, quelques courts et moyens ainsi que des films pour la télévision ! Pas mal pour un gamin qui s’est formé à la dure école de la rue et qui décroche à 15 ans son premier rôle (Les diables, de Christophe Ruggia en 2001). C’est le début d’une grande aventure dans le monde du 7ème art, un univers qui va vite repérer son tempérament d’écorché vif à la Patrick Dewaere, son jeu instinctif et violent, son visage mutique, son regard impénétrable. Dommage qu’il ne fasse pas les tournées promotionnelles, il aurait été singulier de le rencontrer. Mais bon, c’est tout Vincent.