Il y avait belle lurette qu’il n’avait pas été question d’animation par ici.
Il faut dire que dans la masse gargantuesque des sorties, peu de propositions paraissent dotées d’intérêt … Trop de films d’animation sont uniformisés, proposent des scénarios similaires, cumulent (de mon point de vue en tout cas) les mêmes clichés : orgie de bon sentiment et de philosophie bon marché, débauche de chansons gnangnans, cascade de princesse blonde à chevelure abondante, inondation de mignons compagnons parlants à 4 pattes / 2 ailes / multiples nageoires … Entre les Cars, Planes, Raiponce, Princesse des neiges et autres Rio, on a souvent l’impression que le métier de l’animation ne s’adresse qu’à un public d’enfants trop idiots pour s’en rendre compte.
Alors, quand au milieu de l’avalanche animée l’un d’entre eux semble vouloir s’extirper du lot, il n’est que de mon devoir d’aller voir ce qui se passe.
Il était une fois un coupeur de bambou qui partait chaque matin prélever sa récolte quotidienne. Un jour, alors qu’il est entièrement absorbé à sa tâche, une lueur illumine la pénombre de la bambouseraie. S’approchant, intrigué, il découvre à l’intérieur d’une jeune pousse, une minuscule princesse.
Émerveillé par l’apparition, convaincu d’un signe des dieux, il décide de la ramener chez lui, où lui et sa femme l’élèveront comme leur propre enfant.
À peine arrivée dans sa nouvelle demeure, la petite princesse a tôt fait de se transformer en un dodu nourrisson qui, comme la plante dont elle est issue, grandit à une vitesse extraordinaire. Dans cet environnement aimant, au cœur de ce paysage de collines, de forêts et de champs, Pousse de Bambou va découvrir une existence heureuse en compagnie de Sutemaru et des autres enfants du voisinage.
Mais son père adoptif est convaincu qu’une destinée extraordinaire l’attend et qu’elle ne peut décemment pas grandir dans cette région reculée, telle une sauvageonne. Souhaitant en faire une véritable princesse que les bons partis se disputeront, il fait construire à grands frais un palais dans la capitale où la petite famille part s’installer.
Alors que son collègue Hayao Miyazaki annonçait il y a peu sa retraite, Isao Takahata (l’autre partie fondatrice du studio Ghibli), bien qu’âgé de 78 ans, ne semble pas du tout dans le même état d’esprit (grand bien nous fasse).
Le vénérable réalisateur, père du Tombeau des lucioles et de Pompoko, se renouvelle une fois encore en adaptant un conte traditionnel japonais, » le coupeur de bambou « .
Pour ce faire, Isao Takahata prend appui sur un dessin magnifique, délicat comme une fleur de cerisier, léger comme la neige recouvrant le mont Fuji, dans lequel prend vie une petite princesse qui refuse de se plier aux normes de l’apparat, va faire tourner ses soupirants en bourrique, n’aspire qu’à retourner dans les montagnes qui l’ont vu naître, retrouver Sutemaru et vivre en harmonie avec les fleurs et les animaux.
Conte profondément naturaliste, accompagné de délicieuses et aigrelettes ritournelles (une bonne partie de la bande sonore a été composée par Joe Isaishi, un fidèle des productions de Miyazaki), Le conte de la princesse Kaguya est le plus long film produit par le studio Ghibli depuis Princesse Mononoké.
Si le travail autour du dessin et de l’animation est indéniable, cette longueur importante (près de 2 heures et quart) entraîne malheureusement un délitement du film sur la dernière demi – heure. Dommage …
Le conte de la Princesse Kaguya reste toutefois une très jolie histoire où chaque plan rend un hommage vibrant à la tradition des estampes, où chaque dessin est une merveille de pureté.
En vous remerciant.
Pierrette Tchernio