Une première pour le Théâtre du Capitole
Ce vendredi 23 mai 2014 est à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire du Théâtre du Capitole car c’est le jour qui voit la première diffusion en direct sur une radio d’un spectacle de cette illustre institution lyrique toulousaine. La radio, c’est Radio Classique et le spectacle, celui qui remporte en ce moment un beau succès : I due Foscari. Nous avons rencontré les deux décideurs de cette opération qui, normalement, ne devrait pas s’arrêter là : Etienne Mougeotte, directeur général de la chaîne radiophonique et Frédéric Chambert, directeur artistique du Théâtre du Capitole. Avant de leur donner la parole, précisons que la journée Radio Classique du 23 mai est entièrement consacrée à Toulouse, tant du point de vue économique que musical. Elle débuté à 7h du matin pour se terminer…à la fin du spectacle.
Frédéric Chambert, directeur artistique du Théâtre du Capitole
La retransmission d’un opéra en direct à la radio depuis le Théâtre du Capitole est-elle une première pour votre maison ?
C’’est à ma connaissance une première pour le Théâtre du Capitole. Les directs étaient quelque chose de fréquent à l’opéra dans les années 70/80 en France. Puis le procédé s’est considérablement réduit sauf dans des conditions spécifiques qui sont en particulier la présence d’une régie vidéo-son permanente dans le théâtre. Aujourd’hui cela est même devenu exceptionnel sauf dans des maisons comme l’Opéra de Paris pour ne parler que de la France. Radio Classique arrive donc sur cette captation avec ses propres moyens. Ce qui a de formidable pour l’auditeur dans cette opération c’est, tout d’abord, de donner l’impression, qui est en fait une réalité, de vivre pleinement l’événement artistique dans toute sa fragilité et son émotion. Cela n’a rien à voir avec l’enregistrement studio. Le direct rétablit ce rapport à l’exploit qui est totalement magique. Car je le dit haut et fort, chanter un opéra est un véritable exploit. L’artiste lyrique est un vrai funambule en équilibre sur ses cordes vocales. Dans ce type de retransmission la pression pour les chanteurs est d’autant plus forte qu’ils savent être entendus bien au-delà des murs du théâtre, par des centaines de milliers d’auditeurs. D’ailleurs, pour tout vous dire, certains artistes refusent le direct car il n’y a pas de filet de sécurité et ne souhaitent pas se surexposer dans ces conditions.
La genèse de ce projet ?
Très simplement, j’ai demandé un rendez-vous à la direction de Radio Classique et je me suis rendu à Paris pour les rencontrer et leur exposer mon souhait d’entamer une relation avec leur station. Nous nous sommes arrêtés sur la formule d’une journée entièrement consacrée à un événement, journée couronnée par la retransmission en direct d’un opéra depuis le Théâtre du Capitole. C’est un vrai partenariat entre nos deux institutions. Alors pourquoi Radio Classique ? J’écoute souvent cette radio et j’aime sa manière assez cash et sans chichis d’aborder la musique. Cela ressemble assez à la manière qu’a le public toulousain d’aimer l’opéra. J’ai orienté le choix de l’œuvre de cette journée vers un compositeur que connaît l’auditoire le plus large, Verdi en l’occurrence. Néanmoins c’est assez courageux de la part de cette radio d’avoir accepté car I due Foscari n’est pas nécessairement l’ouvrage le plus connu de ce musicien. A mon sens l’événement que constitue le direct rend le risque de ce choix plus acceptable, moins dangereux.
Où en est le Théâtre du Capitole en termes de politique audiovisuelle ?
C’est un pôle qui s’est beaucoup développé lors de ces deux dernières années. Le préalable était de disposer d’un accord-cadre avec l’ensemble des personnels artistiques permanents du Théâtre du Capitole. Ce fut l’un de mes premiers soucis en arrivant ici. Cela a pris du temps mais nous y sommes arrivés. Après, tous les champs des possibles étaient ouverts. Nous avons donc commencé avec Rienzi pour la télévision et un dvd. Ce sera la même chose pour La Favorite et Les Pigeons d’argile. Le ballet n’est pas oublié dans ces opérations puisque déjà Le Corsaire et La Bête et la Belle ont été enregistrés et la saison prochaine ce sera le tour de La Reine morte. Les accords ne sont pas encore totalement conclus mais il y a de fortes chances que Les Fiançailles au couvent et Le Bal masqué de la saison prochaine suivent le même chemin. Outre ces aspects, nous touchons là à une question de légitimité de l’art lyrique car, depuis que l’opéra existe se pose une question, celle de son financement. L’art lyrique est un genre luxueux au vu de son coût, il nous appartient donc de le faire partager au plus grand nombre. Une politique audiovisuelle incluant l’ensemble des médias, y compris internet, est donc pour moi un axe fondamental de ma mission. Puis-je ajouter que, pour notre maison, dont l’audience est forcément majoritairement régionale, c’est merveilleux de dépasser les frontières naturelles de notre public. La radio démultiplie l’audience en brisant les murs du théâtre. Donc inutile de préciser combien je souhaite développer et pérenniser ce partenariat avec Radio Classique.
Propos recueillis par Robert Pénavayre le 18 mai 2014
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