La saison 2013 / 2014 est particulièrement importante pour signer la place de l’opéra contemporain au Théâtre du Capitole, puisque ce Théâtre est le seul commanditaire de l’œuvre, et va en assurer aussi la création mondiale. Il s’agit de l’ouvrage : LES PIGEONS D’ARGILE de Philippe Hurel, sur un livret du romancier français Tanguy Viel. Les Pigeons d’argile est le premier opéra du compositeur et le livret est inspiré d’un fameux fait divers, l’histoire de l’américaine Patty Hearst qui défraya la chronique en 1975.
Pigeons d’argile ? mais pourquoi un titre pareil ? Vous en aurez l’explication, à la lecture du synopsis uniquement !
A travers ses personnages, Tanguy Viel questionne les thèmes de l’emprise idéologique sur la conscience humaine et la radicalité de l’action subversive. Librettiste et compositeur s’amusent des codes du roman et du cinéma noir américain, au gré d’une musique aux mélodies vocales assez « naturelles » malgré un environnement harmonique spectral complexe. Elle est écrite sans effet ou modification électronique.
La distribution est entièrement francophone. Tous les chanteurs ont déjà connus les planches du Théâtre. Ils défendront cette création sous la direction du chef italien Tito Ceccherini, défenseur de la musique contemporaine, avide de crétions mondiales, et dans une mise en scène de Mariame Clément, sa première au Capitole, grandement secondée par Julia Hansen pour les décors et costumes, et Philippe Berthomé aux lumières. Dans la fosse, l’Orchestre national du Capitole, et sur scène, les Chœurs du Capitole. Le spectacle est en langue française surtitrée, et se développe en un Prologue et trois Parties sur cent minutes.
Le spectacle est présenté dans le cadre du cycle Présences vocales par le collectif éOle, Odyssud, le Théâtre du Capitole et le Théâtre Garonne.
La création d’un opéra contemporain n’est pas une petite affaire et mérite quelques éclaircissements. Autant s’aider de quelques reportages réalisés directement auprès des principaux intéressés, à commencer par l’instigateur, et donneur d’ordre, j’ai nommé Frédéric Chambert, Directeur artistique de notre Maison d’opéra bien-aimée !!
Episode 1 : Créer un opéra : une aventure.
Interview de Frédéric Chambert, Directeur artistique du Théâtre du Capitole
Episode 2 : Des contraintes de l’opéra… pour un compositeur de musique contemporaine
Interview de Philippe Hurel, compositeur
Episode 3 : Ecrire un opéra
Interview de Tanguy Viel, librettiste
Le compositeur et le librettiste donneront une conférence le lundi 14 avril à 18h juste avant la présentation de la saison 2014/2015 à 20h
Comme à l’accoutumée et d’autant plus pour cette création, la rencontre d’avant spectacle aura bien lieu dans le Grand Foyer du Théâtre, à 19h pour chaque représentation donnée soit les 15, 18 et 22 avril à 20h. Autre représentation, le dimanche 20 à 15h.
Les personnages
Charlie, jeune fille mezzo-soprano
Toni, ami de Charlie baryton
Pietro, père de Tony, régisseur du domaine ténor
Bernard Baer, milliardaire baryton
Patricia Baer, fille de Bernard Baer soprano
La Chef de la Police contralto
Argument
Prologue
Des jeunes gens sortent d’un hangar et se précipitent dans une voiture. Il s’agit de Toni, le ravisseur, Charlie, son amie, et Patricia (fille du milliardaire Bernard Baer) qu’ils viennent de kidnapper. Ils tentent de s’enfuir mais leur voiture tarde à démarrer. La police arrive. Aux premiers coups de feu, un autre personnage sort du hangar : il s’agit de Pietro, le père de Toni, qui essaie de couvrir la fuite de son fils en tirant sur les forces de l’ordre. Un policier l’abat.
Acte I
Dans la propriété de Baer.
Charlie et Toni parlent de révolution. Non loin de là, Pietro s’occupe de lancer les pigeons d’argile pour le ball-trap. « Ces pigeons d’argiles, ce sont nommément les leurres que l’on lance lors des ball-traps. Des leurres ! Mais un spectateur francophone ne peut s’empêcher de faire deux associations d’idées : un pigeon, dans le langage vulgaire, est celui qui se fait avoir. Ici, les personnages ne sont-ils pas les premiers trahis, ceux-là mêmes qui voudraient changer le monde et se retrouvent devant des actes finalement bien vains ? L’autre, c’est le « colosse aux pieds d’argile, ce qui va d’une certaine manière dans le même sens. » Mariame Clément, metteur en scène.
Tandis que les convives font fête à leur hôte, ce dernier leur rappelle qu’il est parti de rien. Maintenant qu’il a fait fortune, il souhaite s’engager en politique. Quand il affirme que la lutte des classes n’est plus d’actualité, Toni et Charlie, en aparté, se récrient. Patricia Baer, la fille de Bernard Baer, paraît. À la tombée de la nuit, Toni et Charlie la kidnappent.
Acte II
Le décor découvre d’un côté un hangar, planque des ravisseurs, et de l’autre la maison de Baer, qui donne une conférence de presse. Pietro se rend compte que le ravisseur n’est autre que son propre fils Toni, et malgré ses scrupules de père, décide de le dire à la police. Réalisant qu’il leur faut de l’argent, mais refusant de lier leur kidnapping à une vulgaire demande de rançon, Toni décide de braquer une banque et tente de rallier Patricia à leur cause malgré l’opposition de Charlie. Pietro arrive alors dans le hangar et tente de convaincre son fils de se sauver avant que la police n’arrive. Charlie se rend compte que Toni et Patricia sont amoureux, impression qui se confirme quand Patricia finit par avouer à Toni qu’elle est désormais de son côté. Au lieu de s’enfuir, Charlie reste en retrait. Pietro tente de retarder les forces de l’ordre en leur tirant dessus, espérant ainsi que son fils ait le temps de fuir. Toni et Patricia parviennent à s’échapper, mais Charlie reste aux mains de la police.
Acte III
Trois lieux distincts : la propriété de Baer, une banque, un banc sur lequel se trouvent Toni et Patricia. La chef de police annonce à Monsieur Baer que Charlie, la complice, a parlé. Parallèlement, Toni et Patricia, rêvant d’un monde différent, décident de passer à l’action: ils entrent dans la banque pour la braquer. Mais ils sont aussitôt cernés par la police. Baer, en embuscade, attend que Toni sorte de la banque pour l’abattre. L’ayant vu, Charlie sort de la voiture de police et s’interpose. C’est elle qui reçoit la balle et meurt.
Note de Tanguy Viel, librettiste
« C’était pour moi la première fois que je faisais un livret d’opéra. Et comme en plus je n’écris pas de pièce de théâtre, c’était un exercice très nouveau. D’autant plus délicat que, même dans mes romans, il y a très peu de dialogues. Or ici, tout est dialogue. (…) Le fait de savoir que le texte serait mis en musique m’a beaucoup aidé. Il m’arrivait même d’imaginer moi-même des mélodies très simples qui permettaient aux phrases de venir et j’avais l’impression d’être plus libre que si j’avais écrit du théâtre. Nous avons bien sûr beaucoup discuté avec le compositeur, même si j’ai entièrement écrit le livret avant qu’il compose la première note. Je lui ai d’abord proposé le sujet de l’opéra et puis nous avons discuté du genre de choses que nous aimerions voir sur une scène : quelque chose de vif, de visuel, de rapide, quelque chose aussi de très narratif qui pourrait nous faire penser au cinéma américain, en tout cas à une sorte d’efficacité et de vitesse qu’on retrouve dans un certain cinéma. Et du coup, j’avais envie de m’amuser avec cet imaginaire-là, ce réservoir d’images d’action et de situations très typées. Dans l’histoire, le fait qu’il y ait un enlèvement, une poursuite en voiture, un hold-up, une fusillade, tout cela faisait partie de ce plaisir de dynamiser l’espace de la scène par le mouvement de l’action et en même temps la reconnaissance de situations déjà vues. C’est l’autre sujet du livret, celui de ces personnages qui vivent dans un monde « déjà-vu » et cherchent quand même à le changer, à faire la révolution, et en même temps quelque chose en eux n’y croit plus complètement. Du moins c’est tout le drame de l’héroïne, Charlie, tiraillée entre l’utopie du changement, de la révolution et en même temps la vie simple, l’amour, les choses comme elles sont. Je ne sais pas si ce livret deviendra un roman mais je sais qu’il pourrait l’être, du fait de ce personnage de Charlie, qui pourrait tout à fait être la narratrice d’un livre et raconter son histoire, ses failles et ses idéaux à travers le récit des événements et les figures qui l’entourent. » Tanguy Viel
Michel Grialou
Les Pigeons d’argile
du mardi 15 au mardi 22 avril 2014
Théâtre du Capitole
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