Le festival international CDC inaugure sa 10è édition historique avec la dernière pièce de Christian Rizzo, intitulée D’après une histoire vraie, déclarée comme étant l’événement chorégraphique le plus réjouissant du dernier Festival d’Avignon.
C’est un spectacle entièrement dédié à la danse qui signe le retour à Toulouse de son créateur après sa dernière venue pour une mise en scène de l’opéra Tannhauser au Théâtre du Capitole. Notre ex-rocker toulousain dit l’avoir conçu à la suite d’une émotion intense ressentie à Istanbul à la vue d’un impromptu folklorique, une sorte de ronde improvisée par des hommes, des danseurs surgis de l’ombre à la fin d’un spectacle.
« En 2004 à Istambul – raconte Christian Rizzo,
À quelques minutes de la fin d’un spectacle auquel j’assiste, surgit comme de nulle part une bande d’hommes qui exécute une danse folklorique très courte et disparaît aussitôt.
Une émotion profonde, presque archaïque, m’envahit.
Était-ce leur danse ou le vide laissé par leur disparition qui m’a bouleversé ?
Bien que floue, cette sensation est restée depuis ancrée en moi. »
Plus connoté défenseur de la danse conceptuelle, Christian Rizzo va laisser mûrir la sensation éprouvée jusqu’à ce qu’elle devienne la source de sa nouvelle création dont le titre ne pouvait être plus simple et en relation avec l’intensité émotionnelle du moment, le sentiment d’empathie immédiate qu’a pu susciter en lui cette danse qui commence dans une torpeur lente et tranquille, qui va passer du calme au fracas, dans un mouvement qui ne s’arrête jamais, un homme puis jusqu’à huit, des hommes dansant de plus en plus ensemble et de plus en plus fraternels, dont les parcours fébriles vont être soutenus par deux musiciens percussionnistes, interprètes de leur propre musique, Didier Ambact et King Q4. « Sur un seul et même morceau aux confins de la musique tribale, du rock psychédélique et du dub, les batteurs (formidables !) déclenchent rafales et chaos. L’intensité de leurs percussions délivre les corps et déchaîne soudain les passions. Les danseurs vrillent, sautent, s’échappent et reviennent au groupe dans des voltes sourdes, jaillissent, se réunissent et se dissolvent dans de fiévreuses ondulations redonnant vie à cette effraction du regard originelle, matrice d’après une histoire vraie. » Agnès Izrine
Le tout baignant dans des lumières atmosphériques signées Caty Olive.
« Délicats, précis, obsessionnellement ouvragés, les espaces proposés par Christian Rizzo reconstituent des géographies imaginaires, où la puissance tribale de la musique s’entretient avec toute une panoplie de gestes et de mouvements puisés à des sources vernaculaires, autant qu’au savoir du chorégraphe. » Annie Bozzini
TNT les 11 et 12 février – Attention aux horaires
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Israel Galvan, l’écorché vif de la danse est de retour avec Lo Real / Le Réel / The Real
« Le flamenco ne résout pas la guerre et n’empêchera pas la fin du monde, mais il peut aider à garder la tête haute. » Israel Galvan
Le danseur, chorégraphe et scénariste musical, fils de deux célèbres danseurs d’une école de flamenco de Séville ne laisse jamais, jamais indifférent. Par tous les pores de sa peau, l’artiste transpire la danse dans tout ce qu’elle peut avoir de charnel et d’expressif. Corps conducteur de fulgurances, traversé de soubresauts et de décharges électriques, il est une sorte d’astre nouvellement apparu dans la galaxie du flamenco, un astre incontrôlable qui dérange.
« J’ai conscience que danser ne peut se résumer à une compétition ou un entraînement. Il ne s’agit pas d’être le meilleur. Danser a supposé pour moi une expérience afin de connaître les choses, me connaître moi-même. Une expérience de la connaissance.», mais encore, « « La danse m’a sauvé, assène-t-il. Je suis toujours obsédé par la mort, mais j’ai la sensation de me vider de cette obsession à travers un spectacle. Cela me permet de vivre mieux, mais ça laisse des traces dans le corps. »
Le spectacle à l’affiche est bien une suite du précédent qui s’intitulait La fin de cet état de choses d’après l’Apocalypse de Jean. Ici, il réinvente le flamenco et pulvérise les relents “folklo“ sous lesquels le franquisme avait voulu étouffer cet art rebelle par essence.
« C’est un sujet indansable évidemment, reconnaît Galván, petit-fils d’une grand-mère maternelle gitane. Lorsque j’ai commencé à travailler sur le projet, je ne pensais pas y arriver. Je me suis entouré de musiciens et, pour la première fois, de danseuses comme Belén Maya et Isabel Bayón pour ne pas être seul dans une aventure pareille. Et, précisément, parce que danser l’Holocauste est impossible, il faut le faire. Pour ne jamais oublier. »
Par une danse puissante, tranchante, nette et précise, et l’expressivité sans relâche d’un visage parcouru d’émotions, bouleversant, Israel Galvan veut évoquer le génocide tzigane par les nazis, une plongée dans l’horreur que le danseur nous assène, entouré de tous ces talents que sont les treize musiciens, deux chanteurs, Caracafé, Bobote, Uchi, à la danse, chant et jaleos, et bien sûr, Belen Maya et Isabel Bayon. La première invoquant toute la rage de la tzigane dansant jusqu’à la folie. La deuxième dans un rôle stupéfiant de tortionnaire nazi. Tomas de Perrate qui chante, murmure ou déclame la folie de ce génocide est accompagné par une guitare, un violon et un saxo.
« Durant une heure et demie, il invite le public à l’exercice du souvenir, à l’évocation de ce réel, des corps perdus à jamais mais qui selon certains témoignages continuaient à plaisanter, à danser et chanter jusqu’au dernier moment. Lo Real / Le Réel / The Real est l’évocation de cette fête-là, une ultime confiance en la vie. » Annie Bozzini
TNT les 15 et 16 février – Attention aux horaires