Après deux ans d’absence, Claude Bardouil revient à Toulouse avec « Nancy.Interview », un duo avec l’actrice polonaise Magdalena Poplawska programmé dans le cadre du festival C’est de la Danse Contemporaine. Retour sur le parcours d’un électron libre de la scène toulousaine aujourd’hui exilé en Pologne.
Programmé à Toulouse, au cœur du festival international C’est de la Danse Contemporaine ayant cette année pour thème «Des migrations», « Nancy.Interview » est un duo porté par les corps de l’actrice polonaise Magdalena Poplawska et du Toulousain Claude Bardouil. Dans « Désastre, ou la fascination du pire », sa précédente création interprétée par Coraline Lamaison à la Galerie GHP, à Toulouse, Claude Bardouil revisitait le 11 septembre 2001 à travers le prisme de la musique de Radiohead. Il poursuit avec « Nancy.Interview » son exploration de l’Amérique sur fond de rock et de drogue, en agrippant le destin tragique de Nancy, fiancée de Sid Vicious – bassiste des Sex Pistols. Elle fut retrouvée poignardée en 1978 dans la baignoire d’une chambre du Chelsea Hotel, à Manhattan. Créé en Pologne, c’est la première fois que ce spectacle sera présenté en France. Les deux interprètes se sont rencontrés à Varsovie au sein de la troupe de Krysztof Warlikowski, artiste surdoué de la scène européenne et directeur du Nowy Theatr. Claude Bardouil travaille aux côtés du metteur en scène polonais depuis deux ans, notamment en tant que chorégraphe pour ses productions lyriques – il a signé la chorégraphie de « Lulu », de Berg, monté par Warlikowski en octobre dernier à La Monnaie de Bruxelles.
Claude Bardouil a d’abord été acteur dans les mises en scène de Jacques Rosner, au Théâtre Sorano, avant de fonder en 1997 sa propre compagnie à Toulouse. Accueillie à la Cave Poésie puis en résidence au Théâtre de La Digue, la compagnie Parlez-moi d’Amour s’est illustrée durant les années 2000 en livrant une série de créations collectives colorées et de tragédies palpitantes. «En 2001, j’ai fait « les Innocents » en réaction à mon spectacle précédent, « Andromaque », et en réaction à ma formation théâtrale. J’ai toujours fait du théâtre contre. Jouer Shakespeare avec Jacques Rosner au Centre dramatique national de Toulouse était confortable, mais j’avais envie de me suicider. J’ai réalisé que j’avais une formation de merde dans un conservatoire de merde. Alors, j’ai décidé de fonder ma compagnie. Un jour, j’ai vu un spectacle de Pina Bausch, j’ai alors rencontré d’autres formes possibles», racontait récemment Claude Bardouil.
À Toulouse, il a côtoyé d’illustres aînés : acteur chez Maurice Sarrazin au Grenier de Toulouse, il a été dirigé par Jean-Pierre Tailhade, et a mis en scène René Gouzenne en récital à la Cave Poésie. «J’aime profondément le théâtre et je suis incapable de me résoudre à être seulement interprète ou metteur en scène, je suis toutes ces expériences à la fois. Il est important de se confronter à d’autres artistes, d’être bousculé. Je doute beaucoup, mais j’ai toujours su que si je voulais une chose je pouvais l’obtenir. J’ai toujours cru que rien n’est impossible : c’est une force. J’ai toujours eu une image de moi comme celle du cosmonaute de Kubrick perdu dans l’espace : je m’envisage toujours de cette manière-là, sans attache. J’ai toujours pris soin de ne jamais m’installer. Ne pas avoir de place est intéressant parce que je n’aime pas le confort». Claude Bardouil rencontre Krzysztof Warlikowski en 2009, au Festival d’Avignon où il dansait « Pas de Deux » avec sa partenaire et chorégraphe Rita Cioffi. Il vit depuis en Pologne.
Jérôme Gac
« Nancy.Interview », samedi 6 et dimanche 7 avril, à la Fabrique, Université de Toulouse – Le Mirail, 5, allées Antonio-Machado, Toulouse. Tél.: 05 61 50 42 50.
Festival C’est de la Danse contemporaine, 5, avenue Etienne-Billières, Toulouse. Tél.: 05 61 59 98 78.