C’est le mets de choix de ce concert du vendredi 25 avril 2025 donné à la Halle à 20h. Il est dirigé par Tom Koopman avec la Maîtrise de Toulouse du conservatoire de Toulouse placée sous l’autorité de son Chef de chœur Mark Opstad. La soprano Ilse Eerans et la mezzo-soprano Sophie Gallagher participent à l’événement. Avec les musiciens de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse, la symphonie n° 36 « Linz » K 425 de Mozart ouvre le concert.

Ton Koopman © Hans Morren
Guide parfait pour toute œuvre musicale de cette ère des Lumières, le claveciniste, organiste, chef d’orchestre et musicologue Tom Koopman dirige le concert après avoir tout récemment fait vibrer le public de la Halle avec le Requiem de Mozart.
Symphonie « Linz » en UT majeur du nom de la ville voisine de Vienne où le couple Wolfgang – Constance est accueilli par l’ami, le comte Thun à qui Mozart a promis de jouer une symphonie dans le théâtre de la ville. Or, après un passage chez papa Léopold Mozart et sa sœur Nannerl à Salzbourg, un séjour pas gai du tout d’ailleurs, Wolfgang n’a pas la moindre partition de symphonie sur lui. Il va en écrire une en …trois jours, le 1er novembre, le 2 et le 3 et pourra la faire jouer le 4 novembre 1783 !!
I- Adagio – Allegro spiritoso
II- Poco adagio en fa
III- Menuet – Trio
IV- Finale : presto

La Vierge de douleur
Quelques mots sur le si poignant Stabat mater de Pergolese d’une durée de quarante minutes environ :
« Aucune musique n’est capable comme celle de Pergolèse de m’émouvoir également du début à la fin, et qui n’en serait pas touché, qui resterait froid en face de cette musique ne mériterait pas le nom d’être humain. »
Johann Adam Hiller, compositeur, chef d’orchestre (1728-1804)
Qui dit Stabat Mater dit Pergolèse, et pourtant le texte latin fut mis en musique par bien d’autres compositeurs. Pourquoi donc ce Stabat plutôt qu’un autre, et constituant l’œuvre la plus éditée du dix-huitième ? Mais, tout d’abord,
Un peu d’histoire sur l’origine du texte littéraire
Le Stabat Mater, cantique liturgique romain qui apparut vers le XIe ou le XIIe siècle utilise les deux premiers mots de la séquence du Vendredi saint figurant dans le rituel romain dont le texte, d’une étonnante beauté, aurait été écrit selon la tradition, à la fin du XIIIe siècle par un moine franciscain Jacopone de Todi, mort en 1306.
Cette théorie de la génération spontanée a heurté les théologiens qui se sont un brin étonnés qu’un humble moine, dont on ne sait rien par ailleurs, ait pu “accoucher“ d’un tel joyau de la poésie médiévale. Aussi, a-t-on cherché des antécédents tout de même un peu plus brillants, et l’on annonce le nom plus lettré de Saint Bonaventure qui vécut de1221 à 1274, un peu avant notre moine. Un cardinal, qui plus est, général de son ordre, légat du pape, auteur d’ouvrages théoriques et philosophiques, pouvait plus facilement endosser la paternité d’un tel texte.

Claude Mellan – la Vierge de douleur
Par contre, il est plus facile d’affirmer que les liens sont étroits entre le sens du poème qui évoque les souffrances du Christ et celles de la Vierge, et l’ordre franciscain, tout à la dévotion de la Passion et de la Sainte Vierge et à l’origine des manifestations du chemin de Croix.
Ne faisant pas partie d’un office liturgique particulier, le texte du Stabat Mater ne se trouve alors que dans les livres de prières privées. C’est le pape Benoît XIII qui, en 1727, introduit la fête des Sept-Douleurs de la Vierge Marie dans le missel et, ainsi, l’officialise.
Autre caractéristique intéressante : cette prose était lue et non chantée. On ne trouve donc pas de teneur grégorienne dans les compositions des premiers musiciens polyphonistes qui se sont intéressés à la forme. Ce n’est qu’au début du XIXe que le Stabat est pourvu d’une mélodie officielle sous l’impulsion de Dom Fonteine, chantre de l’Abbaye de Solesmes. Elle est officialisée par Pie X. Et c’est ainsi que s’effectue la curieuse évolution de cette mélodie, la sensibilité des moines ne pouvant s’accommoder d’une telle lacune dans leur antiphonaire !

La Vierge de douleur – Atelier de Philippe de Champaigne
Stabat Mater dolorosa (Grave) duo
Cujus animam gementem (Andante amoroso) soprano
O quam tristis et afflicta (Larghetto) duo
Quae moerebat et dolebat (Allegro) alto
Quis est homo, qui non fleret (Largo – Allegro) duo
Vidit suum dulcem natum (A tempo giusto) soprano
Eja Mater fons amoris (Andantino) alto
Fac ut ardeat cor meum (Allegro) duo
Sancta Mater, istud agas (A tempo giusto) duo
Fac ut portem Christi mortem (Largo) alto
Inflammatus et accensus (Allegro, ma non troppo) duo
Quando corpus morietur – Amen (Largo assai – Presto assai) duo
Certaines traductions peignent les douleurs de la Vierge en termes très réalistes et donnent un violent éclairage à la mort ignominieuse du Christ. D’autres édulcorent, et râpent les aspérités qui pourraient choquer le fidèle pour y substituer, par d’habiles périphrases, un sentiment de tiède suavité bien propre à l’édification des âmes délicates !
A titre d’exemple, citons quatre traductions pour le premier verset :
Debout, la Mère des douleurs
La Mère douloureuse se tient là
Au pied de la croix, tout en pleurs le visage baigné de larmes
Regardait Jésus mourir.
Pleurant son Saint fils.
La Mère douloureuse se tenait debout
Au pied de la croix, tout en larmes
Tandis qu’on y suspendait son Fils.
La mère de Jésus, au pied de la croix
où son fils est attaché, sent au-dedans d’elle-même
La plus vive de toutes les amertumes.
Si l’on saute directement au final, toujours pour duo, il correspond au vingtième verset. Il renoue de façon magistrale avec la mélancolie qui plane dès les premières mesures et se résout dans une plainte soumise et intimiste qui va devenir l’une des caractéristiques majeures du chant napolitain jusqu’au milieu de l’Ottocento.

Les Anges En Pleurs (vers 1700)
Sur cet apaisement, cette sérénité, cette vision confiante de la mort s’achève le Stabat Mater de Giovanni Battista Pergolesi. Par ses contradictions mêmes, son mélange des styles profane et religieux, il est bien l’illustration de la richesse et des ambiguïtés de l’Art Baroque qui règne en maître dans la peinture, la sculpture et l’architecture du Seicento et du Settecento, sans oublier que nous sommes à Naples.
Sans être un monument de la littérature musicale, il défie les siècles, parce qu’il nous touche par son pouvoir émotionnel. Et si le premier verset donne le ton, celui d’une douleur profonde mais contenue, le dernier est une ouverture sur le ciel, un ciel de béatitudes, qui nous force à lever la tête, et qui sait, nous arrache un peu à notre médiocrité de terrien. Prenons cette page comme une vraie consolation. Et oubliez donc la ou les versions que vous avez en tête.
Orchestre national du Capitole