“C’est à travers une série de visages féminins maquillés de lumière que je vous invite à plonger dans les yeux de ces femmes. Dépasser la victimisation pour montrer la force de celles qui témoignent, voilà l’enjeu !”, explique Mallory Duhamel, porteur de ce projet. Dans le cadre de la semaine des luttes contre les violences faites aux femmes, cette exposition est visible jusqu’au 17 décembre 2021 à l’Espace Job. Mallory Duhamel explique comment lui est venue l’idée de créer ce dessein : “Dans mes conceptions lumières, je recherche une lumière radicale, contrastée, vivante, sculptant les corps des acteurs, danseurs, performeurs et tente d’être au plus juste. Ces deux années immergées dans l’univers esthétique de la danse contemporaine ont changé ma façon de créer des atmosphères lumineuses. Le spectacle Julie telle que mis en scène par Anthony Bertaud a été un tournant esthétique pour moi. C’est à partir de là que j’ai développé une recherche autour de la couleur en m’inspirant de Kandinsky, d’Itten ou encore de l’orphisme de Sonia et Robert Delaunay. C’est à la fin de ce seul en scène porté par une femme que j’ai décidé de créer le projet Sois belle et […]”.
Pour lui, cette exposition n’a pas pour “volonté ici d’accuser mais de sensibiliser en offrant la possibilité d’être traversé par les ressentis de ces femmes, devenues modèles pour quelques heures. La pression esthétique n’est pas la même pour une femme ou un homme. Le harcèlement de rue est davantage subi par des femmes que par des hommes. Un harcèlement qui porte souvent atteinte à sa propre image. Qu’est-ce qui attire l’œil ? Comment se maquiller ? Être ou se sentir belle ? Quelle image renvoie-t-on aux autres ? Doit-on s’invisibiliser ?”, poursuit l’artiste. Ainsi 39 photographies seront présentées avec une mise en scène en triptyque (Trois portraits, trois facettes de leurs vécus). “La démarche photographique vise à créer une composition esthétique, poétique et sensible pour sublimer le visage de ces femmes. Transcender leur force avec des couleurs vives mais montrer aussi la violence de ce quotidien par un jeu de lumière en clair-obscur et en contrastes”, explique l’artiste.
Une performance participative
Il est essentiel pour le photographe de découvrir ses modèles avant qu’ils ne posent. Cela doit permettre de définir l’esthétique, les couleurs et les sensations du portrait. Ainsi, il est privilégié une discussion dans laquelle l’artiste et le modèle définissent ensemble une phrase qui sera inscrite autour du tableau. “Cette phrase doit à la fois symboliser une expérience vécue mais être également évocatrice de force, courage et espoir. Je joue sur l’ambiguïté pour faire entendre les deux réalités”.
« La diversité des cultures a été très enrichissante pour le projet. De façon évidente, le rapport à l’espace public et à l’image de la femme varie selon les cultures. En incitant les modèles à se dévoiler, je fais naître une réalité troublante. Ces histoires font écho à la libération de la parole des femmes qui prend de plus en plus d’ampleur. C’est pour moi une manière d’entendre et de soutenir ces femmes”, relate Mallory Duhamel. La scénographie de cette exposition est composée d’un univers sonore de bribes de conversations des 13 modèles. Leurs voix, leurs impressions, leurs colères, leurs rires sont mixés pour former une nappe musicale. L’envie est de faire s’immerger le spectateur dans leurs vécus, leurs mots.
Cette exposition à une particularité puisque “lors de son entrée dans l’exposition, le visiteur devra choisir un post-it où un mot sera inscrit. Ces mots seront des fragments des témoignages recueillis sur le sujet du harcèlement de rue. Ils ne seront pas nécessairement péjoratifs. Le visiteur aura la liberté de choisir le mot qui lui convient. Ce post-it pourra ensuite être collé sur le corps même de la performeuse qui se retrouvera petit à petit recouverte”, raconte le concepteur en lumières. Ainsi, il sera possible d’assister au vernissage et à la performance le 25 novembre à partir de 18h30. Mallory Duhamel donne plus de détails : “Clémentine Lapha (chanteuse lyrique), Isaure Amans (danseur) Carlos Sureda entrent en scène. Ils sont l’incarnation des tableaux qui s’animent pour nous raconter leurs histoires”.