Courant décembre, à la Halle, les musiciens de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse vous feront découvrir des œuvres pour certaines jamais jouées encore à Toulouse. Trois dates à retenir, le jeudi 4, le jeudi 11 et le samedi 13. Qu’on se le dise !

Ryan Bancroft © B. Ealovega
Mais rentrons un peu dans le détail.
Pour le jeudi 4 décembre, à la direction, nous retrouvons un chef qui commence à avoir, comme on dit, son rond de serviette à la Halle, l’américain Ryan Bancroft qui fut, courant novembre, le sauveur des concerts du 5 et 6 venant remplacer Tarmo Peltokoski. Dans un programme plus qu’original, il est épaulé par Renaud Capuçon, violoniste dont on n’aura pas l’outrecuidance de vous présenter. C’est lui qui vous interprètera la Sonate pour violon de Maurice Ravel dans une orchestration de Yan Maresz. Ryan Bancroft l’a mise au programme car il a repéré des accents de musique américaine que Ravel a glissés après son séjour aux États-Unis, des accents plus lisibles encore avec son orchestration.

Renaud Capuçon © Simon Fowler
C’est le morceau de choix du concert qui ouvrira avec une pièce intitulé Entr’acte d’une compositrice américaine contemporaine tout juste quarantenaire, Caroline Shaw. Dans une étourdissante spirale créative, elle compose pour l’écran ou pour l’orchestre, écrit des partitions vocales ou instrumentales pour la fine fleur des ensembles de chambre américains. Non seulement elle s’est attaquée à une grande variété de formes, formats et genres, mais elle a aussi multiplié les rôles qu’elle pouvait y tenir : compositrice, musicienne, interprète, arrangeuse ou productrice !! Sachons aussi qu’elle a commencé le violon à…deux ans ! Une pièce déconcertante mais parfaitement lisible ! Une sorte de menuet écrit par un, voilà une épreuve, Joseph Haydn ayant trop prisé de tabac, à l’époque !
Deux autres pièces de deux John, John Cage et sa 4’ 33’’ qui, en réalité, peut avoir n’importe quelle durée ! Écouter des silences, voilà une drôle de musique bien déroutante. Comment le public réagira-t-il ? C’est une première. Et John Adams avec Harmonielehre ? ou Étude de l’Harmonie ? Une œuvre d’une quarantaine de minutes en trois mouvements, créée en 1985 à San Francisco. Question effectif orchestral, vous serez vengé des 4’ 33’’ car là, nous sommes aux antipodes. C’est celui d’un grand orchestre avec plus de cent musiciens dont 28 bois et cuivres et quatre percussionnistes. En un mot, un concert qui va décoiffer.

Roberto Forés Veses © Jean-Baptiste Millot
Retour, si l’on peut dire aux fondamentaux, mais pas complètement le jeudi 11 puisque le concert débute avec une œuvre contemporaine, Mosaïcs de la compositrice finlandaise Outi Tarkiainen, née en Laponie en 1985. Très sensible à l’environnement et surtout à ce qu’il devient, la mosaïque c’est tout simplement l’état des lieux. Avec un questionnement à la clé : la musique pourra-t-elle sauver la planète ? Sous influence nordique patente, normal de retrouver Jean Sibélius et sa symphonie sûrement la plus connue de ses sept symphonies, la n° 5 en mi bémol majeur, Op. 82. Composée lors de événements qui ont conduit à l’indépendance de la Finlande, elle est le fruit d’une commande officielle du gouvernement finlandais pour célébrer le cinquantième anniversaire de ? Sibélius ! C’est la troisième version parue en 1919 que l’on entend maintenant, en trois mouvements. Elle est d’une relative sérénité évoluant vers l’exubérance mais se résume fort bien par cette image de : sous la glace nordique coule parfois un véritable fleuve de lave incandescente. Un apparent optimiste s’exprime en conclusion.
Pour la diriger, un nouveau venu sur l’estrade de la Halle, du moins me semble-t-il, le chef Roberto Forés Veses. Directeur artistique de l’Orchestre d’Extremadura (l’un des principaux orchestres espagnols) à partir de la saison 2025/26, et premier chef invité de l’English Chamber Orchestra, Roberto Forés Veses est né en Espagne à Valence. Preuve de son éclectisme, il se consacre autant au répertoire d’opéra, qu’au répertoire symphonique. De 2011 à 2021, Roberto Forés Veses occupa le poste de directeur musical et artistique de l’Orchestre national d’Auvergne.

Marianne Crebassa © Laure Bernard / Warner Classics
Le concert se complète avec une œuvre majeure de Gustav Mahler à savoir les cinq Kindertotenlieder. Les trois premiers furent composés un an avant son mariage avec Alma Schindler et les deux derniers trois ans plus tard en 1904 quand il est père de deux petites filles en parfaite santé. Les deux thèmes qui sont réunis ici, pourtant très antinomiques sont la mort et l’enfance. Il est bien précisé par Mahler sur la partition que les cinq chants doivent être donnés dans l’ordre prescrit, dans leur continuité. L’orchestre est ici réduit aux proportions d’un orchestre de chambre. L’œuvre reste une des plus accomplies de son compositeur et fut créée le 29 janvier 1905 à Vienne et dirigée par Mahler. Pour le chant, nous saluons le retour à la Halle de notre mezzo-soprano française et plus précisément occitane (elle y tient !) Marianne Crebassa qui mène sa magnifique carrière, disons époustouflante de par sa richesse artistique, avec une sagesse inouïe. Citant son modèle dans ce cycle, en l’occurrence Kathleen Ferrier, on ne peut être que conquis par avance.

Nicolas Chatenet © Julien Benhamou / OnP
Enfin, un peu plus fun, c’est le Happy Hour du samedi 13 à 18h consacré aux cuivres. Succès assuré ! On énumère simplement les compositeurs qui y participent comme Florent Schmitt, Henri Tomasi, Pierre Boulez, Claude Debussy, Maurice Ravel. Il faut un chef, donc Florent Didier à la direction. Et, celui qui mène le débat avec ses arrangements, Nicolas Chatenet. Jeune trompettiste solo à l’Opéra national de Paris, plus les engagements à droite et à gauche, le musicien trouve le temps de composer et réaliser des arrangements pour ensemble de cuivres ! Au cours de cet Happy Hour, il va dévoiler deux arrangements de monuments du répertoire symphonique “impressionniste“ : le Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy, et la suite de Ma Mère l’Oye de Ravel. On est ravi qu’il présente au public ce qu’il appelle les deux grandes équipes de la famille des cuivres, les instruments dits coniques (cor, tuba, euphonium et les instruments dits cylindriques (trompettes et trombones) qui peuvent avoir des sonorités très différentes.
Il nous démontrera sûrement que le terme de “cuivres“ est bien impropre pour désigner cette grande famille d’instruments dont la caractéristique principale et commune est l’utilisation des lèvres de l’instrumentiste en manière d’anches pour la production du son. Le terme d’anches lippales serait plus satisfaisant !! mais pas très “fun“ côté pratique ! Un cours sur les embouchures des, cor de chasse, cornet à pistons, bugle alto tuba basse, tuba contrebasse, serpent ?……Ou sur les instruments primitifs ? conque marine, olifant, cor des Alpes, puis, trompette de cavalerie, clairon d’infanterie, bugles et saxhorns, et tous les saxos !! Pas sûr que le concert se termine à 19h !
Orchestre national du Capitole




