Il y a un an pile sortait « Le tableau volé », de Pascal Bonitzer, comédie alerte sur la découverte d’un Egon Schiele dans un modeste pavillon de Mulhouse. Avec « Les règles de l’art », de Dominique Baumard, ce sont des peintures d’Amadeo Modigliani et Fernand Léger qui sont au cœur d’une intrigue réjouissante adaptée de faits réels.
Le 19 mai 2010, un cambrioleur réussit nuitamment à voler cinq toiles signées Modigliani, Léger, Matisse, Braque et Picasso au musée d’Art moderne de Paris. Surveillance déficiente, système d’alarme en panne, rondes relâchées : le malfaiteur avait pu aller et venir dans les salles d’exposition sans attirer l’attention… De cette histoire vraie, qui a débouché sur l’arrestation d’un trio de Pieds Nickelés, condamnés en 2017, Benjamin Charbit et Dominique Baumard ont tiré une comédie policière sympathique qui doit beaucoup à ses têtes d’affiche. Steve Tientcheu incarne « L’artiste », un cambrioleur-escaladeur du genre zen qui a un penchant pour les appartements situés au dernier étage d’immeubles bourgeois. Sofiane Zermani, « Le brocanteur », est l’archétype du receleur tchatcheur, toujours prêt à embrouiller son prochain. Melvil Poupaud, « L’expert » (en montres de luxe) apparaît vite comme le dindon de la farce – type honnête et naïf qui se fait embarquer dans une aventure qui le dépasse.

Melvil Poupaud et Sofiane Zermani dans « Les règles de l’art ». Photo Eloïse Legay/SrabFilms
Chacun dans son registre, les trois comédiens jouent à merveille leur partition. Il faut voir Tientcheu – rond visage de bébé, regard d’enfant de cœur – faire ses courses de voleur, dans un magasin de bricolage, comme un artisan consciencieux. Fringué de façon ultra voyante, Zermani, qu’on avait connu rappeur sous le nom de Fianso, est devenu un comédien s’étoffant de film en film (il était excellent, dans un registre dramatique, dans « Barbès, little Algérie »). Ici, il se régale visiblement dans la peau d’un frimeur attiré par tout ce qui brille. Quant à Poupaud, il joue parfaitement le gars très ordinaire ne cessant de tomber des nues face à un Zermani qui le « maraboute » avec l’argent facile. L’une des meilleures scènes du film les voient chanter, en version karaoké, « Le coup de soleil » de Richard Cocciante. Et Sofiane Zermani d’affirmer, rigolard : « Oublie le rap : c’est de la merde ! ça, c’est de la musique ». Remarque qu’on pourrait reprendre pour une autre chanson également au générique : « Où va la chance », adaptation française d’un standard de Phil Ochs par Françoise Hardy, splendeur qu’il est toujours bon de se glisser dans l’oreille.
« Les règles de l’art », de Dominique Baumard, actuellement au cinéma.