The Brutalist, un film de Brady Corbet
Pour son premier film en salle, le réalisateur Brady Corbet (37 ans) impressionne, voire subjugue. Tout dans cet opus porte les symptômes d’un grand cinéaste : la puissance de l’épopée, la grandeur du mythe, l’universalité des thèmes, la perfection d’une réalisation qui conjugue la virtuosité des lumières à celle des plans, des couleurs, du montage, de la musique et de la direction d’acteur. A couper le souffle !
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Adrien Brody (Laszlo) – Crédit : Universal Pictures
1947. Fuyant une Europe meurtrie, Laszlo, un architecte juif hongrois, rescapé des camps de la mort, se réveille à bord d’un paquebot entrant dans le port de New York. Allongé sur le pont, sa première image de l’Amérique est celle de la statue de la Liberté à l’envers… Il retrouve à terre un cousin qui a ouvert une boutique de mobilier. Il va l’abriter et le faire travailler. Il va aussi lui présenter l’un de ses meilleurs clients, le richissime Harrison Van Buren. Ce dernier va se toquer littéralement de Laszlo et lui confier la construction d’une œuvre gigantesque communautaire servant tout à la fois d’église, de gymnase et de bibliothèque. Formé à l’école du Bauhaus, en Allemagne, Laszlo est alors un fervent défenseur du brutalisme (voir Le Corbusier en France), un style massif, fait de béton et de briques, qui fit fureur dans l’Europe post Second conflit mondial. Contre vents et marées, Van Buren va défendre les options de son architecte, malgré les puissantes vagues d’antisémitisme qui déferlent sur ce pays en construction. Bientôt, la femme de László, Erzsebet, et leur nièce, bloquées sur le Vieux Continent par des problèmes administratifs, le rejoignent enfin.
Ceci n’est pas un biopic, Laszlo n’a jamais existé. Mais il est beaucoup plus à lui seul. Non seulement il est la figure de l’artiste en quête de liberté, mais aussi, au travers de son aventure américaine, le miroir d’une nation en proie à une forme de néo-esclavagisme, encore sous l’emprise d’un racisme qui ne dit pas son nom, déjà dominée par le mirage tout puissant du dollar, fracturée par des religions contraires. Le rêve américain avez-vous dit ?
Présenté sous forme d’un opéra avec un Prologue, deux actes séparés par un entracte de 15’, et un Epilogue, The Brutalist est, en plus de ses extraordinaires qualités formelles, porté par des interprètes vertigineux, au premier rang desquels le sublime Laszlo d’Adrien Brody. Dans la toute-puissance de son talent, il incarne un architecte dont le génie et les convictions vont faire basculer tout un pays.
Au moment de terminer cet article, le verdict des BAFTA (Césars britanniques) vient de tomber : 4 prix pour ce film dont celui de la Meilleure réalisation et celui du meilleur acteur pour Adrien Brody.