Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Fenêtre sur cour d’Alfred Hitchcock
Prisonnier d’une chaise roulante, avec une jambe dans le plâtre, le temps d’un été étouffant à Greenwich Village, Jeffries (James Stewart) trompe son ennui en observant depuis sa fenêtre les voisins habitant le petit immeuble en face de son appartement. La variété des profils et des situations distrait ce reporter-photographe en manque d’action dont le quotidien est rythmé par les visites de son infirmière et de sa fiancée (Grace Kelly), riche jeune femme qu’il juge trop conventionnelle et pas assez aventureuse. Un soir, le voyeur surprend l’un de ses voisins quittant l’immeuble avec une lourde valise tandis que l’épouse de celui-ci, constamment alitée, semble avoir disparu de l’appartement. L’hypothèse d’un meurtre devient une certitude pour Jeffries qui va dès lors s’employer à convaincre ses proches à croire en son scénario…
Sans Fenêtre sur cour, sorti en 1954, Brian De Palma n’aurait sans doute pas tourné de films tant cette œuvre d’Hitchcock inspire une large part de ses longs métrages tout en ayant influencé nombre d’autres cinéastes (de Dario Argento à David Lynch) et en s’étant ancré fortement dans la culture populaire.
Métaphore du cinéma
Ce suspense jubilatoire, qui emprunte aussi à la comédie de mœurs et au marivaudage, ne néglige pas l’humour ni la cruauté en enchaînant des tranches de vies mettant en scène les voisins de Jeffries ainsi que le couple bancal qu’il forme avec sa fiancée. Bien que circonscrit spatialement dans le seul appartement du héros et la façade de l’immeuble voisin, Fenêtre sur cour réussit la performance de brasser des destins, des caractères, des récits. Ce film sur le regard et l’imagination est une métaphore du cinéma et l’on suit donc un personnage qui, muni de jumelles et d’un téléobjectif, invente littéralement une histoire.
Parsemé d’allusions à l’impuissance et la castration, Fenêtre sur cour est aussi une œuvre sur le fantasme, le voyeurisme, l’éternelle relation entre Eros et Thanatos. Assiste-t-on au délire d’un paranoïaque abusé par les apparences ou à l’intuition d’un homme qui en savait trop ? Le réalisateur de Sueurs froides et de La Mort aux trousses donne la réponse dans un final saisissant où le réel semble traverser l’écran.
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